approfondissement partie 5
Austérité, rigueur, relance, croissance, de quoi parle-t-on ?
Austérité, rigueur, relance, croissance, de quoi parle-t-on ? Le Monde | 22.04.2014 | Par Mathilde Damgé
Quatre organisations salariales ont appelé jeudi à une journée de mobilisation interprofessionnelle, marquée par des grèves et des manifestations, pour, notamment, « lutter contre l'austérité et ses impacts destructeurs ». Jean-Claude Mailly a en effet vu dans les élections départementales l'expression d'un mécontentement ; en cause, selon le leader de la CGT, « l'austérité dont le résultat est le chômage et la montée de la xénophobie ». Et selon le leader de FO, interrogé dans Le Figaro, il est « de la responsabilité » d'un syndicat « à un moment de dire stop » à « la logique d'austérité, dont les dégâts sociaux, économiques et démocratiques sont considérables ». Une analyse récusée par François Rebsamen : « Il n'y pas en France de politique d'austérité », dit-il. Le ministre du travail affirmait déjà, il y a un an, que le plan d'économies de 50 milliards d'euros annoncé par son gouvernement n'était pas dans l'austérité mais « dans une gestion rigoureuse ». « L'austérité, cela serait de diminuer les salaires, de faire ce qu'il s'est passé en Italie, en Espagne, en Grande-Bretagne. »
Quelle définition scientifique de l'austérité ?
Une distinction également revendiquée par son prédécesseur Bernard Cazeneuve, qui affirmait que « si l'austérité est une faute, la rigueur est une vertu ». En clair, la rigueur se situerait à mi-chemin entre mesures favorisant la croissance et mesures d'austérité, faisant appel à des leviers complémentaires empruntés aux deux extrémités du spectre de choix économiques, comme, par exemple, une baisse des cotisations salariales au profit des entreprises, financée par une réduction des dépenses publiques.
Mais est-ce si simple ? Voilà trois ans seulement, Nicolas Sarkozy refusait quant à lui le terme de « rigueur », estimant alors que « la rigueur, c'est la baisse des prestations sociales et des salaires ». L'ancien chef de l'Etat préférait dire : « Nous menons une politique de gestion rigoureuse, qui vise à baisser l'endettement de la France. » En réalité, il n'existe pas de définition scientifique de « rigueur » et « austérité » en matière économique. Ces deux termes désignent de manière générale une politique économique, qui se veut l'inverse de la relance.
Un équilibre subtil
Face à la crise, il existe deux camps distincts, celui de la rigueur ou austérité et celui de la relance, qu'on peut résumer très grossièrement comme suit : en période de ralentissement de la croissance, les économistes favorisant une politique de la demande, qu'on trouve généralement plutôt à gauche de l'échiquier politique, soutiennent la relance de la croissance, par l'endettement de l'Etat. L'idée étant de créer un cercle vertueux : relancer la croissance finira par rembourser la dette contractée par l'Etat.
De l'autre côté de la barrière économique (et souvent politique), les tenants de la politique de l'offre, et donc de l'austérité, prônent la méthode inverse : resserrer les cordons de la bourse de l'Etat, afin de diminuer son endettement, et privilégier un allègement de la fiscalité des ménages et des entreprises, supposé aider à relancer l'activité. Ce clivage a longtemps pu recouper l'axe politique gauche droite. C'est de moins en moins vrai. D'ailleurs, les dernières politiques d'économies en France ont davantage consisté pour François Fillon à augmenter les impôts et pour Manuel Valls à diminuer les prestations sociales.
La contrainte budgétaire
Car le choix de l'endettement n'est plus possible : Bruxelles contrôle de près le niveau du déficit, que la France s'est engagée à ramener sous les 3 % du produit intérieur brut (PIB). Il ne reste donc le choix qu'entre austérité et rigueur. Le choix des mots permet en effet de donner une coloration plus sociale ou moins libérale à des plans d'économies imposés en réalité par les circonstances et les choix précédents de l'exécutif. Depuis plus d'une décennie, la France ne peut donc plus mener de politique franche de relance, et n'a jamais souhaité non plus mener une réelle politique d'austérité avec baisse des pensions ou des salaires des fonctionnaires, comme ce fut le cas en Italie, en Espagne, en Grèce, etc. Résultat, la politique choisie est souvent un savant cocktail de relance et de rigueur, financée par des mesures d'économies ailleurs. L'ancienne ministre de l'économie Christine Lagarde avait d'ailleurs parlé de « rilance » pour tenter de mêler «rigueur » et « relance ». Un dosage subtil expliquent les économistes de l'OFCE sur leur blog : « La purge budgétaire [des six dernières années] s'est avérée peu efficace et d'un coût en termes d'activité, de situation financière pour les entreprises et de chômage, disproportionné par rapport aux résultats obtenus. »
Rigueur en deçà des Pyrénées, austérité au-delà
En dissociant rigueur et austérité, l'idée est de séparer en théorie les mesures qui participent d'un contrôle des dépenses, voire d'une réduction de celles-ci, et celles qui peuvent en plus avoir un effet négatif sur la croissance... ce qui n'est pas du tout souhaité, puisque seule la croissance peut nourrir les recettes sur le long terme, grâce à un retour de l'investissement, une baisse du chômage ou une hausse des salaires et une reprise de la consommation.
Pour schématiser, les leviers favorisant la croissance correspondent à des « sorties » d'argent : investissement de l'Etat dans des programmes de relance, soutiens à l'emploi et à la consommation par des baisses de fiscalité. A l'inverse, un plan d'économies s'attaquera aux dépenses de l'Etat, aux aides sociales, aux ristournes concédées sur les impôts.
Dans la zone euro, un autre levier peut être activé, celui de la monnaie. Quand on la rend plus « chère » (en augmentant les taux directeurs qui déterminent les taux d'intérêt auxquels on peut emprunter), on amoindrit le potentiel de croissance. Quand on la « brade » (en baissant les mêmes taux, ou en augmentant l'émission de monnaie, ce qui a pour effet de rendre la monnaie moins rare donc moins chère), on soutient la croissance. Mais la politique monétaire ne peut pas être actionnée individuellement par chaque pays.
Q1. Pourquoi les syndicats s’opposent-ils à l’austérité ?
Q2. Pourquoi est-il difficile de définir ce qu’est une politique d’austérité ?
Q3. La gauche et la droite mènent-elles des politiques différentes ?
Q4. Pourquoi la France ne peut-elle plus mener de politique franche de relance ?
Q5. Quelle est l’alternative à une politique de relance budgétaire ?
politique budgétaire et monétaire par le jeu
Jeu 1 Préparer le budget de l’Etat
Q1. Recopier les définitions suivantes : budget de l’Etat, mission, pacte de stabilité et de croissance, politique budgétaire
Q2. Avez-vous l’intention d’être dépensier ou rigoureux ?
Q3. Quelles sont les différentes étapes du budget de l’Etat ?
Q4. Qu’est ce qu’une politique d’austérité ?
Score mission 1 :
Score mission 2 :
Score mission 3 :
Jeu 2 Mettre en place une politique monétaire
Q5. Qu’est ce qu’un taux directeur ?
Q6. Pourquoi maintenir un taux d’inflation autour de 2 % ?
Q7. Quels sont les effets d’une hausse du taux d’intérêt sur l’inflation ?
Q8. Que se passe tçil quand le taux d’intérêt directeur diminue ? Pourquoi selon vous ?
Score final :
vous montrerez que les pays de l’Union européenne connaissent des difficultés à coordonner leurs politiques économiques.
À l’aide de vos connaissances et du dossier documentaire, vous montrerez que les pays de l’Union européenne connaissent des difficultés à coordonner leurs politiques économiques.
DOCUMENT 1 Situation économique des pays membres de l’Union Européenne en 2012
Pays |
Taux de chômage en % (moyenne annuelle) |
PIB par habitant (en euros) |
Taux d'inflation en %(1) |
Allemagne |
5,5 |
31 300 |
2,1 |
Autriche |
4,3 |
33 300 |
2,6 |
Belgique |
7,6 |
30 500 |
2,6 |
Bulgarie |
12,3 |
12 100 |
2,4 |
Chypre |
11,9 |
23 200 |
3,1 |
Croatie |
15,9 |
15 600 |
3,4 |
Danemark |
7,5 |
32 000 |
2,4 |
Espagne |
25,0 |
24 400 |
2,4 |
Estonie |
10,2 |
18 000 |
4,2 |
Finlande |
7,7 |
29 100 |
3,2 |
France |
10,3 |
27 500 |
2,2 |
Grèce |
24,3 |
19 200 |
1,0 |
Hongrie |
10,9 |
16 800 |
5,7 |
Irlande |
14,7 |
33 200 |
1,9 |
Italie |
10,7 |
25 200 |
3,3 |
Lettonie |
15,1 |
14 700 |
2,3 |
Lituanie |
13,3 |
17 800 |
3,2 |
Luxembourg |
5,1 |
69 400 |
2,9 |
Malte |
6,4 |
22 100 |
3,2 |
Pays-Bas |
5,3 |
32 800 |
2,8 |
Pologne |
10,1 |
16 800 |
3,7 |
République Tchèque |
7,0 |
20 200 |
3,5 |
Roumanie |
7,0 |
12 600 |
3,4 |
Royaume-Uni |
7,9 |
28 400 |
2,8 |
Slovaquie |
14,0 |
19 200 |
3,7 |
Slovénie |
8,9 |
20 900 |
2,8 |
Suède |
8,0 |
32 700 |
0,9 |
Union Européenne à 28 |
10,5 |
25 500 |
2,6 |
Source : Eurostat, 2013.
(1) taux d’inflation : variation annuelle de l’indice des prix à la consommation, exprimée en pourcentage de variation.
Source : Eurostat, 2013.
(1) Dette publique : dette de l’ensemble des administrations publiques (État, collectivités locales, administrations de Sécurité Sociale…).
(2) Les données concernent les 27 pays membres de l’Union Européenne avant l’adhésion de la Croatie.
DOCUMENT 3
Quand on considère l’Europe, ou plus précisément la zone euro, dans son ensemble – c’est-à-dire en additionnant les données de tous les pays utilisant l’euro – on ne distingue pas clairement ce qui la place en mauvaise situation. La dette publique comme privée y est un peu plus faible qu’aux États-Unis, ce qui laisse supposer qu’il doit y avoir davantage de marge de manœuvre : les chiffres de l’inflation ressemblent [à ceux des États-Unis], et rien ne laisse prévoir de poussée inflationniste ; et l’Europe […] n’a pas besoin d’attirer les capitaux étrangers.
Mais l’Europe n’est pas un tout. C’est un assemblage de nations possédant chacune son propre budget (parce que l’intégration budgétaire est très faible) et son propre marché du travail (parce que la main-d’œuvre est peu mobile) mais pas sa propre monnaie. Et c’est cela qui crée la crise.
Prenons le cas de l’Espagne, emblématique […] de la crise économique de l’euro et ignorons pour l’heure la question du déficit budgétaire. On l’a vu, pendant les huit premières années d’existence de l’euro, l’Espagne a connu d’immenses afflux d’argent qui ont alimenté une bulle immobilière(1) massive et conduit à une hausse importante des salaires et des prix, relativement à ceux des économies du cœur de l’Europe. Le problème fondamental de l’Espagne, d’où découle tout le reste, est de ramener ses coûts et ses prix au juste niveau. Comment y parvenir ? Et bien, cela pourrait se faire à travers l’inflation au sein des économies au cœur de l’Europe. […] [Cependant] la BCE, selon les termes mêmes de son mandat, est tenue d’assurer la stabilité des prix.
Source : Sortez-nous de cette crise… maintenant !, Paul KRUGMAN, 2012
(1) Bulle immobilière : période de hausse très importante et rapide des prix de l’immobilier, due en grande partie à la spéculation.
Rencontres SES
http://crdp.ac-paris.fr/rencontres-ses/
Pour le 19 décembre, chaque classe doit faire parvenir cinq photos originales (pas de photo piquées sur internet) illustrant la thématique des Rencontres (L'impôt dans tous ses états), accompagnées chacune d'un titre ou d'une légende, ainsi que d'un texte d'accompagnement présentant le sens que les élèves ont voulu donner en proposant ces photos, utilisant au maximum le vocabulaire conceptuel propre à nos disciplines. Les photos seront envoyées en fichier attaché (et non dans le corps du mail) sous format JPEG, et le texte d'accompagnement devra ne pas excéder 5000 caractères (la norme étant pour la presse web 3500).
Les productions des classes en aval des Rencontres sont libres de format, et devront parvenir avant le 20 février, afin que vos élèves puissent se concentrer ensuite sur leurs TPE. En cas de photos où apparaîtraient des individus, faire remplir les autorisations (droit à l'image), ou veiller à faire flouter les visages. En cliquant sur le lien suivant, vous trouverez des exemples de documents téléchargeables qu'il faudra adapter aux Rencontres.
Tous les travaux des élèves seront mis en ligne sur le site des Rencontres et sur les webTV de nos académies respectives. Un jury sélectionnera les sept meilleures photos, qui seront présentées en public à nos intervenants par les élèves primés le jour des Rencontres.
Exemple : padlet 1ES 2014-2015
Le système redistributif français lutte t-il efficacement contre les inégalités ?
Document 1 – Composition du revenu disponible en 2008 selon le niveau de vie (en %)
Champ : France métropolitaine, ensemble des ménages dont le revenu déclaré au fisc est positif ou nul et dont la personne de référence n’est pas étudiante.
Lecture : en 2008, pour les ménages dont le niveau de vie est inférieur au 1er décile, la part des salaires imposables dans le revenu disponible est de 38,8 %.
Note de lecture : Le poids des différents types de revenus dans le revenu disponible peut être supérieur à 100 % puisque les impôts viennent en déduction du revenu disponible. Plus les impôts directs prélevés sont importants, plus, le revenu avant paiement des impôts est haut au dessus de 100 %
Sources : Insee ; DGFiP ; Cnaf ; Cnav ; CCMSA, enquête Revenus fiscaux et sociaux 2008 - Insee Références - Édition 2011
Q1. Illustrer – donnez des exemples de « revenus d’indépendant», et de « revenus du patrimoine »
Q2. Définir, rappelez qui sont les ménages des colonnes « inférieur à D1» et « supérieur à D9 ».
Q3. Analyser - Quels sont les éléments du système de redistribution français qui contribuent le plus à la réduction des inégalités ?
Q4. Justifier - Voici une liste de 3 mesures que pourrait prendre un Président de la République. Indiquez pour chacune les effets sur les ménages selon leur décile d’appartenance :
a)- Mesure n°1 : baisse des impôts directs – b) Mesure n°2 : hausse des prestations familiales – c) Mesure n°3 : baisse des pensions retraites.
Document 2 – La grande machine à redistribuer
Il est temps (…) d’essayer de dresser un bilan des performances réelles de notre « machine à redistribuer » sur les inégalités de revenu. Pour avoir une image globale, mais néanmoins comparable aux autres pays, il peut être utile de se concentrer en premier lieu sur les impôts proprement dits, en excluant les prestations et les « cotisations sociales », dont le niveau varie très fortement selon les pays (…). Sur un tel périmètre, les performances françaises en termes de redistribution verticale sont assez décevantes : les impôts couplés aux transferts publics sans contrepartie représentent un flux de ressources équivalent à environ 5 % du PIB, dirigé des 50 % des ménages les plus riches vers les 50 % les plus pauvres. C’est bien moins qu’en Angleterre, en Belgique, en Allemagne ou encore en Italie. On peut enrichir ce tableau par une analyse un peu plus large prenant en compte l’effet des impôts sur le revenu et de la taxe d’habitation, plus l’ensemble des prestations familiales, de logement et les minima sociaux. (…) Au regard de l’importance des prélèvements, le bilan de la redistribution verticale semble donc de prime abord assez décourageant. (…) C’est [que la ] France n’a pas une politique spécifiquement ciblée sur les ménages modestes, car elle attache beaucoup d’importance à la redistribution horizontale, essentiellement au travers de la dimension « famille ». A l’exclusion des minima sociaux, ciblés par nature sur les foyers les plus pauvres, la majorité des prestations sociales concernent un éventail de population assez large. Seules un tiers des prestations familiales sont versées sous condition de ressources en France. (…)
Les évaluations du caractère redistributif du système fiscal, comme celles que nous avons esquissées, se contentent le plus souvent de donner un aperçu, à un instant donné, de la dispersion des ressources avant et après application du système sociofiscal. C’est un travail utile, mais fatalement incomplet. (…) Prendre en compte les effets actualisés nets du système est, lorsque c’est possible, une mesure beaucoup plus pertinente de la redistribution. L’exemple type de ce point de vue est celui des retraites : pour apprécier la redistributivité globale des retraites, il faut rapporter les cotisations versées par les individus tout au long de leur vie professionnelle aux flux actualisés nets des pensions qu’ils reçoivent après leur retraite. Sous cet angle, le système de retraite par répartition court le risque d’être structurellement régressif. Les bas revenus ont en effet une espérance de vie à 60 ans beaucoup plus courte que les hauts revenus : en gardant fixe l’âge légal de la retraite et le nombre de trimestres nécessaires pour toucher une retraite à taux plein, et sans aucun mécanisme de prise en compte des différentiels d’espérance de vie, les ménages pauvres touchent donc en moyenne leur retraite sur une durée beaucoup plus courte que les ménages plus riches. La somme des flux est donc moins importante rapportée à un effort de cotisation équivalent. Le même type de raisonnement peut être appliqué à la fourniture de services publics comme l’éducation. (…) Notre système fiscal possède donc à première vue un bilan redistributif assez moyen au regard de l’ampleur des prélèvements. Ceci est dû en partie au ciblage relativement faible des prestations publiques. Néanmoins, ces résultats sont le fruit d’éclairages partiels d’un système dont on a encore bien du mal à cerner toutes les facettes. « Boîte noire ? Panier percé ? : Comment fonctionne vraiment la grande machine à redistribuer ? », Camille LANDAIS, Regards croisés sur l’économie N° 1, 2007
Q5. Définir - à partir du texte, définir les notions de redistributions verticale et horizontale.
Q6. Analyser - pourquoi le système fiscal français est-il faiblement redistibutif (verticalement) ?
Q7. Discuter - pour rendre plus redistributif le système des retraites, quelle(s) mesure(s) pourrait-on envisager ?
Q8. Analyser : faites ce qui est suggéré dans la phrase soulignée.