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dossier 2. La croissance économique est-elle compatible avec la préservation de l'environnement ?


2.2. Quels instruments pour la politique climatique ?

Au sens large, la régulation publique est l'intervention de l'Etat visant à corriger les défaillances et imperfection de marché.

 


Bhoutan : le pays qui mise sur l’écologie

 

Q1. Quels sont les moyens de la politique climatique  mis en oeuvre au Bhoutan ? 

 

 

A. Trois instruments pour mener des politiques climatiques

 

Les pouvoirs publics vont chercher à internaliser les externalités négatives, c'est-à-dire faire entrer ces coûts dans les calculs économiques (à court et long terme) des pollueurs. Ils disposent de trois types d'instruments qui peuvent être combinés : la réglementation, les écotaxes et les permis d'émission. 

               

         La réglementation est l'ensemble des obligations juridiques qui s'imposent aux acteurs économiques comme les lois, les règlements administratifs, et notamment les décrets. Les pouvoirs publics peuvent édicter des normes concernant l'émission de pollutions (seuil de 130g de CO2 par kilomètre par véhicule), des normes concernant la fabrication de certains biens comme les normes techniques dans l'élevage afin d'éviter les pollutions de nitrate, des normes concernant la qualité de certains produits comme les normes haute qualité environnementale  dans le bâtiment (HQE) ou les normes de la filière bio, des normes concernant l'interdiction de certains produits (interdiction des chlorofluorocarbones) ou encore des normes sur le tri des déchets.

 


Paris : la chasse aux pollueurs

 

Q1. Cette réglementation est-elle efficace ? 

 

         La réglementation est efficace si les moyens de mise en oeuvre et de contrôle ne sont pas trop coûteux, si les sanctions sont dissuasives (amende supérieure aux bénéfices attendus d'un comportement déviant) mais elle est difficile à mettre en oeuvre pour toutes les activités qui ne sont pas homogènes (grosses et petites entreprises), de plus une norme n'incite pas à avoir des comportements au-delà de la norme.

                

             La taxation est le principe selon lequel l'Etat prélève une partie des ressources produites dans l'économie pour financer ses recettes. Selon le principe du pollueur/payeur, la taxe augmente les coûts des pollueurs qui sont conduits à tenir compte des externalités négatives que génèrent leurs choix sur l'environnement. Ils sont incités à choisir la production la moins polluante en réduisant leurs émissions tant que le coût de cette réduction (coût marginal) est moins élevé que le prix de la taxe. La taxe permet alors de rapprocher le coût privé (payé par le pollueur) du coût social ( dégradation de bien-être due à une pratique polluante). En pratique, la taxation prend le plus souvent la forme d’une taxe sur les carburants. Mais elle peut aussi être fonction du nombre de kilomètres parcourus, comme dans le cas de l’écotaxe. Dans ce dernier cas, les coûts de perception de la taxe sont beaucoup plus élevés. Les subventions fonctionnent selon le même principe mais à l'envers (crédit d'impôt pour l'isolation d'une maison). Le prélèvement d'une nouvelle taxe se traduit par de nouvelles recettes fiscales qui pourront servir à diminuer les pollutions ou améliorer le service public. On parle parfois de « double dividende » de la taxe : moins de polluants et plus de recettes fiscales. La taxe a aussi l’avantage de pouvoir tenir compte des spécificités économiques des secteurs d’activité concernés et donc d’être modulée (exemption partielle ou totale). Mis en place en Suède depuis 1990, elle a été annulée en France en 2007.


 

1. Comment devait fonctionner la taxe ?

2. Pourquoi y a t-il des portiques ?

3. Qui paye l'écotaxe ?

4. A quoi devait servir l'écotaxe ?

 

L’instauration d’une taxe carbone avait été rejetée par le Conseil constitutionnel quand le président Sarkozy avait tenté de la créer mais François Hollande l’a reconfigurée de façon à éviter une nouvelle censure. Accolée à la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques, elle oblige les pollueurs à payer en proportion de leurs émissions de carbone.

Elle a permis de récolter 2,4 milliards d’euros en 2015, 4 milliards d’euros en 2016, et devrait rapporter de plus en plus car elle est proportionnelle au prix de la tonne de carbone fixé chaque année par l’Assemblée. Son prix suit une trajectoire ascendante afin d’accélérer la transition énergétique.

 


Pollution : à Londres, beaucoup de restrictions, peu d'effets

 

Q1. Pourquoi la taxe ne marche t-elle pas à Londres ? 

 

           Dans l'esprit de la théorie des droits de propriété de R. Coase, les  marchés de permis d'émission reposent sur l'idée selon laquelle les problèmes d'externalités doivent être résolus par les agents économiques sur la base de négociation interindividuelles et d'échange de droits de propriété sur l'environnement. Le marché de quotas d'émission (ou marché de permis d'émission ou marché des « droits à polluer pour ses détracteurs) est un système dans lequel les pollueurs ont la possibilité d'échanger, contre un prix, les permis (les quotas) d'émission qui ont été alloués par les autorités.  Ceux qui ont peu pollué vendent leurs quotas excédentaires à ceux qui n'ont pas suffisamment de quotas par rapport à leur pollution effective.  Le marché aboutit à un prix.  Si les entreprises polluent trop, elles devront donc payer un coût supplémentaire, ce qui est censé les inciter à trouver des procédés moins polluants.

 

 

 

1)  Qu'est ce que l'internalisation de la pollution ?

2) Quels sont les moyens traditionnels pour faire payer le coût de la pollution ?

3) Quels sont les désavantages de la norme ?

4) Quels sont les avantages et les inconvénients de la taxe ?

5) Comment fonctionne globalement le marché des droits à polluer ?

6) Qu'est ce que le mécanisme de développement propre ?

7) Combien l'entreprise Lafarge produit-elle de ciment ? de Co2?

8) Pourquoi ce marché des droits à polluer ne fonctionne t_il pas ?

9) Qu'est ce que Power Next Carbone ?  ,

10) Pourquoi le prix du carbone a t-il chuté à partir de 2006 ?

11) Quels sont les différents problèmes que ce marché doit régler ?

 

 Les marchés de quotas sont plus souples mais il y a des risques de fluctuation des prix très importante ainsi que des risques de spéculation. Aujourd'hui, on peut dire que c'est un échec compte tenu de l'effondrement du prix de la tonne de CO2 du fond d'une diminution de la croissance et d'une allocation trop importante des quotas, ce qui ne produit plus aucune incitation.

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exercice 1

 

 B. La difficile mise en oeuvre d'une politique climatique 

 

 Ces instruments sont complémentaires : la réglementation est contraignante, la taxation repose sur la régulation par les prix, tandis que les quotas reposent sur la régulation par les quantités. Ils doivent donc être combinés pour une politique efficace. C'est un équilibre qu'il est difficile à trouver d'autant plus que les lobbies sont puissants aux Etats-Unis et en Europe. Les entreprises, elles, exercent un lobbying important auprès des pouvoirs publics pour limiter les efforts qui leurs sont demandés aussi bien dans l'allocation des quotas de permis d'émission que dans la mise en place de taxes ou de réglementations.

 

Le climat, l'air sont des biens publics mondiaux qui nécessitent une gouvernance mondiale. En 1990, le protocole de Kyoto ont permis de débuter cette gouvernance seulement un certain nombre de pays n'ont pas ratifié ce protocole parmi lesquels se trouvent les Etats-Unis, principal émetteur de gaz à effet de serre.  Il apparaît que le réchauffement climatique est un problème de long terme difficilement compatible avec les enjeux de court terme des démocraties ; soucieux de leur réélection, les politiques ne prennent pas les mesures appropriées ou reculent face aux pressions comme dans l’exemple récent de l’écotaxe. Chaque Etat a intérêt à se comporter en passager clandestin laissant les autres prendre les mesures couteuses à sa place.

 

Les pays industrialisés du Nord ont une responsabilité importante dans les émissions de gaz à effet de serre, cette responsabilité historique est fréquemment invoquée par la Chine ou le Vénézuela pour limiter leurs efforts comme cela a été fait à Copenhague en 2009. De fait il est difficile de demander à des pays émergents de mettre en jeu leur croissance alors que les pays développés ne font pas d'effort. Si l'approche par le marché  a été privilégiée à l'intérieur du protocole de Kyoto qui s’est applique à partir de 2005, 168 pays l'avaient ratifié en 2010, le Japon s'est retiré en 2010, de même que le Canada en 2011 et la Russie en 2012. Aujourd'hui, depuis la conférence sur le climat de décembre 2012 qui s'est tenue à Doha, l'Union Européenne, l'Australie et une dizaine d'autres pays industrialisés sont parties prenantes de l'acte II du protocole de Kyoto (avec des objectifs de réduction des GES à l'horizon 2020), ces pays ne sont à l'origine que de 15 % des émissions mondiales de GES.

 

L’accord de Paris négocié lors de la 21e Conférence des parties à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (COP21), a eu pour objectif d’aboutir à un accord universel et contraignant visant à limier à le réchauffement climatique à 2 degrés à l’horizon 2100, et impose aux pays développés de consacrer 100 milliards par an à partir de 2020 à la lutte contre le réchauffement climatique  et d’aider les pays en développement à organiser cette lutte. La  Chine s’est pour la première fois engagée à réduire ses émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030. Si l'objectif de 2°C est ambitieux, il reste non contraignant pour les pays et est dépourvu d’engagements chiffrés par pays. La remise en cause des accords de Paris par Trump en 2017 a porté un coup à ce début de gouvernance écologique mondiale.

 

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Q1.  Définir régulation publique, réglementation, taxation, lobby, gouvernance mondiale

Q2. Quelles sont les conditions de possibilité de la réglementation ?

Q3. Faîtes un schéma : subventions d’activités moins polluantes, taxe, nouvelles recettes, double dividende de la taxe, diminution de la pollution, développement des recherches en énergies propres

Q4. Comment le marché des quotas d’émission peut-il permettre de diminuer les émissions de CO2

Q5. Faîtes un schéma permettant de mettre en évidence l’effet rebond :

Q6. Faire un schéma synthétique sur les types d’instruments leur avantages et leurs inconvénients.

Q7. Quels sont les problèmes majeurs que doit affronter une gouvernance mondiale ?

 

 


 

 


04/09/2015
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2.1. Les limites écologiques de la croissance


La planète vit à crédit

 

Le développement durable (ou soutenable) est le développement qui « répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre à leurs propres besoins » selon le Rapport Brundtland  de  1987. C'est un mode de croissance qui permet à la génération suivante d’avoir au moins autant de bien-être que notre propre génération, sans détruire l’écosystème dont une partie est non-renouvelable. Le développement durable est un développement à trois dimensions : développement économique, équité sociale et générationnelle, préservation de l'écosystème et des ressources, car dans un sens, ce n’est qu’à partir d’un certain niveau de richesses que l’on peut se poser des questions sociales et environnementales dépassant l’horizon de la survie et par ailleurs, la dégradation environnementale peut accroître le niveau des inégalités.

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A/ Les externalités négatives engendrées par la croissance menacent le développement durable

Les conclusions du GIEC (groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) sont alarmantes : selon toute probabilité, l’activité humaine (transports, chauffage, agriculture), au travers des gaz à effet de serre qu’elle occasionne, est à l’origine de la hausse des température observées et prévues. Cette augmentation de température ne peut être évitée : elle ne peut qu’être limitée (à 1 ° C). Selon toute probabilité encore, elle sera entre 2,2 et 3,7 ° C d’ici la fin du siècle. 

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Carte de la NASA

 

 

Le réchauffement climatique entraîne un certain nombre de conséquences négatives pour l’homme et l’environnement comme des épisodes caniculaires, des risques de catastrophes naturelles plus importantes comme les cyclones et les sécheresses, une pollution de l'air facteur de maladies, une élévation du niveau de la mer et une diminution de la biodiversité. Ce réchauffement va de plus affecter différemment certaines régions du monde comme l'Afrique.

 

 


Le rapport Stern insiste sur le fait que le réchauffement entraînera pour les pays pauvres subiront un coût plus élevé car ils sont plus tributaires de l'agriculture, ont des services de santé inadaptés à l'apparition de nouvelles maladies liés au réchauffement et des services publics de qualité médiocre. De plus ces pays ayant des revenus faibles auront plus de difficultés à s'adapter au changement climatique qui diminuera les recettes et augmentera les besoins de dépenses, ce qui aggravera les finances publiques. Selon Stern, l'inaction pourrait conduire à une perte de 20 % du PIB mondial. L'«action», au contraire, consiste à mettre en œuvre des mesures visant à modifier non seulement l'orientation de notre modèle de croissance mais aussi les conséquences environnementales de l'activité économique. Cette «action » nécessiterait une perte de l'ordre de (seulement) 1% du PIB.

 

Fig 1. Calcul coût/avantage

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 Le coût de l’atténuation est donc inférieur au coût de l’adaptation. Ce qui justifie que l’on lutte contre le changement climatique. Toutefois, l’application du raisonnement «coûts-avantages» au changement climatique ne fait pas l'unanimité. En effet, l’estimation du coût de l’adaptation au changement climatique est presque impossible à réaliser compte tenu des incertitudes physiques et des effets d’interdépendance entre les phénomènes économiques (comment prévoir les répercussions en chaîne d’une hausse de la température de 3,7 ° C?).

 

Le marché est défaillant en cas d’externalités. Une externalité est la conséquence de l’activité économique d'un agent sur un ou d’autres agent(s) qui n’est pas prise en compte par le marché, i.e. qui n’est pas retenue dans la détermination des prix. Dans le cas d’une externalité négative (qui nous intéresse ici pour l'environnement), le coût social (supporté par la collectivité) d’une activité est supérieure au coût privé (supporté par le producteur) car cette activité entraine des nuisances que le producteur n’intègre pas dans son calcul d’optimisation, pour lequel il n’a donc pas à payer ! Etant donné que le coût privé est inférieur au coût social, le producteur va donc produire une quantité trop importante par rapport à ce que la société souhaite en réalité puisque le signal qui est fourni par les prix ne prend pas en compte les nuisances qu’il génère. Autrement dit, étant donné qu’il ne supporte pas le coût des nuisances il n’a pas intérêt à réduire sa production alors que la société le souhaiterait.

 

 

Question 1 : Dans la vidéo, quel capital naturel a disparu ?

Question 2 : Par quels types de capitaux ce capital naturel est-il remplacé ?

Question 3 : Quelles difficultés poserait la généralisation de cette méthode ?

Question 4 : Comment pourrait-on améliorer la pollinisation manuelle ?

Question 5 : Peut-on remplacer ce capital naturel par du capital physique ?

Question 6 : Quelles limites posent l'usage de robobees ?

Question 7 : Quelles fonctions ne rempliront pas les robobees ?

Question 8 : D'autres solutions sont-elles envisageables ?

Question 9 : Donner une valeur marchande aux abeilles est-il efficace pour les protéger ?

 

Aux cas d'externalités négatives de la croissance s'ajoutent des failles de la régulation marchande dans la gestion des biens publics en général et des biens communs en particulier comme les ressources halieutiques, les forêts primaires, le pétrole, les paysages naturels. Un bien commun, par définition, est rival, son usage induit une appropriation individuelle, qui empêche les autres d'y avoir accès, mais il est non excluable, il est impossible d'exclure l'agent économique qui ne participe pas à sa qualité. La valeur des biens communs est sous-estimée par le marché et la faiblesse du prix de marché incite à une sur-exploitation et conduit à un épuisement ou une dégradation des ressources.  Le marché, étant incapable, de par son fonctionnement autonome, de fixer un « vrai » prix capable d’inciter les agents économiques à réduire leur consommation, il fournit un mauvais signal à ces agents, et les incite donc à des comportements qui vont nuire à tous (acheter une voiture diesel plutôt qu’une voiture électrique par ex.). L’incapacité du marché à inclure dans les prix le coût des externalités négatives représente une des plus graves défaillance des mécanismes de marché.

 

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 Ainsi contrairement à la théorie classique inaugurée par A.Smith selon laquelle la poursuite des intérêts individuels assure la satisfaction collective, la somme des intérêts individuels peut conduire à la ruine générale. Cependant pour certains économistes comme R.Coase, ce serait l'absence de droits de propriété qui empêche la bonne allocation des ressources. Distribuer des droits de propriété sur la nature permettrait de régler le problème, c'est dans ce cadre théorique qu'ont été créés les marchés de droits à polluer. Elinor Ostrom met l'accent quant à elle sur une autre solution consistant à mettre en place des institutions favorable à une gestion communautaire et coopérative des ressources communes.

 

 

exercice 

2.  Les solutions dépendent de la définition de la soutenabilité

 Le développement économique et donc l'accroissement du bien être dépend du stock de quatre types de ressources: le capital physique, le capital humain, le capital social et institutionnel, le capital naturel.

Le capital physique permet d'assurer la production des biens et services qui participent au bien-être des individus.  Lorsque le stock de capital physique s'accroît, le travail est plus efficace, le pouvoir d'achat et le bien-être peuvent s'accroître. Le capital humain lui aussi rend plus efficace les travailleurs, et permet donc d’augmenter l’offre de biens et services. Le capital institutionnel comprend les réseaux sociaux, normes, valeurs et institutions propres à une société donnée. Il accroît la confiance mutuelle des acteurs dans une société donnée. Il rend les actions des agents économiques plus prévisibles et facilite donc la coopération et les relations d’interdépendance (par exemple les relations des producteurs avec leurs fournisseurs). Cette ressource, favorisant la cohésion sociale, participe elle aussi du bien-être. Enfin, le capital naturel est le support de la vie humaine. Il est l'ensemble des ressources naturelles (renouvelables ou non) pouvant servir à la production. Son exploitation à des fins productives fournit aux individus les ressources nécessaires à leur bien-être. Il peut sembler surprenant de parler de la nature ou du climat comme d’un capital, mais cette métaphore économique se justifie au sens où la nature nous fournit des ressources indispensables à la production. Ces capitaux participent également au bien-être de manière indirecte : en interagissant, ils se renforcent l'un l'autre.

  Deux conceptions ici existent. Les tenants de la soutenabilité faible pensent que cette baisse du capital naturel peut être compensée par la hausse du stock des autres capitaux. Au contraire, les défenseurs de la soutenabilité forte pensent que le capital naturel est trop important pour que l’on accepte sa dégradation. Nous sommes donc face à une alternative : soit le capital naturel est considéré comme non-essentiel et l'accumulation des autres formes de capitaux est à même de compenser sa destruction, soit le capital naturel est essentiel et son stock ne peut décroître qu'au prix du bien-être futur. En d’autres termes, soit les capitaux sont substituables (soutenabilité faible), soit ils ne sont pas substituables (soutenabilité forte).

 

 Les défenseurs de la soutenabilité faible considèrent que le progrès technique apportera des solutions. La pollution des sols, par exemple, peut être compensée par la mécanisation de l’agriculture (capital physique) ou les cultures hors-sol (en serre), qui accroissent les rendements. Selon cette conception de la soutenabilité, l’éducation permet de trouver des solutions techniques qui sont à même de réparer les dommages faits à l’environnement (par exemple des solvants et des techniques de confinements peuvent limiter l’impact des marées noires), ou de trouver des solutions alternatives à la baisse du capital naturel (de nouvelles sources d’énergie peuvent venir se substituer aux énergies fossiles épuisées). Dans le cas du réchauffement climatique, certains préconisent les puits de carbone, ou même la diffusion de particules dans l'atmosphère pour limiter les radiations solaires. 

 

 


Environnement : bientôt du plastique zéro déchet

 

Cette confiance en le progrès technique s’appuie sur le fait que l'intensité énergétique de la production diminue avec le progrès technique. En effet, avec le progrès technique, chaque unité monétaire de bien produit nécessite aujourd'hui moins d'énergie que dans le passé. Par exemple, l'économie française, en 1970, avait besoin de 600 TEP (tonnes équivalent pétrole) pour obtenir un million d'euros de PIB contre 170 aujourd'hui, soit une intensité énergétique plus de trois fois meilleure. Certains économistes ont même évoqué une courbe de Kuznets environnementale suivant   une forme de U inversé, la dégradation de l’environnement diminuant à partir d’un certain moment du fait du progrès technique. Toutefois, cet optimisme est contredit par de nombreuses observations (les émissions de gaz à effet de serre n’ont jamais été aussi fortes).

 

Figure 2. La courbe de Kuznets environnementale

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La Banque Mondiale, qui adopte le point de vue des économistes néoclassiques défend la position d'une soutenabilité faible. Elle a mis au point un indicateur du développement durable : l’Épargne Nette Ajustée (ENA). L'épargne nette ajustée ou «épargne véritable» est un indicateur de soutenabilité visant à exprimer la variation du stock de capital physique, humain et naturel d'un pays à l'issue d'un cycle de production. L’ENA se calcule en soustrayant à l'épargne nationale brute la consommation de capital fixe ainsi que la baisse des stocks de ressources naturelles et des dommages causés par la pollution consommées et en ajoutant des investissements en capital humain (assimilés aux dépenses d'éducation).   L'économie d'un pays qui est capable d'épargner une partie suffisante de son PIB est considérée comme « soutenable ».  Plus le taux est élevé, plus la capacité du pays à augmenter son patrimoine (entendu au sens large) est importante, plus son développement est soutenable. Selon ces auteurs, une ponction sur le capital naturel peut être compensée par des efforts d'« épargne », c'est-à-dire d'accumulation, dans d'autres domaines (le capital physique et/ou le capital humain).  

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Cependant, pour les partisans de la soutenabilité forte (Club de Rome, partisans de la décroissance, écologistes radicaux), le capital naturel est une ressource spécifique (bien commun ou collectif) et essentielle qui est surexploité au détriment de tous. Dans ce cadre, le développement durable est assuré seulement si le stock de capital naturel ne décroît pas. Les défenseurs de la soutenabilité forte doutent de la capacité du progrès technique à protéger le capital naturel. Cette conception « forte » de la soutenabilité s'appuie sur  l'empreinte écologique, indicateur qui évalue toute la surface nécessaire pour produire ce que consomme un individu ou une population (alimentation, déplacements...) ainsi que pour absorber les déchets rejetés. La surface est  mesurée en hectares globaux (hag). D'après le World Wide Fund, dans le Rapport Planète vivante de 2012, l'empreinte écologique mondiale atteint en 2007, 1,5 planète contre 0,6 en 1961. L'empreinte est de 5 hectares pour chaque habitant en France, de 0,9 en Inde mais de 8 aux Etats-Unis. Cette conception de la soutenabilité forte implique des politiques plus radicales comme la décroissance, le changement de nos modes d’alimentation (moins carné), la mise en place d’une gestion coopérative au niveau mondial des ressources communes.

 

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Le mode de vie occidental est insoutenable et il faudrait 4,5 planètes terre à l'humanité si chacun des hommes vivait comme un américain moyen. nombre de planètes.PNG

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dette écologique 230 jours

Calcul de l’empreinte écologique individuelle

 

 

  1. Définir : développement durable, externalité négative, bien commun, épargne nette ajustée, empreinte écologique
  2. Pourquoi le réchauffement climatique accentue-t-il les inégalités ?
  3. En quoi le modèle de Stern met-il en évidence le raisonnement court-termiste de nos politiques économiques ? Cette analyse a-t-elle des limites ?
  4. Pourquoi le marché est-il défaillant pour gérer l’environnement ?
  5. Faire un schéma incluant : ensemble des ressources naturelles, capital physique, capital naturel, captal institutionnel, dépenses d’éducation, investissement, confiance mutuelle, développement économique, capital humain
  6. Faîtes un tableau synthétique permettant de comparer soutenabilité forte et faible : définition, défenseurs, politiques à mettre en place, indicateurs

 

 

1. Pourquoi vouloir produire toujours davantage ?

2. Quelle est la logique des partisans de la décroissance ? Pourquoi ne peut-on pas demander aux pays émergents de réduire les premiers leur production

3. Pourquoi une coopération internationale est-elle nécessaire ?

4. La décroissance est-elle une utopie ?

 

Débat sur la décroissance

 

 

 

 


04/09/2015
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