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approfondissement Partie 7


Observation Père Lachaise 1ES1

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Observation 1ES1 groupe 2,  2016

 

 

 


10/05/2016
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Les comparutions immédiates.

  "la violence des riches" des Pinçon-Charlot  
 

Deux poids, deux mesures : justice de classe et délinquance des pauvres

Pendant ce temps-là, à l’autre bout de l’échelle sociale, la sévérité envers la délinquance en survêtement et capuche contraste avec la bienveillance envers la délinquance en col blanc. Cela donne à voir le fonctionnement de classe d’une justice à deux vitesses.

Les comparutions immédiates

Les « comparutions immédiates » du palais de justice de Paris sont jugées le lundi à partir de 13 h 30 par la 23e chambre correctionnelle. On y découvre la façon expéditive dont est jugée la violence des jeunes, souvent issus de l’immigration. La prison ferme semble prévaloir sur la prévention et la compréhension. Ces comparutions immédiates, dans la solennité du prétoire et dans l’affrontement à fleurets mouchetés de deux mondes sociaux qui n’ont guère d’autres occasions de se rencontrer, offrent en direct la possibilité d’assister aux dégâts que peut engendrer la violence symbolique et de pressentir la douleur ineffaçable qu’elle est susceptible d’engendrer chez ceux qui la subissent. Cette procédure a été créée par une loi du 10 juin 1983 : durant le premier quinquennat de François Mitterrand, avec une majorité socialiste à l’Assemblée nationale. « La comparution immédiate permet de juger une personne majeure dans un délai très court à la suite de sa garde à vue note. »

Les inculpés sont de jeunes hommes. Ils se retrouvent face à un parterre particulièrement féminin. Les magistrats, procureur, assesseurs, greffier sont des femmes le jour où nous prenons place dans le public. Seul parmi le « personnel juridique », le président est un homme. La présence dans le public de jeunes et élégantes étudiantes de première année de droit, venues, comme les sociologues, assister en direct à un drame judiciaire, ajoute de la violence symbolique. Avec l’accord plus ou moins ferme et réfléchi des intéressés, la justice va traiter de leur sort dans l’urgence, ce qui ne peut qu’ajouter au malaise, au désarroi douloureux que doivent ressentir ces jeunes, presque tous en tenue de banlieue pauvre, avec leurs blousons à capuche et leurs pantalons risquant à tout instant de s’affaler sur leurs baskets. Dans une sorte de box faisant songer aux stalles du chœur des églises gothiques, ils font pâle figure, un gendarme immobile derrière chacun d’eux. Ils resteront debout pendant toute l’audience, livrés aux regards désolés, curieux, furieux ou compatissants des membres de leurs familles et d’un public plutôt clairsemé.

Cet après-midi-là, ce sont de jeunes hommes qui jettent autour d’eux des regards incertains. De nationalité française parfois, mais avec des origines lointaines : la République démocratique du Congo, le Mali, la Tunisie ou la Libye. Ils se retrouvent devant un tribunal composé exclusivement de Français blancs. La précarité, le chômage et le travail non déclaré sont tellement le lot commun de tous ces jeunes inculpés que l’un d’entre eux répondra au président du tribunal qui lui demande sa profession : « Je suis en CDI. » Formule qui traduit l’essentiel : avoir un travail stable. Quant à choisir son travail, il ne faut pas rêver. Les magistrats ont opté en toute liberté pour des études de droit. Dans le monde des jeunes inculpés passant en comparution immédiate, on ne choisit pas une « carrière », on bénit le Ciel lorsqu’il vous accorde un boulot, quel qu’il soit.

La pauvreté et la clandestinité se conjuguent parfois avec des pathologies plus ou moins lourdes. Ce jour-là furent évoquées une psychose hallucinatoire et une débilité légère, avec comme conséquence éventuelle une mise sous curatelle. Les avocats, toujours commis d’office, cherchent à excuser, à faire comprendre les vols, avec ou sans violence, le plus souvent sous l’emprise de l’alcool, qui font l’objet du délit. Les inculpés attendent leur tour en essayant d’imaginer ce qui les attend. Après chaque audition, le jeune s’éloigne en coulisses, suivi de son gendarme, laissant ses éphémères compagnons de galère accumuler encore un peu d’angoisse avant de devoir tenter d’expliquer leur geste.

La configuration théâtrale d’un tribunal, où la scène voit surgir des coulisses et y disparaître les acteurs dans un décor de colonnades et de fresques aux motifs symboliques, chargés de transformer l’arbitraire de la parole juridique en sacré, en exécution d’une volonté quasi divine puisque émanant de la société, rend dérisoire la mansuétude du président du tribunal. Malgré cela, les jeunes délinquants ont les plus grandes difficultés à s’exprimer. Les réponses aux questions, les tentatives d’explicitation de leurs motivations sont brèves, confuses, formulées à voix basse sur un rythme à la fois hésitant et syncopé : il s’agit d’en finir au plus vite avec une situation d’une violence et d’une humiliation sans pareilles.

À l’opposé, les interventions de la procureure ou des avocates et des avocats de la défense sont claires, percutantes, voire brillantes et toujours déclamées avec toute la majesté que leur robe noire leur accorde, en tant que prêtres de ce culte républicain. L’ouverture au public parachève cet ensemble d’éléments en accentuant la position d’infériorité et en confirmant la culpabilité des jeunes en cause qu’un tel apparat rejette dans l’opprobre des citoyens honnêtes. Il y a du voyeurisme à voler des vies dans leurs moments les moins reluisants et à assister en direct au désastre de l’annonce de la sanction. Il conforte les uns et les autres dans leurs positions, dans la satisfaction de soi de l’honnête homme et dans la détresse du fauteur hors la loi.

Cette procédure est loin d’être exceptionnelle. En 2002, 38 300 affaires ont été traitées en comparution immédiate, alors que celles qui ont fait l’objet d’une instruction ont été un peu moins nombreuses, 37 400. L’écart s’est creusé, puisqu’en 2011 les comparutions immédiates sont passées à 43 000 contre 17 548 affaires faisant l’objet d’une instruction. Avec la réduction des moyens financiers, notamment sous le mandat de Nicolas Sarkozy, « les procureurs ont reçu l’instruction de limiter l’ouverture d’informations judiciaires note ».

La prison, ferme ou avec sursis, est presque toujours à la clé lorsque, après délibération, les peines sont énoncées devant le parterre de la charrette de délinquants du jour. Ils sont revenus ensemble des coulisses pour entendre collectivement le sort réservé à chacun. Moment de violence symbolique encore, qui finit d’anéantir les premiers qui entendent l’énoncé de leur sentence, augmentant l’angoisse chez les autres. Mais la procureure n’a jamais requis, même en cas de récidive, la peine plancher, ce prêt-à-juger très en vogue sous la présidence de Nicolas Sarkozy, auquel on doit cette loi qui réduit la justice à l’application automatique de la peine prévue par le code pénal, dès lors que l’accusé n’en est pas à son premier délit. L’engagement nº 53 du candidat François Hollande était clair : « Je reviendrai sur les peines planchers qui sont contraires au principe de l’individualisation des peines. » Mais, un an après son élection, aucune décision n’a encore été prise. Le 28 mars 2013, le président François Hollande a déclaré sur une chaîne de télévision qu’il était hésitant et que les peines planchers « seront supprimées lorsqu’on aura trouvé un dispositif qui permet d’éviter la récidive ».

L’emprisonnement peut être immédiat, avec un mandat de dépôt délivré séance tenante. En 2010, sur les 15 947 mandats de dépôt délivrés, toutes procédures confondues, 15 291 ont été signifiés à l’issue d’une comparution immédiate ! Sur l’ensemble des affaires jugées en correctionnelle, le taux de condamnés à une peine de prison est plus élevé chez les prévenus jugés en comparution immédiate que chez les autres. « Les personnes jugées dans ce cadre sont ainsi non seulement très fréquemment condamnées à des peines d’emprisonnement ferme, mais aussi incarcérées sans délai, ce qui empêche l’aménagement de la sanction avant le début de son exécution note. » « Monsieur, vous dormirez ce soir en prison », précise le président du tribunal pour être bien sûr que l’intéressé a compris qu’il a écopé de plusieurs mois de prison ferme.

Les mois de prison avec sursis sont toujours associés à une mise à l’épreuve, jusqu’à cinq ans dans certains cas, toute récidive transformant automatiquement les mois de sursis en prison ferme. S’y ajoutent l’obligation de suivi de soins pour ceux qui présentent une pathologie mentale et un suivi judiciaire pour les autres. Le changement de comportement d’un individu ne peut s’opérer que par la compréhension de ses erreurs et l’intériorisation de nouvelles valeurs. Il est alors évident que condamner à dix mois de prison, dont quatre avec sursis, avec un mandat de dépôt délivré séance tenante, un jeune homme de vingt ans, qui a certes dépouillé un mineur de son téléphone portable, de son iPod et des 20 euros qu’il avait dans la poche, mais qui n’a aucune mention dans son casier judiciaire, paraît totalement inadapté dans la perspective d’une réinsertion.

En effet, la surpopulation est flagrante dans les prisons. Au 1er septembre 2012, il y avait 57 385 places pour 66 126 détenus, soit un taux d’occupation de 115,2 % qui est un encouragement à la récidive. Christiane Taubira, ministre socialiste de la Justice, souhaite ne pas dépasser les 63 000 places de prison d’ici la fin du quinquennat de François Hollande, tandis que la droite prévoyait, pour 2017, 80 000 places. Malgré ce vœu, le nombre de personnes incarcérées n’a fait qu’augmenter avec, en mai 2013, 67 829 détenus selon les chiffres de l’administration pénitentiaire.

Durant l’audience à laquelle nous assistons, le président du tribunal demande toujours au prévenu s’il accepte la comparution immédiate ou s’il préfère reporter son procès afin de mieux pouvoir se défendre. Le choix de la solution la plus rapide est systématique, sans hésitation, tout se passant comme s’il fallait en finir au plus vite avec la violence de la situation présente. Avec les comparutions immédiates, on est dans l’urgence, dans le temps court de la procédure judiciaire. Choisir cette procédure laisse peut-être espérer que cette bonne volonté vaudra une réduction de peine. À moins que ce ne soit pour éviter la détention provisoire et le temps long de l’incertitude. Les placements en détention provisoire sont effectivement moins longs pour les procédures de comparution immédiate : 0,5 mois en moyenne en 2012, contre 5,5 mois pour les affaires entraînant une procédure d’instruction. Au 1er janvier 2012, 11,1 % des prévenus détenus étaient en attente d’une comparution immédiate.

La violence de la répression des délits commis par des jeunes de milieu populaire s’est nettement accrue sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy. La loi du 10 août 2011 a instauré une nouvelle juridiction qui rend les mineurs de seize ans et plus, délinquants et récidivistes, passibles d’être jugés par un tribunal correctionnel pour mineurs (TCM). Celui-ci est composé de trois magistrats professionnels alors que le tribunal pour enfants (TE), qui jugeait auparavant ces récidivistes, était composé d’un juge des enfants et de deux assesseurs simples citoyens note. Cette loi aboutit à l’application des règles des tribunaux correctionnels pour adultes à des mineurs de seize ou dix-sept ans qui, ainsi, peuvent encourir les mêmes peines que les personnes majeures, et en particulier se voir condamnés à des peines planchers pour les récidivistes. Loi rarement mise en œuvre par les magistrats, peu soucieux d’appliquer des sanctions automatiques, sans pouvoir les moduler en fonction de circonstances atténuantes, ou d’ailleurs aggravantes, et surtout remise en cause par la garde des Sceaux Christiane Taubira.

Les blousons dorés

À l’autre bout de l’échelle sociale, la jeunesse dorée est privilégiée. Édouard de Faucigny-Lucinge, de haute naissance, son père étant prince, avait, alors qu’il était âgé de vingt-trois ans, commis avec deux comparses trois agressions à main armée contre des commerçants et avait tenté de désarmer un policier en faction place du Panthéon, devant le domicile de Laurent Fabius, ancien Premier ministre. Cette ultime aventure avait pour objectif de compléter l’armement de la bande avant de procéder à l’enlèvement de Charlotte Gainsbourg. Il s’ensuivit une fusillade entre les jeunes délinquants et les policiers accourus. Personne ne fut blessé.

Bien que, selon la presse, les trois acolytes aient fait bonne impression aux jurés et même au procureur, celui-ci demanda, en octobre 1989, une peine de dix ans de réclusion pour Édouard de Faucigny-Lucinge, peine qui fut ramenée à huit ans. L’avocat des commerçants, lesquels s’étaient portés partie civile, avait d’ailleurs souligné que ces « blousons dorés », comme on les désignait dans les journaux, présentaient des aspects positifs laissant présager une réinsertion sans problème, après ces frasques de jeunesse. Une opinion que l’on n’entend guère durant les séances du tribunal correctionnel siégeant en comparution immédiate. Les ressources personnelles et familiales ne sont pas les mêmes selon les milieux sociaux. Il est plus facile de réinsérer un adolescent appartenant à un milieu aisé qu’un jeune issu d’une famille pauvre déjà en difficulté. Les moyens financiers et le capital social sont des aides précieuses pour faire face à une déviance qui s’amorce.

Les comparutions immédiates avec les peines planchers sont des procédures expéditives chargées de tenir en respect les jeunes en difficulté, alors que les puissants passent le plus souvent à travers les mailles du filet juridique. Depuis peu sont venues s’y joindre des dispositions de plus en plus sévères pour contenir la contestation et la révolte des travailleurs devant les atteintes systématiques au droit du travail. Les « classes laborieuses », comme au XIXe siècle, se retrouvent ainsi au même banc des accusés que les « classes dangereuses »

18/09/2017
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VILLE NUMÉRIQUE : QUELS IMPACTS SUR LA VIE PRIVÉE?

Ville numérique : quels impacts sur la vie privée?

Dans un article publié sur Government Information Quarterly, la sociologue Liesbet van Zoonen propose un instrument de sensibilisation à destination des collectivités territoriales. 

 
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La ville numérique ou la « smart city », fait l’objet de nombreux débats parmi les chercheurs et les spécialistes. Ses promoteurs voient dans le big data une opportunité pour les villes de devenir plus riches, plus propres et plus efficaces ; d’autres considèrent que les villes deviendront des espaces robotisés, ennuyeuses, gérés par les seules data (data driven), et où la créativité n’aura plus aucune place. Le géographe Rob Kitchin, considère que la collection tous azimuts de données urbaines risque de produire des villes « panoptiques », qui risquent de menacer le droit à la vie privée et à la liberté d’expression. Liesbet van Zoonen considère, que si l’on ne prend pas en compte des aspects vie privée, les projets de smart cities, deviendront sujets à controverses, voire disparaitront. Pour la CNIL, le sujet des smart cities fera l’objet d’une attention toute particulière de nos travaux innovation et prospective en 2017...

« PRIVACY FRAMEWORK »

Quelles données ?  Personnelles ou non ? Pour quels objectifs ? C’est à partir de ces questions et en se basant sur l’étude de la ville de Rotterdam, que Liesbet van Zoonen analyse des risques en termes de protection de la vie privée. La sociologue utilise dans son graphique (voir ci-dessous) le terme « impersonal » pour les données qui ne sont pas « à caractère personnel », nous lui préfèrerons le terme « non-personnelles ».

 

privacy_concerns_framework cc-by-nc-nd Liesbeth von zoonen
 
 

On retrouve ainsi quatre quadrants :

  • Quadrant I - Collecte de données personnelles à des fins de services. 

Il s’agit des données traditionnellement collectées par les collectivités (Etat civil, adresse, bureau de vote, profession, etc…), les données liées à la situation économique (chômage, allocations sociales, par exemple), mais aussi des données relatives à la correspondance en ligne (email,..) et aux réseaux. Les finalités sont liées aux études démographiques, à l’urbanisme, aux services municipaux ou sociaux : autant d’usages qui ne comportent pas, selon la sociologue, d’enjeux vie privée pour les habitants, à condition de respecter certaines règles et que le marché reste clair : une donnée pour un service. La relativisation des enjeux vie privée vient du fait que les individus sont actifs et donc conscients que des données les concernant sont utilisées pour rendre un service.

  • Quadrant II - Collecte de données personnelles à des fins de surveillance.

Ce quadrant recouvre les données personnelles collectées par la police, les autorités organisatrices des transports publics, mais aussi des caméras de surveillance, des bases liées à la reconnaissance faciale, etc. Ce quadrant cristallise les contestations par les citoyens et les militants du respect de la vie privée. Liesbet van Zoonen note que le Règlement européen apportera de nouvelles garanties aux citoyens pour faire valoir et protéger leurs droits.

  • Quadrant III - Collecte de données « non –personnelles » à des fins de surveillance.

On retrouve ici les données liées à la surveillance de l’espace urbain, sans a priori de reconnaissance possible des individus : le monitoring du trafic automobile, de gestion des foules, par exemple par des caméras infrarouge ou des capteurs de chaleur. Ces données peuvent cependant permettre de reconnaître une personne, par exemple lorsque l’on utilise un logiciel de reconnaissance faciale sur des vidéos.

  • Quadrant IV - Collecte de données « non-personnelles » à des fins de services.

La dernière catégorie correspond à toutes les données non-personnelles collectées et utilisées pour le bénéfice des citoyens, telles que les données environnementales, de gestion des déchets ou de l’énergie (hors les données de chaque foyer). Ce quadrant ne présente à première vue pas d’inquiétudes quant au respect de la vie privée, mais l’auteur rappelle que là aussi, grâce à l’agrégation et au recoupement de données pourtant anonymisées, il reste parfois possible de reconstituer des données personnelles.

 

COMMENT UTILISER CE CADRE D’ANALYSE ?  

Des exemples d’utilisation de ce cadre d’analyse sont proposés.

 

Poubelles « intelligentes »

 

La gestion intelligente des déchets figure parmi les projets classiques des « smart cities », notamment par le biais de capteurs installés sur les bennes. Un capteur de poids peut par exemple servir à alerter les services de ramassage lorsqu’il devient nécessaire de récolter les ordures ; le système permet alors de réguler au mieux la tournée des camions dans la ville. La donnée collectée ne concerne que la localisation de la benne et la charge de déchets qu’elle supporte. Selon la matrice « Privacy Concerns », il s’agit de données appartenant au quadrant IV, « non-personnelles » utilisées à des fins de service.
 

poubelle privacy framework cc-by-nc-nd Liesbeth von Zoonen

Si l’on ajoute un système de carte individuelle d’ouverture de la benne, la poubelle connectée effectue une translation vers le quadrant II : « données personnelles à des fins de surveillance ». La donnée récoltée permet de savoir qui jette quelle quantité de déchets. Le premier cas ne posait pas de questions directes quant à la protection des données personnelles, contrairement aux deuxième cas.

 

 

Police prédictive

 

Les systèmes prédictifs de la criminalité se sont développés depuis quelques années. Le premier type d’algorithme se base sur les statistiques concernant l’historique des lieux et le type de crimes constatés dans une ville, afin de déterminer les zones dans lesquels la police doit patrouiller en priorité. On a alors à faire à des données « non-personnelles » utilisées à des fins de surveillance (quadrant III).

 

police privacy framework cc-by-nc-nd Liesbeth von Zoonen
 

Si l’algorithme cherche non plus à déterminer le lieu, mais les personnes susceptibles de commettre un délit, par les statistiques et potentiellement les données des réseaux sociaux, les risques liés à la protection de la vie privée se déplacent alors vers le quadrant II : « utilisation de données personnelles à des fins de surveillance ». Dans ce cas, le risque cité par Liesbeth van Zoonen, est alors que tous les habitants d’une ville deviennent suspects. Dans les faits, une enquête menée par ProPublica démontre que ce type d’algorithme tendrait à renforcer des préjugés existant et stigmatise certains segments de la population.

 

UN OUTIL PÉDAGOGIQUE ET DE COMMUNICATION

Pensé pour les collectivités territoriales, ce cadre d’analyse des « privacy concerns » se révèle un outil intéressant pour quiconque souhaite comprendre ou faire comprendre les impacts en termes de protection de la vie privée des projets de la ville numérique ou de smart city, dans des visées pédagogique ou de communication. La logique est ici comparable aux guides PIA (Privacy Impact Assessment) de la CNIL, qui dans une version plus approfondie et dans un formalisme plus complet, apporte les outils aux responsables de traitement dans leur démarche de mise en conformité. L’approche gestion des risques est d’ailleurs au cœur du Règlement européen, et la sensibilisation en amont à l’impact sur la vie privée de nouveaux services reste la meilleure manière de faire entrer dans les esprits la culture de la protection de la vie privées et des libertés.

 

Illustration principale : Flickr cc-by Mark Fischer

 


29/06/2017
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Ce qu'il faut retenir de la sanction imposée par la Cnil à Facebook

Au terme d’une procédure d’enquête de deux ans menée au niveau européen, les sociétés Facebook Inc. et Facebook Ireland viennent d’être condamnées à payer 150 000 euros d’amende à la CNIL en France, en raison de multiples violations de la Loi Informatique & Libertés. Plus que le montant de l'amende, c'est le principe de la sanction qui doit attirer l'attention.       

 
 

Facebook est-il un gentil réseau social où échanger des nouvelles et les photographies de ses enfants ou une gigantesque machine à collecter, traiter, combiner des données à caractère personnel dans un but publicitaire ? Probablement les deux, si l’on en croit la décision de la Commission Nationale Informatique & Libertés (CNIL) du 27 avril 2017, qui vient d’être rendue publique, et qui a condamné les deux sociétés exploitant ce site internet à la plus forte amende actuellement prévue par la loi protégeant les données à caractère personnel en France. Des représentants de la CNIL avaient procédé à des contrôles au sein de la société Facebook France en avril 2015, ainsi qu’à un contrôle en ligne en décembre de la même année. Des constatations avaient été effectuées et avaient été suivies d’un questionnaire auquel Facebook avait répondu, de manière insatisfaisante aux yeux de la CNIL, puisque l’autorité avait adressé une mise en demeure à l’exploitant du réseau social en janvier 2016. Cette mise en demeure n’ayant pas permis d’obtenir les rectifications attendues, la CNIL vient donc de prononcer cette sanction, qui fait écho à celle rendue à l’encontre de Google en janvier 2014, d’un même montant et sur les mêmes bases. Préalablement, dans cette délibération, la CNIL a répondu à l’argument de Facebook consistant à contester à la fois la compétence de la loi française et de l’autorité française.  

Sur le premier point, l’argument paraissait difficilement recevable dès lors que la Loi Informatique & Libertés s’applique en cas de traitement effectué sur le territoire national par un responsable de traitement disposant d’un établissement sur ce même territoire. La jurisprudence Google Spain de la Cour de Justice de l’Union européenne militait pour que cette notion d’établissement soit appréciée de manière large. Facebook France a donc logiquement été considérée comme un "établissement" de Facebook en France, même si cette société n’a officiellement pour fonction que de fournir des services de support marketing. 

Sur le second point, la CNIL a, sans surprise, considéré qu’elle était compétente pour statuer dès lors que, le droit français étant applicable, la Commission a compétence pour prononcer des sanctions à l’encontre des responsables des traitements mis en oeuvre sur le territoire national (articles 45 et 48 de la Loi Informatique & Libertés). 

 

Sur le fond du litige, pour l’essentiel, il est reproché à Facebook d’exploiter massivement les données à caractère personnel de ses membres à des fins publicitaires, souvent à l’insu de ces derniers. En effet, la CNIL a relevé que Facebook procédait à des "combinaisons de données" permettant aux annonceurs de cibler telle catégorie d’internautes (par exemple des hommes de moins de 40 ans politiquement modérés et appréciant le cordon bleu et la blanquette de veau…), sans que les internautes en question n’en soient informés. 

Or la Loi Informatique & Libertés énonce une obligation - essentielle - d’information des personnes dont les données sont collectées et traitées. En l’espèce, la CNIL relève que nulle part sur le site de Facebook il n’est indiqué que les données des membres font l’objet d’un "croisement massif", l’idée même de combinaison n’étant d’ailleurs pas du tout évoquée alors qu’elle est, selon sa décision, "particulièrement intrusive" dans la vie privée des internautes. Selon la CNIL, le consentement des utilisateurs n’est pas "éclairé" et n’est donc pas valablement donné, étant retenu également que les mentions relatives à l’utilisation des données des internautes sont disséminées dans trois documents différents.  

Toujours en ce qui concerne l’obligation d’information, on relèvera également que certaines données "sensibles" au sens de la Loi sont collectées sur Facebook, sans que l’attention des membres du réseau ne soit portée précisément sur leur caractère très intime, telles que la religion ou l’orientation sexuelle. Certes, ces données sont fournies librement par les internautes, mais ces derniers n’ont pas nécessairement conscience de la gravité d’une telle divulgation de données que la Loi traite avec davantage de soin. 

Enfin, un autre point important de la décision concerne le "tracking" des internautes, même une fois qu’ils ont quitté le site Facebook. Le réseau utilise en effet un cookie intitulé "datr", qui permet de suivre les utilisateurs au gré de leurs pérégrinations sur internet. Les données de navigation sont alors transmises à Facebook, ce qui donne lieu généralement à l’affichage de publicités ciblées. Ici encore, la CNIL critique le manque d’information des internautes, Facebook se contentant de faire figurer un bandeau relatif aux cookies dont les termes généraux ne permettent pas de mesurer la porter de l’utilisation de ces fichiers. En outre, Facebook n’offre pas la possibilité de s’opposer à l’inscription du cookie en question sur l’ordinateur des internautes. 

En conclusion, c’est au vu de ces nombreux manquements que Facebook a fait l’objet d’une condamnation qui peut ne pas paraître très lourde au regard de son montant et des revenus générés par le réseau social. À cet égard, comme chacun sait, la nouvelle législation relative à la protection des données à caractère personnel, qui entrera en vigueur en mai 2018, alourdira sensiblement le montant des condamnations éventuelles, qui pourront s’élever, selon l’infraction, de 10 à 20 millions d’euros ou 2 à 4 % du montant du chiffre d’affaires mondial.   Facebook aurait donc tout intérêt à se mettre en conformité avec le nouveau droit européen. Et les internautes devraient, dans l’intervalle, se méfier avant de mettre en ligne des contenus personnels et intimes sur ce site, comme sur internet de manière générale. 

 

  journal du net  Chronique de 


28/05/2017
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H lagrange

Activité 1 : Sensibilisation à partir de l'ouvrage d’Hugues Lagrange : Le déni des cultures

· En 2009, le ministre de l'intérieur, Brice Hortefeux, pose pour la photo en compagnie d'un jeune militant, samedi 5 septembre, lors de l'université d'été de l'UMP, à Seignosse dans les Landes. "Il ne correspond pas du tout au prototype", plaisante M. Hortefeux en référence à l'origine arabe du jeune homme, avant d’ajouter : "Il en faut toujours un. Quand il y en a un ça va. C'est quand il y en a beaucoup qu'il y a des problèmes."

 Questionnement :

1-  A votre avis qu’entend Mr Hortefeux  par « problèmes » ?

                          (Susciter chez les élèves  la notion de délinquance.)

2- Quelle représentation, cette déclaration de Brice Hortefeux met elle en évidence ? 

· 1ère vidéo : lien entre délinquance et minorités ethniques :

Questions :

1)    L’enquête d’Hugues Lagrange confirme-t-elle ou infirme-t-elle la déclaration de B Hortefeux ?

2)    Quel peut-être le danger d’une interprétation simpliste de cette enquête ? (faire resurgir la notion de stigmatisation)

 

 · 2ème vidéo : réaction d’Hugues Lagrange aux critiques usuelles sur la question :

 

Questions :

1)          Quels arguments utilise H Lagrange pour contrecarrer certaines interprétations de son enquête ?

2)          Montrer en quoi la mesure de la délinquance est donc relative au contexte socio-économique.

Une typologie de la délinquance en col blanc à partir de Hagan (1986)

 Délinquant===>

Individu

Employé

Entreprise

Etat

Victime ↓

 

 

 

 

Individu public ou consommateur

Corruption

Surprix

Politique d’entente sur les  prix et/ou la répartition de marchés, pollution, produits défectueux, publicité mensongère

Violation des droits de l’homme

Employé, col blanc ou bleu

Harcèlement sexuel, racial

Embauche syndicale

Travail dangereux, immigration clandestine, faillite frauduleuse

Défaillance de la protection

Entreprise

Sabotage, espionnage

Vol, détournement de fonds

Espionnage industriel, concurrence déloyale, politique d’entente sur  les prix, violation de patente, faillite frauduleuse

 Abus d’un monopole d’Etat, subventions cachées

Etat

Fraude fiscale, fraude à la sécurité sociale

Surestimation des dépenses, abus de biens sociaux

Fausse comptabilité, corruption, travail au noir, faillite frauduleuse

Crime contre d’autres Etats


3) Cette délinquance fait-elle des victimes ?
4) Si oui, les victimes sont-elles individuelles ou collectives ?
5 ) Peut-on parler d'une tolérance sociale à la délinquance des cols-blancs ?
6) Comment l'expliquez-vous ?

Bilan et synthèse : la délinquance, une cause unique ?

 


19/05/2017
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