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10.1. Les pouvoirs publics contribuent à la justice sociale

 A. De l’égalité des droits à l’Etat-providence

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La justice sociale est l'ensemble des principes qui définissent la répartition équitable des droits sociaux et des devoirs au sein d'une collectivité. Il existe une pluralité de critères qui permettent de définir ce qu’est une société juste. Ces critères dépendent de la conception de l'égalité privilégiée : égalité des droits, égalité des chances et égalité des situations.   

       L' égalité des droits est inscrite dans la déclaration des droits de l'homme de 1789 " Les hommes naissent libres et égaux en droits", qui se poursuit avec l'article 2 " ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté et la résistance à l'oppression", il est cependant ajouté que "les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l'utilité commune". L'égalité devant la loi est largement garantie dans les sociétés démocratiques même si des débats subsistent (extension des droits de l’enfant, droits de vote pour les étrangers, citoyenneté européenne, etc.). Pour les auteurs libéraux comme F.Hayek, une fois cette égalité devant la loi assurée, il faut laisser le libre jeu du marché sanctionner les différentes contributions des individus : le marché peut alors tolérer de très fortes inégalités sociales. 

 

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     A cette conception minimale de la justice sociale, de nombreuses sociétés ont enrichi leur conception de l'égalité des droits par une égalité des chances afin d'éviter que cette compétition entre individus ne soit pas faussée par des inégalités de départ. L'égalité des chances est centrale dans les sociétés méritocratiques dans lesquelles seules les différences de vertus ( talent, travail, effort, volonté etc.) peuvent légitimer la possibilité d'inégalités sociales. Une des limites d'une conception de la justice sociale fondée sur l'égalité des chances c'est qu'elle peut aussi permettre de tolérer des inégalités sociales très importantes, quand des individus n'ont pas su saisir leurs chances. 

 

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     Les sociétés modernes dans des proportions variables ont adjoint une troisième conception de l'égalité : l'égalité des situations. La justice sociale est alors correctrice. Une société doit veiller à ce que les disparités entre les situations des individus (conditions de vie, logements, revenus etc.) ne soient pas trop élevées afin d'éviter de porter atteinte à la solidarité et à la dignité humaine. Pour éviter que les écarts ne soient trop grands entre les différents groupes sociaux, les Etats démocratiques se sont transformés en Etat-providence. L'objectif a été de contrecarrer les tendances inégalitaires de l'économie de marché par la mise en place de droits sociaux.

 

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On peut aller encore plus loin dans la mise en place de l'égalité. Selon J.Rawls, la distribution des talents et des volontés est une des formes de l’arbitraire. Ce théoricien de la justice sociale préconise une conception de la justice sociale fondée sur l'équitéCelle-ci se fonde sur un choix éthique qui conduit à traiter de façon différente les membres de la société afin de réduire des inégalités constatées, qu'elles soient formelles ou réelles. Les groupes les plus démunies doivent être favorisés ( droits, politiques spécifiques) afin de compenser leurs désavantages, cette théorie de la justice ouvre la voie aux politiques de discrimination positive. La politique des ZEP consiste par exemple à allouer des moyens humains et matériels à  des zones où les difficultés sociales et scolaires sont les plus criantes, pour réduire les écarts de destinées scolaires. Mais on retrouve aussi cette volonté d'équité dans l'obligation faite aux entreprises d'employer un quota de 6% de travailleurs handicapés.

 

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B. Les mesures redistributives : fiscalité, prestations sociales et services collectifs  

Les politiques de réduction des inégalités mises en place dans le cadre des Etats-providence après la seconde guerre mondiale ont utilisé 4 moyens : la fiscalité, la production de services collectifs, la protection sociale et les luttes contre les discriminations.

 

 Les impôts et taxes peuvent porter sur le revenu, le patrimoine, les bénéfices, la consommation, l’héritage.  Il existe des impôts proportionnel à l’assiette (cotisations sociales, impôt sur les sociétés), des impôts progressif quand le taux d’imposition augmente avec le montant imposé (impôt sur le revenu) et des impôts dégressif, (redevance télévisuelle, TVA). La fiscalité est d'autant plus redistributive que les impôts et taxes sont progressifs, en France, l'impôt sur le revenu et les taxes sur l'héritages ont permis de diminuer fortement les inégalités, mais aujourd'hui les différentes réformes de ces impôts ainsi que les niches fiscales ont rendu dégressif le système fiscal comme l'a montré T. Piketty. 

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Les prestations sociales permettent de réduire les inégalités. La logique de la protection sociale en France repose en grande partie sur une logique d'assuranceLes assurés sociaux cotisent et reçoivent des prestations selon l'importance des droits qu'ils se sont ouverts avec leurs cotisations. Mais la protection sociale repose aussi sur une logique d'assistance, elle offre sans cotisation préalable mais sous conditions de ressources des prestations universelles financées par l'impôt, comme les minimas sociaux, les bourses etc. Les systèmes de protection sociale assurent ainsi une redistribution horizontale entre malades et bien portants par exemple et une redistribution verticale des catégories favorisées vers les catégories qui le sont moins. Gosta Esping Andersen a dressé une typologie des régimes d'Etat-Providence. 

 

 

 

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La redistribution secondaire opère des prélèvements sur les revenus primaires et distribue des revenus de transfert pour réduire les inégalités de départ. Pour mesurer l’ampleur de ce mouvement de redistribution, on peut comparer la courbe de Lorenz des revenus (ou du patrimoine) avant et après redistribution ou bien l'évolution du rapport inter-décile  ou inter-quintile avant et après distribution.

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D’après l’INSEE, les prestations sociales (prestations familiales, minima sociaux et allocations logement) contribuent pour les deux tiers à la réduction des inégalités et les prélèvements pour un tiers, en grande partie par l’effet de l’impôt progressif sur le revenu. En vingt ans, l’impact redistributif du système socio-fiscal s’est légèrement réduit, sous l’effet des différentes mesures qui ont été prises. L’impôt sur le revenu est en 2010 à la fois moins progressif et d’un montant relativement plus faible qu’en 1990. Les prestations sociales apparaissent aussi moins redistributives qu’elles ne l’étaient en 1990. Elles ont été le plus souvent revalorisées en fonction de l’inflation et ont donc évolué moins vite que les revenus moyens de la population. L’érosion relative de leurs montants réduit leur capacité à réduire les inégalités. Elle a en partie été compensée par des politiques de ciblage des prestations sur les ménages les plus défavorisés, ce qui augmente mécaniquement la progressivité du système.

 

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Les  services collectifs non marchands financés par l’impôt ont aussi des effets positifs sur la réduction des inégalités de situation. Les ménages qui ont des revenus primaires faibles et qui contribuent peu ou pas au financement du service collectif en bénéficient dans des proportions au moins aussi importantes que les autres ménages. Cette forme de consommation collective vient augmenter les sommes disponibles pour d’autres usages, on peut calculer d’ailleurs le revenu disponible brut ajusté, pour tenir compte des effets redistributifs de ces services collectifs fournis gratuitement ou à un prix inférieur à leur coût de production. 

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Quand ce service collectif permet d’assurer l’égalité d’accès aux moyens de réussir comme l'école publique ou les services de bibliothèque, il assure en même temps une forme d’égalité des chances et contribue à l’égalité des situations. 

 

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C. Les mesures de lutte contre les discriminations

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Une discrimination est définie comme une différence de traitement reposant sur un critère interdit par la loi : sexe, couleur de peau, handicap, maladie, origine sociale ou ethnique, orientation sexuelle, etc. La discrimination se traduit alors par des inégalités d’accès à certaines ressources en l’écartant à partir de critères cachés comme par exemple l'accès aux lieux publics, à l’emploi (préférer un homme à une femme au moment de l’embauche, promouvoir davantage les employés blancs que les employés noirs...), au logement (refuser un logement au prétexte de la couleur de la peau,...) ou encore à la consommation de certains services (regrouper les élèves en fonction de leur origine,...). 

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Pour mesurer la discrimination dont sont victimes les femmes ou les « minorités visibles » sur le marché du travail, on peut chercher à isoler la part des inégalités de salaires dont elles sont victimes et qui reste inexpliquée par des facteurs liés à la productivité, par exemple, le type de poste ou le niveau de diplôme.  Dans le cadre de l’accès à un logement ou à un emploi les mesures de testing permet de mettre au jour les discriminations.

 

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La lutte contre les discriminations passent certes par des actions en justice mais aussi par des démarches non judiciaires comme la mise en place d'une discrimination positive. Celle-ci consiste en un traitement préférentiel volontairement accordé aux membres d’une minorité traditionnellement désavantagée afin de compenser les désavantages associés à cette appartenance. Cette atteinte à l’égalité de traitement peut passer par les quotas ( loi sur la parité 2000, loi sur le handicap), des prestations sous condition de ressources (minimas sociaux) mais aussi par des politiques de soutien privilégié ( ZEP, RAR etc.). 

 

Les opposants aux politiques de lutte contre la discrimination outre le fait que l'action positive est une entorse au principe républicain d'égalité des droits, soulignent les effets pervers des ces actions :  

      a) Les quotas diminuent la qualité des personnes  choisies. Ils favorisent l'embauche de travailleurs moins qualifiés qui diminue l’efficacité productive des entreprises, ou la baisse de la performances des "hommes" politiques. 

       b) Les minimas sociaux ont un effet désincitatif, ils nuisent à l'investissement en capital humain des personnes concernées par ces aides. 

    c) Les politiques de discrimination positive selon ses détracteurs peuvent se retourner contre les populations concernées en favorisant une stigmatisation de leurs membres. Ainsi les collèges classés ZEP voient fuir les enfants issus des classes moyennes. 

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En réalité, ces politiques ont une efficacité certaine comme le montre la place croissante des femmes en politique depuis 2000. Elles permettent de modifier les pratiques d’embauche, les politiques de ressources humaines et les revenus de l’emploi. Les établissements pratiquant l’action positive modifient leurs critères de recrutement et offrent une formation plus fréquente au personnel embauché. Grâce à ces efforts de formation et d’intégration des nouveaux embauchés, on observe une amélioration de la productivité des salariés. On dispose donc d’études qui montrent qu’il est possible de lutter contre les pratiques discriminatoires sans diminuer l’efficacité productive des entreprises.

 

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  Mais seuls les critères discriminatoires directement « objectivables » et visibles (sexe, handicap, origine ethnique, etc.) peuvent être pris en compte, les dispositifs d’action positive sont sans effet sur d’autres sources possibles de discriminations comme l’apparence physique, l’orientation sexuelle, l’appartenance religieuse ou politique. Ces actions doivent donc être complétées par d’autres actions plus préventives sur les représentations des critères d’embauche.

 

Q1. Définir justice sociale, protection sociale, service collectif, discrimination, fiscalité, redistribution, revenus de transfert, équité

Q2. Faîtes un schéma représentant les différentes formes d’égalité (droit, chances, situation, équité) et présentant pour chacune une ou deux mesures qui ont permis de la mettre en œuvre.

Q3. Comment la fiscalité peut-elle diminuer les inégalités ?

Q4. Quelle est la différence entre la logique d’assistance et la logique d’assurance de la protection sociale ?

Q5. Comment les services collectifs permettent-ils de diminuer les inégalités ?

Q6. Comment peut-on mesurer les discriminations ?

Q7. Réaliser une carte mentale permettant de mettre en évidence les formes, les avantages, les inconvénients et les limites des politiques de discrimination positive  

 

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15/04/2016
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