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dossier 12. Quelles politiques pour l'emploi ?


12.1. Les politiques de l'emploi

carte mentale

 

exercice orléan tours

 

 


Q1. Le chômage est-il lié au progrès technique ? 

Q2. Qu'est ce que le chômage structurel ? 

Q3. Quelles sont les remèdes proposées au chômage ?

Q4. Qu'est ce que le chômage conjoncturel ? 

Q5. Quels sont les remèdes au chômage conjoncturel ? 

Q6. Quelle est la théorie dominante aujourd'hui concernant le chômage ? Quelles sont les solutions proposées par cette théorie ? 

A. Les politiques de soutien à la demande pour lutter contre le chômage keynésien.

  Keynes a construit une théorie qui vise à réfuter la loi de Say selon laquelle l'offre devrait créer sa propre demande. En effet selon lui, les classiques et les néo-classiques ne peuvent expliquer les crises de surproduction et notamment la crise des années 30 qui a vu gonfler le taux de chômage dans des proportions impressionnantes. Selon lui, le travail n'est pas une marchandise et il ne faut pas l'envisager uniquement sous l'angle du marché, le salaire n’est pas un prix comme un autre. L’offre de travail se cale sur le salaire nominal et non pas sur le salaire réel. Or Le niveau des salaires nominaux est rigide à la baisse. Il dépend des institutions, des négociations et des rapports de force entre employeurs et salariés. L’emploi n’est donc pas déterminé par la rencontre de l’offre et de la demande mais par la demande effective qui commande le niveau de production et d’emploi.  Le niveau de l'emploi dépend de la demande de biens, qui peut se situer à un niveau ne permettant pas d’employer toutes les personnes qui souhaitent travailler. Le marché du travail ne sert qu'à fixer le niveau du salaire. L’idée néoclassique selon laquelle la baisse des salaires permet de réduire le chômage lui semble négliger l’équilibre général de l’économie : le salaire est aussi la base de la demande. 

 

  • La demande de travail dépend du salaire réel
  • L’offre de travail est victime de l’illusion monétaire et dépend du salaire nominal.
  • Le niveau des salaires nominaux est donc rigide à la baisse.
  • L'emploi est déterminé par la demande effective ( anticipée)
  • Le chômage est involontaire tant que l’économie n’est pas au plein emploi. 

  

  Pour Keynes, le pessimisme des entrepreneurs peut les conduire à sous-estimer la demande, d’où un équilibre de sous-emploi. Alors que, pour les classiques, le niveau de l’emploi se détermine sur le marché du travail par la confrontation entre l’offre et la demande de travail, chez Keynes, le niveau de l’emploi est fixé unilatéralement par les chefs d’entreprise en fonction du niveau de demande effective (consommation et investissements anticipés). Il se détermine donc sur le marché des biens et des services. Il y a équilibre entre l’offre et la demande globale, mais le niveau de production qui en découle n’est pas suffisant pour absorber la main-d’oeuvre disponible, prête à travailler pour un salaire égal à sa productivité. C'est une situation de chômage keynésien.

  

L’Etat peut alors soutenir la demande effective par des politiques budgétaires. Celles-ci peuvent prendre la forme de politique de revenus (vers les salariés du secteur public), de redistribution (augmentation des prestations sociales), de politiques de grands travaux (investissements publics) ou de politiques fiscales (baisse des impôts). Par une augmentation des dépenses publiques, l’Etat fait jouer le multiplicateur, la relance de la croissance permet d’augmenter l’emploi et engendre des recettes qui permettent de rembourser les dettes.  Selon Keynes, la politique monétaire est un outil complémentaire, la baisse des taux d’intérêts rend le crédit plus accessible et relance la consommation et l’investissement. 

 

 

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B. Les politiques d’allègement du coût du travail et de flexibilité pour lutter contre le chômage classique.

Les analyses libérales et néo-classiques définissent un chômage classique à partir de l'analyse du marché du travail. Pour les néoclassiques, le chômage vient d’abord de ce que le salaire réel en vigueur est supérieur au salaire d’équilibre. Résoudre le problème du chômage passe par la réduction de tous les coûts du travail ainsi que par la déréglementation des salaires et des contrats.

 

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Le coût du travail provient des salaires, des cotisations sociales, des coûts d’embauche et de licenciement ainsi que des coûts de formation. Les entreprises multinationales comparent le coût du travail entre les pays. Par ce biais, les réglementations salariales et les systèmes de protection sociale sont mis en concurrence. Pour le patronat comme pour les économistes classiques, néo-classiques et nouveaux classiques, il n'y a pas de problème de débouché, car selon la loi de Say, toute offre crée sa propre demande. En revanche, le coût du travail trop élevé augmente les coûts par la dégradation de la compétitivité-prix et les entreprises perdent des marchés, elles n'embauchent pas et cela d'autant que les réglementations sur les contrats de travail empêchent de licencier facilement. Il faut donc réduire les salaires ou les charges sociales pesant sur le travail, quitte à subventionner les emplois peu qualifiés pour donner aux salariés un revenu décent. La demande de travail des peu qualifiés va augmenter puisque les entreprises estiment que le coût du travail des salariés non qualifiés est trop élevé au regard de leur productivité. D’autre part, la réduction du coût du travail peu qualifié améliore la rentabilité globale des entreprises bénéficiant des allègements de charges. Leur compétitivité s’améliore, elles gagnent des parts de marché et recrutent donc à la fois des travailleurs non qualifiés et qualifiés.

 

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De telles politiques ont été menées en France dès 1982 avec la désindexation des salaires de l'inflation puis à partir de 1993 avec les politiques d'allègements de cotisation sociales pour les travailleurs proches du SMIC. En Allemagne, la politique salariale menée depuis les années 2000 a consisté dans une baisse des charges. Selon les données du Bureau of Labor Statistics du ministère du Travail américain, les coûts unitaires dans l'industrie (en monnaies nationales) ont baissé au total de 0,3 % en Allemagne entre 2000 et 2011, alors qu'ils progressaient de 7,8 % en France. Mais l'augmentation a été plus forte dans la plupart des autres pays européens. Gauthié alter eco 

 

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On peut émettre de sérieuses réserves sur la théorie d'un coût du travail trop élevé. Tout d'abord, les écarts de salaire entre les pays doivent être relativisés par "le coût unitaire de main-d'oeuvre", c'est-à-dire ce que coûte en main-d'oeuvre chaque unité produite. Ce coût unitaire se calcule simplement en divisant le salaire par la productivité du travail.  Les écarts de salaire entre pays s'atténuent alors. De plus, mettre l’accent sur le coût du travail paraît peu stratégique quand la mondialisation implique pour les pays développés, une montée en gamme et une recherche de compétitivité structurelle. 

 

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Par ailleurs, on n'a pas observé de corrélation entre taux de chômage et coût du travail. 

 

Exercice évolution des salaires 

 Evolution des salaires a,aalyse Natixis commentée

 

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Selon les libéraux, la flexibilité du travail est une condition du bon fonctionnement du marché du travail. Les institutions qui encadrent le marché du travail ( syndicats, conventions collectives, protection contre le licenciement etc.) doivent être modifiées de façon à mettre en place un mode de gestion de la main d'oeuvre qui permet d'adapter rapidement la production, et l'emploi correspondant, aux fluctuations de la demande. Les politiques de flexibilisation du travail ont été promue par le FMI avant la crise de 2008. Il faut distinguer la flexibilité quantitative, la flexibilité qualitative et la flexibilité salariale :

       La flexibilité  quantitative repose sur la possibilité pour l'entreprise de faire varier le nombre d'heures  de travail dont  elle a besoin, soit en interne en annualisant le temps de travail ou en externe en embauchant et débauchant des contrats plus souples.

       La flexibilité qualitative repose sur la possibilité de recourir à la sous-traitance (flexibilité qualitative externe) ou bien de développer la polyvalence de salariés bien intégrés et formés. Cette forme de flexibilité qualifiée de flexibilité fonctionnelle se développe particulièrement dans les nouvelles formes d'organisation du travail (toyotisme).

      Enfin, la flexibilité salariale repose sur la recherche de dérogations à la législation en matière de salaires et du Smic afin d'adapter le salaire à la situation financière de l'entreprise et/ou à la productivité du salarié.

 

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Les politiques destinées à lutter contre le chômage classique ont été menées dans de nombreux pays alors que l'on n'a pas établi de corrélation entre degré de flexibilté du marché du travail et chômage.

 

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La flexibilité a en revanche de nombreuses limites :

     La flexibilité salariale peut déprimer la croissance de la demande et déboucher sur de profondes inégalités, elle contribue alors à produire un chômage keynésien.

     La flexibilité horaire ou quantitative interne rend plus flou les emplois du temps des collectifs de travail et des familles,ce qui  complique l’engagement associatif et affecte les pratiques de sociabilité.

     La flexibilité quantitative externe favorise la segmentation ou le dualisme du marché du travail. Dans l'entreprise, elle individualise les relations de travail par la diversification des contrats et place parfois les membres d’un collectif de travail dans des situations si différentes qu’il leur est difficile d’éprouver une identité et des intérêts communs, et a fortiori de s’engager dans une action collective. De plus elle empêche l'intégration des salariés dans l'entreprise ce qui peut engendrer des comportements de retrait, de repli sur soi, et n’incite pas à la formation ce qui contribue à former un chômage structurel.  

 

Toutefois, la précarité n’est pas nécessairement la contrepartie de la flexibilité du marché du travail. Le modèle dit de « flexicurité » ou « flexsécurité », inspiré de l’expérience danoise, combine une faible protection de l’emploi, une indemnisation généreuse du chômage et des politiques actives de l’emploi axées sur la formation des demandeurs d’emploi. Ce modèle permet une réallocation très dynamique des emplois et un fort sentiment de sécurité professionnelle des salariés exprimé dans les enquêtes d’opinions.

 

C. Les politiques de lutte contre le chômage structurel 

Le chômage structurel est lié à des changements de structures économiques dans un pays, provoquant une inadéquation qualitative entre l’offre et la demande de travail. L'évolution des qualifications dues aux évolutions techniques conduit à rendre inemployable une partie de la population active qui ne trouve plus d'emplois correspondant à ses qualifications.

 

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Selon, Schumpeter, l’introduction des innovations engendre des phénomènes de destructions et de créations d’emplois, et de secteurs d’activité. Ainsi l’introduction d’innovations majeures comme le numérique pour les appareils photo a entraîné tout un ensemble de mutations de l’activité : fermeture de magasins de photographes, moindre production de pellicules photo, mais aussi création de nouvelles activités : développement en ligne des photos, création de nouveaux appareils photo, d’imprimantes. Tout cela a donc créé du chômage dans le secteur de l’argentique mais a contribué à de nouvelles activités dans le secteur du numérique. 

 

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La thèse du déversement établit que l'emploi diminue dans un secteur d'activité quand la productivité augmente plus rapidement que la demande pour les produits de ce secteur, et réciproquement l'emploi augmente quand la productivité augmente moins vie que la demande. C’est de cette façon que l’emploi a diminué au cours du 20ème siècle dans le secteur primaire, puis à partir de 1970 dans l’industrie, les faibles gains de productivité dans les services ainsi que l’augmentation de la consommation de service expliquent que les emplois se déversent désormais dans le tertiaire.

 

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Ce déversement a des conséquences importantes sur le chômage structurel dans la mesure où il détruit des qualifications en même temps qu’il détruit les emplois et requiert des politiques de formation. Ce sont les catégories les moins qualifiées qui vont alors souffrir d'un fort taux de chômage. Une politique de l'emploi doit donc mettre l'accent sur la formation afin de requalifier les travailleurs qui voient leurs compétences se dégrader avec le progrès technique. Par ailleurs l'éloignement de l'emploi dégrade le capital humain, la subvention de certains emplois par l'Etat ( emplois aidés : contrats jeunes, contrats de qualification  ) empêche cette obsolescence des qualifications en permettant aux individus de continuer et d'approfondir leurs expériences professionnelles.

 

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On distingue les politiques actives et les politiques passives de l’emploi. Les politiques actives mettent en place des dispositifs qui ont pour but d’enrichir la croissance en emplois. Cela peut prendre la forme d’incitation à l’embauche par des exonérations de charge ou bien d’emplois aidés et favoriser la formation professionnelle. Les politiques passives ont pour objectif de rendre le chômage supportable ou bien de réduire la population active (indemnisation des chômeurs, pré-retraite etc.). Le chômage structurel rend nécessaire une politique active de formation afin de requalifier les travailleurs qui voient leurs compétences se dégrader avec le progrès technique. Les subventions de certains emplois par l'Etat (emplois aidés : contrats jeunes, contrats de qualification) peuvent empêcher ou retarder l’obsolescence des qualifications en permettant aux individus de continuer et d'approfondir leurs expériences professionnelles.

 

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Q1.  Comment Keynes rejette t-il la théorie néo-classique du marché du travail ?

Q2. Quels sont les déterminants de l’emploi selon Keynes ?

Q3. Faîtes le schéma de l’impact d’une hausse des coûts du travail sur la compétitivité-prix :  salaires, cotisations, coûts de formation, compétitivité-prix, réglementation des contrats de travail, emploi

Q4. Faîtes une carte mentale sur types, portée, limites des politiques de flexibilité

Q5. Qu’est ce que le modèle de flexicurité ?

Q6. Définir chômage structurel, chômage conjoncturel, politique active de l’emploi

Q7. Quels sont les effets du progrès technique sur l’emploi (quantité et qualité) ?

Q8. Pourquoi la formation doit-elle être un axe majeur des politiques de l'emploi ? 

 

 

 

 


19/05/2016
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12.2. Les politiques de l'emploi n'arrivent pas à enrayer le chômage

 

 

Notions :

Flexibilité du marché du travail, taux de chômage, taux d’emploi, qualification, demande anticipée,, salariat, précarité, pauvreté.

Première :

Chômage, productivité, demande globale, politique monétaire, politique budgétaire, rationnement.

A. Prendre la mesure de l'évolution de l'emploi et du chômage  

Le chômage représente la part des actifs qui n'ont pas d'emploi, on le mesure en rapportant le nombre de chômeurs à la population active. Le nombre de chômeurs peut être mesuré par l'insee , il s'agit du nombre de chômeurs au sens du Bureau International du Travail ( BIT), ou bien par le nombre d'inscrits à Pole Emploi.

 

 

En 2016, selon l’enquête Emploi, 2,8 millions de personnes sont au chômage au sens du Bureau international du travail (BIT) en France métropolitaine. Le taux de chômage s’est établi à 9,9 % de la population active de 15 ans ou plus en France métropolitaine. Par ailleurs, 1,4 million de personnes recherchent un emploi mais ne sont pas disponibles, ou souhaitent travailler mais ne recherchent pas d’emploi, qu’elles soient disponibles ou non. Elles ne sont pas comptabilisées comme chômeurs et forment ce qu’on appelle le « halo » autour du chômage. Il concerne davantage les 15-24 ans que les autres catégories d’âge.

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Insee


42,7% des chômeurs sont au chômage depuis plus de 2 ans. Le taux de chômage de longue durée est beaucoup plus élevée pour les séniors (50 ans ou plus) que pour les autres tranches d’âge. 

 

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Le chômage concerne plus particulièrement les jeunes, les femmes, les populations immigrées et plus généralement les personnes dont la qualification est relativement plus faible. 

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exercice EC2 chômage 
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Le taux d’emploi rapporte la population active occupée sur la population en âge de travailler. En France, en 2014 selon l'ODE, 63,6% des personnes en âge de travailler ont un emploi

 On constate globalement une hausse continue de l’emploi sur longue période. 

 

 

La croissance de l'emploi s'est accompagnée d'une tertiarisation et d'une hausse des qualifications. 

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Une partie importante des personnes en emploi sont en sous emploi et une autre non négligeable se trouve dans des emplois aidés

 

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La flexibilité du travail a augmenté: CDD, intérirn, stages rémunérés, emplois aidés, temps partiels.

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Selon l’Insee, en 2014, 42,7% des chômeurs étaient au chômage depuis plus de 2 ans. Le taux de chômage de longue durée est beaucoup plus élevé pour les séniors (50 ans ou plus) que pour les autres tranches d’âge. Le chômage concerne plus particulièrement les jeunes, les femmes, les populations immigrées et plus généralement les personnes dont la qualification est relativement plus faible. 

            Le taux d’emploi rapporte la population active occupée sur la population en âge de travailler. En France, en 2015 selon l'Insee, 50.5%% des personnes en âge de travailler ont un emploi. On constate globalement une hausse continue de l’emploi sur longue période.

 

 

B.  Les politiques de l’emploi actives ont eu des effets ambigus sur l’intégration par le travail

 

  Parmi les politiques de l’emploi, on distingue les politiques passives qui visent à rendre le chômage supportable et à réduire la population active des politiques actives qui elles ont pour but d’obtenir une croissance plus riche en emplois. Parmi ces dernières, certaines ont des effets pervers :

 

En effet du côté des politiques actives, les politiques de flexibilité du marché du travail ont accru la précarité en multipliant les CDD, intérirn, stages rémunérés, emplois aidés, temps partiels. Ainsi les réformes Hartz en Allemagne, associées à l’institutionnalisation de « Mini-jobs » très faiblement rémunérés et largement exonérés de cotisations sociales et d’impôts, ont contribué à une élévation du taux d’emploi et une baisse du taux de chômage, mais aussi ont exercé une pression à la baisse sur les salaires et contribué à une augmentation du nombre de travailleurs pauvres et à la détérioration des conditions d’emploi de certains salariés.

 

Le lien entre travail et intégration sociale s’en trouve fragilisé pour plusieurs raisons :

      La flexibilité tout d’abord détache les travailleurs des organisations qui les emploient : les carrières professionnelles sont de plus en plus mobiles, ce qui peut engendrer des comportements de retrait, de repli sur soi, et n’incite pas à l’accumulation de compétences spécifiques à un poste de travail dont la pérennité est devenue moins prévisible. Les évolutions de l’emploi liées à une flexibilité accrue précarisent les trajectoires professionnelles qui alternent de plus en plus les périodes d’emploi et les épisodes de chômage.

        Elle individualise ensuite les relations de travail : la diversification des contrats place parfois les membres d’un collectif de travail dans des situations si différentes qu’il leur est difficile d’éprouver une identité et des intérêts communs, et a fortiori de s’engager dans une action collective ; ce rapport au travail différencié recoupe parfois des clivages générationnels ; S. Beaud et M. Pialoux ont observé ainsi une certaine incompréhension entre les « vieux OS » et les « jeunes intérimaires »dans l’usine Peugeot de Montbéliard.

La flexibilité horaire diffracte quant à elle les emplois du temps des collectifs de travail et des familles, complique l’engagement associatif et affecte les pratiques de sociabilité.

Pour finir, la flexibilité de l’emploi met en concurrence les travailleurs, par exemple lorsque les contrats temporaires sont utilisés par les employeurs comme une phase d’observation et de sélection préalable à l’embauche durable.

 

 

Toutefois, la précarité n’est pas nécessairement la contrepartie de la flexibilité du marché du travail. Le modèle dit de « flexicurité » ou « flexisécurité », inspiré de l’expérience danoise, en combinant une faible protection de l’emploi, une indemnisation généreuse du chômage, et une politique de formation des demandeurs d’emploi peut concilier une réallocation très dynamique des emplois et un fort sentiment de sécurité professionnelle des salariés exprimé dans les enquêtes d’opinions.

 

Ce modèle qui a marché dans un petit pays, très ouvert sur l’extérieur, et où il existe un fort taux de syndicalisation( 80%) n’est pas facilement transposable en France. Il faudrait alors que les transitions au cours de la vie professionnelle, les changements d’emploi et les périodes de recherche ne soient pas vécues comme des ruptures et puissent même constituer des étapes positives dans les carrières individuelles. Pour cela il faudrait mettre en place des dispositifs conséquents d’indemnisation, d’accompagnement, de formation, de transfert des droits sociaux acquis dans les emplois successivement occupés.  

Dans la loi El Khomri a été mis en place un compte personnel d’activité qui a pour objectif de sécuriser les parcours professionnels en permettant aux demandeurs d'emploi et aux salariés du secteur privé en CDI et en CDD de conserver leurs droits à la formation tout en changeant d’emploi. C’est un pas vers une flexisécurité à la française.

 

Les allègements de cotisations sociales et autres dispositifs en faveur des moins qualifiés jouent favorablement sur leur taux d’emploi mais n’encouragent pas la qualification et le progrès technique.

 

C. L’accroissement des politiques passives s’est accompagné d’un contrôle accru des chômeurs

 

La question de la fragilisation du lien entre travail et intégration sociale se pose également à propos de l’accroissement des dépenses passives qui est une tendance forte des évolutions des politiques de l’emploi.  

C’est ainsi qu’en France, les dispositifs de préretraites développés dans les années 1970 et 1980, ou encore les dispositifs d’incitation au retrait du marché du travail comme l’allocation parentale d’éducation ont engendré des flux de sortie du marché du travail qui ont réduit simultanément le taux de chômage et le taux d’emploi.

Ces dispositifs ont progressivement reflué, tandis qu’ont été mis  en place le R.S.A. activité et une indemnisation du chômage moins longue, dégressive, amoindrie et soumise à un contrôle toujours plus étroit des démarches de recherche d’emploi présentées comme un ensemble de mesures susceptibles de faire diminuer le taux de chômage en augmentant le taux d’emploi, de façon à augmenter la croissance potentielle.

 

 Les dépenses passives, en colmatant les trappes à inactivité, ont nourri les trappes à pauvreté : la priorité au retour rapide à l’emploi s’est souvent faite au détriment de la qualité des appariements (entre emplois et travailleurs). Dans le même temps les politiques d’allègement des cotisations sociales sur les bas salaires ont incité les actifs à accepter des emplois peu qualifiés. Il peut donc y avoir une contradiction entre l’objectif du retour rapide à l’emploi et celui d’accroissement des capacités et opportunités des demandeurs d’emploi dans le long terme.

 

L’individualisation du traitement du chômage et de l’accompagnement du chômeur fait du chômage une expérience individuelle qui est alors plus souvent intériorisée comme un échec personnel. Cette individualisation peut aussi s’apparenter à une forme de contrôle social et véhiculer dans les représentations sociales l’idée que le chômage ressortirait davantage de la responsabilité individuelle que de la responsabilité collective. Enfin, les réductions de cotisations sociales altèrent le financement de la protection sociale et peuvent véhiculer dans les représentations sociales l’idée qu’elle serait une charge et non un bien commun.

 

Q1. Donner les formules du taux de chômage et du taux d’emploi

Q2. Pourquoi le chômage se concentre t-il sur certaines populations ?

Q3. Quels sont les effets bénéfiques attendus des politiques de flexibilité ?

Q4. Quels sont les effets négatifs des politiques de flexibilité ?

Q5. Pourquoi les politiques de flexibilité rendent-elles plus difficile l’intégration par le travail ?

Q6. Définir la flexi-sécurité, appariement, clivage générationnel, contrôle social

Q7. A quelle condition la flexi-sécurité peut-elle marcher ?

Q8. Expliquer comment s’est mis en place le contrôle accru sur les chômeurs ?

Q9. Quelles ont été les conséquences pour les chômeurs ? Est ce une solution ?

 


23/04/2016
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