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Le gouvernement a procédé mercredi 28 septembre au rituel annuel de la présentation de ses grandes orientations pour le projet de loi de finances 2017, c’est-à-dire du budget de l’Etat pour la dernière année du mandat.
Pour vous permettre de vous faire une idée des grandes masses de ce budget, nous l’avons représenté sous la forme de 100 petits carrés : avec un peu plus de 50 milliards d’euros, l’école (ou, plus précisément, l’« enseignement scolaire »), représente presque 13 % du budget.
Ajoutez-y les pensions (soit les retraites et autres pensions d’invalidité), les transferts aux collectivités territoriales (départements, régions, etc.) et la charge de la dette (les intérêts que nous payons sur nos emprunts), et vous arrivez déjà à presque la moitié du budget.
Répartition des 387 milliards de dépenses du budget 2017
Le gouvernement veut utiliser les moyens supplémentaires dégagés cette année pour l’école, avec en ligne de mire la concrétisation de la promesse présidentielle de créer 60 000 postes avant la fin du quinquennat. Une priorité qui se traduit symboliquement par le passage de l’école au premier rang des dépenses du budget, une première depuis l’arrivée de la gauche au pouvoir.
Pour la première fois du quinquennat, l'école est le premier budget
Budget alloué à chaque mission dans les projets de loi de finances 2013 à 2017 (attention, les périmètres des missions peuvent légèrement changer d'une année sur l'autre !).
Son physique de jeune premier et ses déclarations chaleureuses à l’égard des réfugiés syriens ont fait couler beaucoup d’encre dans les médias internationaux. Mais, mardi 22 mars, c’est son budget 2016 qui a fait la « une » des journaux locaux. Elu en octobre 2015, le premier ministre canadien, Justin Trudeau (libéral, centre gauche), a tenu sa promesse de campagne : convertir son pays à la relance économique.
Au programme : une série d’investissements et de mesures fiscales favorables aux classes moyennes et à l’environnement. Leur montant devrait s’élever à 11,6 milliards de dollars canadiens (7,85 milliards d’euros) sur l’année fiscale 2016-2017, qui commence le 1er avril. Une enveloppe qui devrait frôler les 15 milliards de dollars canadiens l’année suivante, et gonfler encore après 2018. « Nous commençons à revitaliser l’économie », a déclaré le ministre des finances, Bill Morneau, devant le Parlement, à Ottawa.
Voilà qui rompt avec l’orthodoxie financière des conservateurs canadiens, au pouvoir entre 2006 et 2015. « En moins d’un an, le changement de cap budgétaire de notre pays est radical », résume Douglas Porter, chef économiste de BMO Capital Markets, à Toronto. « Ce plan de relance tranche avec la tendance observée dans les autres pays industrialisés », ajoute Thomas Julien, spécialiste de l’Amérique du Nord chez Natixis. Un constat partagé par Avery Shenfeld, économiste à la banque CIBC : « Le Canada a choisi l’option rejetée par la zone euro, à savoir privilégier l’outil budgétaire pour soutenir l’activité plutôt que la seule arme monétaire. »
Il est vrai que l’économie canadienne, pénalisée par la baisse des cours du pétrole, a besoin d’un coup de pouce. En 2015, le produit intérieur brut (PIB) a crû de 1,2 %, contre 2,4 % en 2014. Le taux de chômage a grimpé de 6,6 % à 7,3 % de la population active entre janvier 2015 et février 2016. Surtout : les perspectives sont moroses. « Le grand risque est que le ralentissement du secteur des hydrocarbures, qui pèse 9 % du PIB, ne contamine le reste de l’économie », estime M. Julien.
Pour l’éviter, le gouvernement a une stratégie claire, d’inspiration keynésienne : augmenter les dépenses publiques pour muscler la croissance future. Pour y parvenir, il compte d’abord « renforcer les classes moyennes ».« Une économie vigoureuse et plus inclusive prend appui sur une classe moyenne forte », peut-on lire dans le document budgétaire.
Les différentes aides financières aux familles seront simplifiées et fondues en une nouvelle allocation aux enfants, dont le montant devrait gonfler jusqu’à 23 000 dollars canadiens par an pour certains foyers. Les contribuables les moins aisés bénéficieront aussi d’une baisse d’impôts de 1,3 milliard de dollars canadiens par an. « Il s’agit d’un virage d’une politique d’offre vers une politique de demande », juge Alexandra Estiot, chez BNP Paribas.
Modeste déficit public
Cette relance passe également par l’investissement dans les infrastructures et l’innovation, juge le gouvernement. Il prévoit ainsi d’injecter 12 milliards de dollars canadiens ces cinq prochaines années dans les grands ouvrages de BTP, les équipements de traitement des eaux usées et la rénovation des écoles. Aussi, 2,9 milliards sur cinq ans seront investis dans la lutte contre le changement climatique. En revanche, M. Trudeau renonce au renouvellement de la flotte des avions de combat et des navires de guerre, évoqué par son prédécesseur.
Le second grand axe du budget est l’aide aux communautés autochtones : 8,4 milliards de dollars canadiens sur cinq ans seront investis dans le logement et l’éducation, entre autres.
Au total, les dépenses publiques devraient gonfler de 7,6 % sur l’année fiscale 2016-2017, tandis que les recettes devraient fondre de 1,2 %. Résultat : le déficit public devrait atteindre 29,4 milliards de dollars canadiens à la fin de la période. « C’est trois fois plus que ce que le premier ministre avait annoncé pendant sa campagne », souligne M. Porter. De fait, le camp des conservateurs s’inquiète du « laisser-aller budgétaire » du médiatique Trudeau.
Selon les économistes, le pays a néanmoins de la marge : le déficit public, qui s’est établi à 0,3 % du PIB seulement sur l’année fiscale 2015-2016, devrait se creuser à 1,5 % sur 2016-2017. Cela reste peu, par exemple, au regard du déficit américain, à 2,5 % du PIB. La dette publique fédérale, elle, devrait passer de 31,2 % à 32,5 % du PIB. Un montant qui dépasse néanmoins les 80 % du PIB si l’on ajoute l’endettement des provinces.
Qu’importe : Ottawa estime qu’en favorisant la croissance ces nouvelles dépenses feront augmenter à terme les recettes fiscales. Selon les calculs de Natixis, le plan de relance devrait gonfler l’activité de 0,3 point de PIB en 2016, puis de 0,9 point en 2017. La croissance canadienne devrait donc frôler les 1,5 % cette année, pour atteindre 2,2 % en 2017.
En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/economie/article/2016/03/24/le-canada-se-convertit-a-la-relance-budgetaire_4889319_3234.html#33oUB9wsGKHMpHVJ.99
La situation semble défier le bon sens : l’Etat français emprunte depuis fin août 2014 à des taux négatifs – en tout cas, lorsqu’il s’agit d’emprunts pour une durée inférieure ou égale à quatre ans. Cela signifie que les investisseurs perdent de l’argent en prêtant à la France, pour qui, au contraire, emprunter sur ces échéances devient rémunérateur.
L’Agence France Trésor n’est pas la seule dans ce cas : ses homologues en Allemagne, en Suisse ou au Japon sont dans la même situation. Au niveau mondial, selon un calcul de Bloomberg, fin février, c’est plus d’un quart du montant total des emprunts d’Etat qui affiche désormais un rendement négatif, soit l’équivalent d’environ 6 000 milliards d’euros.
L’ère des taux négatifs prévaut aussi du côté des banques centrales. Certaines d’entre elles acceptent de payer pour prêter de l’argent aux banques. Ces derniers mois, la Banque nationale de Suisse et la Banque de Suède (Riksbank) ont adopté un taux de refinancement négatif : en Suède, une banque qui emprunte 100 à la Riksbank ne remboursera, à terme, que 99,90.
Inversement, ces institutions monétaires ont aussi adopté un taux de dépôt négatif, à l’image de la Banque centrale européenne (BCE) et de la Banque du Japon : cela signifie que les banques doivent payer pour placer des liquidités à court terme dans les coffres des banques centrales. Jeudi 10 mars, la BCE a de nouveau abaissé son taux de dépôt de - 0,3 % à - 0,4 %.
Dans ce contexte inédit, économistes et banquiers multiplient les tribunes, chercheurs et think tank y consacrent des études. L’agence de presse américaine Bloomberg a même publié une explication en bande dessinée. Retour en cinq questions sur ce phénomène.
Pourquoi en est-on arrivé là ?
Dans le cas des obligations d’Etat, les investisseurs cherchent avant tout la sécurité : ils sont donc prêts à payer pour placer leur argent en prêtant à un pays considéré comme « sûr ». Une sécurité que les emprunts émis par les grands pays sont a priori de nature à leur apporter.
Dans la zone euro, l’action de la BCE inscrit les marchés dans un contexte de taux très bas, voire parfois négatifs. Une politique monétaire qui tient au fait que la banque centrale n’a plus beaucoup de marge de manœuvre pour relancer l’économie. Des taux très faibles, voire négatifs, permettent d’exercer une pression à la baisse sur le taux de change et d’inciter les acteurs économiques à faire circuler l’argent dans l’économie réelle plutôt que de le laisser dormir dans un coffre, où il ne rapporte rien.
Est-ce vraiment nouveau ?
Oui et non. Les taux d’intérêt des obligations d’Etat françaises ont connu des passages en territoire négatif lors d’une conjonction de faible taux et de forte inflation, produisant des taux d’intérêt « réels » négatifs : lorsque le taux d’inflation dépassait le taux d’intérêt nominal, le rendement du prêt consenti devenait négatif pour le prêteur.
Ces épisodes de rendement réel négatif ont été assez courts. Ce qui est nouveau, c’est que la France « offre » désormais sur le marché des titres à rendement négatif : l’Agence France Trésor vend, depuis deux ans, des obligations d’Etat qui coûtent plus qu’elles ne rapportent à leurs souscripteurs – le déposant confie son argent à l’Etat en rémunérant ce dernier.
Qui emprunte à taux négatif ?
Les Etats et les banques commerciales, mais pas les particuliers : le code civil l’interdit, comme il défend à une banque de prêter à perte (articles 1892 et 1902). Si les banques centrales peuvent prêter de l’argent avec des intérêts négatifs aux banques commerciales, ces dernières ne peuvent pas en faire de même avec leurs clients : tout contrat de prêt stipule que le remboursement intégral est une obligation pour l’emprunteur.
Ainsi, il est impossible d’appliquer un taux négatif aux dépôts des particuliers dans les banques, comme le confirme la BCE : « Il n’y aura aucune incidence directe sur votre épargne. Seules les banques qui déposent des fonds sur certains comptes à la BCE devront payer pour ce faire. »
En réalité, les particuliers souscrivent à ces taux négatifs indirectement puisqu’une large partie de leurs portefeuilles d’assurance-vie (environ 20 %) est investie dans des titres d’Etat français.
Qui accepte de payer pour prêter et pourquoi ?
En ce qui concerne les emprunts d’Etat, ce sont les grandes banques, les compagnies d’assurance, les fonds de pension… Dans une situation d’excès de liquidités, la question est davantage de ne pas trop perdre d’argent que d’en gagner.
La dette française ou européenne reste un actif sans risque (gestion saine des finances publiques, risque de défaut faible), dont la détention est fortement recommandée par la réglementation actuelle.
« Ces grands investisseurs font aussi le pari que la valeur de l’obligation puisse remonter : ils pourraient alors les revendre à la BCE en faisant une plus-value, explique Victor Lequillerier, du think tank BSI Economics.Mais c’est un pari risqué : si les taux remontent et que le cours de l’obligation diminue significativement, ce pari est perdu. »
Les non-résidents majoritaires dans la détention des titres de dette français
Détention des OAT par type de porteurs au 3e trimestre 2014
Les non-résidents en Europe ont aussi un intérêt à « investir » dans les obligations à taux négatifs : outre la diversification de leurs portefeuilles, acheter de tels produits (libellés en euros) permet de compenser les effets de variations de monnaies des autres actifs. En 1993, seul un tiers de la dette publique française était détenu par des non-résidents ; la proportion était de 63 % à la fin de l’année dernière.
Quels sont les effets et conséquences des taux négatifs ?
Quand la Banque nationale de Suisse a commencé à imposer des taux négatifs dans les années 1970, il s’agissait de lutter contre l’appréciation du franc suisse à cause de l’entrée de capitaux étrangers, qui a été dissuadée par cette politique de « taxation » de l’épargne – une politique qui dure encore aujourd’hui.
En 2009, la banque centrale suédoise a procédé de même, mais cette fois pour encourager les banques commerciales à prêter aux entreprises et aux particuliers.
En pratiquant le taux de « dépôt » négatif, la BCE cherche à inciter les banques à prêter aux ménages et entreprises, mais aussi à faire baisser le cours de la devise par différents mécanismes.
Mais, de l’avis des économistes de Natixis, relancer la croissance et ranimer la circulation de liquidités dans l’économie réelle est un objectif difficile à atteindre :
« Dans la zone euro, le crédit bancaire n’a pas réagi, l’offre de crédit n’étant pas limitée auparavant ; les entreprises n’ont pas réduit leurs dépôts, les banques éprouvant des difficultés pour passer les taux d’intérêt négatifs aux taux des dépôts ; l’euro ne s’est déprécié que transitoirement […]. Le bilan global des taux directeurs négatifs dans le cas de la zone euro est donc très faible. »
Un matin, bientôt, vous vérifiez vos comptes et constatez un crédit de 240 euros sur votre compte courant. Intitulé du transfert : «Bonnes vacances, de la part de Mario». Vous cherchez une explication sur Google. C’est magique : tous les citoyens de la zone euro ont reçu 240 euros crédités par la Banque centrale européenne (BCE). Le lendemain, la Réserve fédérale américaine fait de même : 250 dollars sur le compte de chaque résident américain, intitulé «Enjoy ! Janet». Bientôt, au Japon et au Royaume-Uni, les ménages reçoivent tous une somme équivalente. Les banques centrales insistent : «Profitez-en, c’est une fois pour toutes !»
La question du jour sur les réseaux sociaux : «Qu’allez-vous faire avec 240 euros ?» Votre ami Robin va acheter des livres, Julien des pulls, Karine et Richard un bourgogne millésimé sans sulfites, Mathieu, faire réparer sa moto, Céline et Chrystel vont le dépenser au musée. Vous êtes tous assaillis par des messages d’ONG vous demandant de verser une partie en dons pour la recherche sur le cancer, la protection de l’environnement, etc. Vous hésitez. Au bureau, bien sûr, tout le monde ne parle que de ça. Le patron, Jean-Eudes, a reçu le même montant que le monsieur du ménage. Ce dernier sait qu’il va payer le crédit de sa voiture et acheter des vêtements aux enfants. Jean-Eudes tergiverse. Ces 240 euros ne manquaient pas vraiment à son budget. Pendant quelques jours, Facebook regorge d’histoires émouvantes : l’opération du cœur d’une petite fille financée par les dons de sa communauté. Malheureusement, il y a aussi le cas de ce jeune homme du Tennessee, qui s’est acheté sa première arme et a tué sa petite amie avec. Cela fait débat en France. Vous entendez sur France Inter un économiste déplorer que l’argent soit dépensé par des individus privés, non par un gouvernement qui alloue les dépenses en fonction des priorités politiques. «Tant mieux, tous pourris !» vocifère l’extrême droite.
Vous trouvez quand même bizarre que Jean-Eudes ait reçu la même chose que le monsieur du ménage. L’économiste à la radio ajoute que c’est une sorte d’impôt négatif, sans souci de redistribution. C’est donc ça… on est en pleine campagne présidentielle. Le FN inclut une nouvelle ligne à son programme économique : le maintien de la France dans la zone euro, conditionné à un mécanisme permanent de versement aux ménages français par la BCE. Malin : un refus suggérerait à certains que la Banque centrale favorise les banques aux ménages. Le gouverneur Mario Draghi s’étouffe dans son café. Aux Etats-Unis, le nouveau président, Donald Trump, se frotte les mains ; après avoir baissé les impôts sur le revenu dans les premiers mois de son mandat, il justifie l’arrêt des programmes fédéraux de sécurité sociale. Il prétend avoir obtenu l’accord de la Réserve fédérale de verser des subventions monétaires en compensation. En réalité, la gouverneure Janet Yellen n’a rien accepté. Mais à présent, elle n’a plus le choix…
Vous ne rêvez pas. Une somme douillette pourrait arriver bientôt sur vote compte. Ce sera la troisième phase d’une politique monétaire extraordinaire qui a commencé en 2008 suite au krach américain. Le principe est débattu en Europe actuellement (1). C’est ainsi car les deux premières phases n’ont pas suffi à relancer l’économie : bien que les taux d’intérêt soient négatifs, l’investissement ne repart pas ; d’autre part, les milliards distribués par les banques centrales restent dans les réserves des banques privées. Toujours pas de crédit. Une part importante des ménages reste très endettée, au chômage, donc ne consomme plus. L’idée de remplir les comptes des ménages s’inspire de Milton Friedman, qui avait imaginé que la Banque centrale pourrait distribuer de la monnaie, par hélicoptère, pour donner un petit coup de pouce au budget ; aujourd’hui, l’hélicoptère est remplacé par un câble Ethernet. C’est une forme de relance budgétaire. Une baisse d’impôt déguisée. Politique d’austérité oblige en Europe, majorité républicaine au Congrès aux Etats-Unis, les gouvernements sont hypercontraints dans leurs dépenses. Les banques centrales ont pris le relais depuis 2008. Banque centrale où personne n’a été élu. C’est un pur transfert de pouvoir. Périlleux. S’ils perdent le contrôle du budget, que reste-t-il aux Etats démocratiques ? Et donc à nous, les citoyens ? Jean-Eudes s’en fiche, lui. Finalement, il va s’acheter des actions…
(1) Voir le n°355 d’Alternatives économiques, mars 2016. Les 240 euros sont mon hypothèse. Ils correspondent aux 60 milliards de liquidités distribués chaque mois par la BCE, divisés par la population de la zone euro âgée de plus de 24 ans.
Cette chronique est assurée en alternance par Anne-Laure Delatte, Ioana Marinescu, Bruno Amable et Pierre-Yves Geoffard.
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