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2.1. Les limites écologiques de la croissance


La planète vit à crédit

 

Le développement durable (ou soutenable) est le développement qui « répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre à leurs propres besoins » selon le Rapport Brundtland  de  1987. C'est un mode de croissance qui permet à la génération suivante d’avoir au moins autant de bien-être que notre propre génération, sans détruire l’écosystème dont une partie est non-renouvelable. Le développement durable est un développement à trois dimensions : développement économique, équité sociale et générationnelle, préservation de l'écosystème et des ressources, car dans un sens, ce n’est qu’à partir d’un certain niveau de richesses que l’on peut se poser des questions sociales et environnementales dépassant l’horizon de la survie et par ailleurs, la dégradation environnementale peut accroître le niveau des inégalités.

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A/ Les externalités négatives engendrées par la croissance menacent le développement durable

Les conclusions du GIEC (groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) sont alarmantes : selon toute probabilité, l’activité humaine (transports, chauffage, agriculture), au travers des gaz à effet de serre qu’elle occasionne, est à l’origine de la hausse des température observées et prévues. Cette augmentation de température ne peut être évitée : elle ne peut qu’être limitée (à 1 ° C). Selon toute probabilité encore, elle sera entre 2,2 et 3,7 ° C d’ici la fin du siècle. 

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Carte de la NASA

 

 

Le réchauffement climatique entraîne un certain nombre de conséquences négatives pour l’homme et l’environnement comme des épisodes caniculaires, des risques de catastrophes naturelles plus importantes comme les cyclones et les sécheresses, une pollution de l'air facteur de maladies, une élévation du niveau de la mer et une diminution de la biodiversité. Ce réchauffement va de plus affecter différemment certaines régions du monde comme l'Afrique.

 

 


Le rapport Stern insiste sur le fait que le réchauffement entraînera pour les pays pauvres subiront un coût plus élevé car ils sont plus tributaires de l'agriculture, ont des services de santé inadaptés à l'apparition de nouvelles maladies liés au réchauffement et des services publics de qualité médiocre. De plus ces pays ayant des revenus faibles auront plus de difficultés à s'adapter au changement climatique qui diminuera les recettes et augmentera les besoins de dépenses, ce qui aggravera les finances publiques. Selon Stern, l'inaction pourrait conduire à une perte de 20 % du PIB mondial. L'«action», au contraire, consiste à mettre en œuvre des mesures visant à modifier non seulement l'orientation de notre modèle de croissance mais aussi les conséquences environnementales de l'activité économique. Cette «action » nécessiterait une perte de l'ordre de (seulement) 1% du PIB.

 

Fig 1. Calcul coût/avantage

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 Le coût de l’atténuation est donc inférieur au coût de l’adaptation. Ce qui justifie que l’on lutte contre le changement climatique. Toutefois, l’application du raisonnement «coûts-avantages» au changement climatique ne fait pas l'unanimité. En effet, l’estimation du coût de l’adaptation au changement climatique est presque impossible à réaliser compte tenu des incertitudes physiques et des effets d’interdépendance entre les phénomènes économiques (comment prévoir les répercussions en chaîne d’une hausse de la température de 3,7 ° C?).

 

Le marché est défaillant en cas d’externalités. Une externalité est la conséquence de l’activité économique d'un agent sur un ou d’autres agent(s) qui n’est pas prise en compte par le marché, i.e. qui n’est pas retenue dans la détermination des prix. Dans le cas d’une externalité négative (qui nous intéresse ici pour l'environnement), le coût social (supporté par la collectivité) d’une activité est supérieure au coût privé (supporté par le producteur) car cette activité entraine des nuisances que le producteur n’intègre pas dans son calcul d’optimisation, pour lequel il n’a donc pas à payer ! Etant donné que le coût privé est inférieur au coût social, le producteur va donc produire une quantité trop importante par rapport à ce que la société souhaite en réalité puisque le signal qui est fourni par les prix ne prend pas en compte les nuisances qu’il génère. Autrement dit, étant donné qu’il ne supporte pas le coût des nuisances il n’a pas intérêt à réduire sa production alors que la société le souhaiterait.

 

 

Question 1 : Dans la vidéo, quel capital naturel a disparu ?

Question 2 : Par quels types de capitaux ce capital naturel est-il remplacé ?

Question 3 : Quelles difficultés poserait la généralisation de cette méthode ?

Question 4 : Comment pourrait-on améliorer la pollinisation manuelle ?

Question 5 : Peut-on remplacer ce capital naturel par du capital physique ?

Question 6 : Quelles limites posent l'usage de robobees ?

Question 7 : Quelles fonctions ne rempliront pas les robobees ?

Question 8 : D'autres solutions sont-elles envisageables ?

Question 9 : Donner une valeur marchande aux abeilles est-il efficace pour les protéger ?

 

Aux cas d'externalités négatives de la croissance s'ajoutent des failles de la régulation marchande dans la gestion des biens publics en général et des biens communs en particulier comme les ressources halieutiques, les forêts primaires, le pétrole, les paysages naturels. Un bien commun, par définition, est rival, son usage induit une appropriation individuelle, qui empêche les autres d'y avoir accès, mais il est non excluable, il est impossible d'exclure l'agent économique qui ne participe pas à sa qualité. La valeur des biens communs est sous-estimée par le marché et la faiblesse du prix de marché incite à une sur-exploitation et conduit à un épuisement ou une dégradation des ressources.  Le marché, étant incapable, de par son fonctionnement autonome, de fixer un « vrai » prix capable d’inciter les agents économiques à réduire leur consommation, il fournit un mauvais signal à ces agents, et les incite donc à des comportements qui vont nuire à tous (acheter une voiture diesel plutôt qu’une voiture électrique par ex.). L’incapacité du marché à inclure dans les prix le coût des externalités négatives représente une des plus graves défaillance des mécanismes de marché.

 

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 Ainsi contrairement à la théorie classique inaugurée par A.Smith selon laquelle la poursuite des intérêts individuels assure la satisfaction collective, la somme des intérêts individuels peut conduire à la ruine générale. Cependant pour certains économistes comme R.Coase, ce serait l'absence de droits de propriété qui empêche la bonne allocation des ressources. Distribuer des droits de propriété sur la nature permettrait de régler le problème, c'est dans ce cadre théorique qu'ont été créés les marchés de droits à polluer. Elinor Ostrom met l'accent quant à elle sur une autre solution consistant à mettre en place des institutions favorable à une gestion communautaire et coopérative des ressources communes.

 

 

exercice 

2.  Les solutions dépendent de la définition de la soutenabilité

 Le développement économique et donc l'accroissement du bien être dépend du stock de quatre types de ressources: le capital physique, le capital humain, le capital social et institutionnel, le capital naturel.

Le capital physique permet d'assurer la production des biens et services qui participent au bien-être des individus.  Lorsque le stock de capital physique s'accroît, le travail est plus efficace, le pouvoir d'achat et le bien-être peuvent s'accroître. Le capital humain lui aussi rend plus efficace les travailleurs, et permet donc d’augmenter l’offre de biens et services. Le capital institutionnel comprend les réseaux sociaux, normes, valeurs et institutions propres à une société donnée. Il accroît la confiance mutuelle des acteurs dans une société donnée. Il rend les actions des agents économiques plus prévisibles et facilite donc la coopération et les relations d’interdépendance (par exemple les relations des producteurs avec leurs fournisseurs). Cette ressource, favorisant la cohésion sociale, participe elle aussi du bien-être. Enfin, le capital naturel est le support de la vie humaine. Il est l'ensemble des ressources naturelles (renouvelables ou non) pouvant servir à la production. Son exploitation à des fins productives fournit aux individus les ressources nécessaires à leur bien-être. Il peut sembler surprenant de parler de la nature ou du climat comme d’un capital, mais cette métaphore économique se justifie au sens où la nature nous fournit des ressources indispensables à la production. Ces capitaux participent également au bien-être de manière indirecte : en interagissant, ils se renforcent l'un l'autre.

  Deux conceptions ici existent. Les tenants de la soutenabilité faible pensent que cette baisse du capital naturel peut être compensée par la hausse du stock des autres capitaux. Au contraire, les défenseurs de la soutenabilité forte pensent que le capital naturel est trop important pour que l’on accepte sa dégradation. Nous sommes donc face à une alternative : soit le capital naturel est considéré comme non-essentiel et l'accumulation des autres formes de capitaux est à même de compenser sa destruction, soit le capital naturel est essentiel et son stock ne peut décroître qu'au prix du bien-être futur. En d’autres termes, soit les capitaux sont substituables (soutenabilité faible), soit ils ne sont pas substituables (soutenabilité forte).

 

 Les défenseurs de la soutenabilité faible considèrent que le progrès technique apportera des solutions. La pollution des sols, par exemple, peut être compensée par la mécanisation de l’agriculture (capital physique) ou les cultures hors-sol (en serre), qui accroissent les rendements. Selon cette conception de la soutenabilité, l’éducation permet de trouver des solutions techniques qui sont à même de réparer les dommages faits à l’environnement (par exemple des solvants et des techniques de confinements peuvent limiter l’impact des marées noires), ou de trouver des solutions alternatives à la baisse du capital naturel (de nouvelles sources d’énergie peuvent venir se substituer aux énergies fossiles épuisées). Dans le cas du réchauffement climatique, certains préconisent les puits de carbone, ou même la diffusion de particules dans l'atmosphère pour limiter les radiations solaires. 

 

 


Environnement : bientôt du plastique zéro déchet

 

Cette confiance en le progrès technique s’appuie sur le fait que l'intensité énergétique de la production diminue avec le progrès technique. En effet, avec le progrès technique, chaque unité monétaire de bien produit nécessite aujourd'hui moins d'énergie que dans le passé. Par exemple, l'économie française, en 1970, avait besoin de 600 TEP (tonnes équivalent pétrole) pour obtenir un million d'euros de PIB contre 170 aujourd'hui, soit une intensité énergétique plus de trois fois meilleure. Certains économistes ont même évoqué une courbe de Kuznets environnementale suivant   une forme de U inversé, la dégradation de l’environnement diminuant à partir d’un certain moment du fait du progrès technique. Toutefois, cet optimisme est contredit par de nombreuses observations (les émissions de gaz à effet de serre n’ont jamais été aussi fortes).

 

Figure 2. La courbe de Kuznets environnementale

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La Banque Mondiale, qui adopte le point de vue des économistes néoclassiques défend la position d'une soutenabilité faible. Elle a mis au point un indicateur du développement durable : l’Épargne Nette Ajustée (ENA). L'épargne nette ajustée ou «épargne véritable» est un indicateur de soutenabilité visant à exprimer la variation du stock de capital physique, humain et naturel d'un pays à l'issue d'un cycle de production. L’ENA se calcule en soustrayant à l'épargne nationale brute la consommation de capital fixe ainsi que la baisse des stocks de ressources naturelles et des dommages causés par la pollution consommées et en ajoutant des investissements en capital humain (assimilés aux dépenses d'éducation).   L'économie d'un pays qui est capable d'épargner une partie suffisante de son PIB est considérée comme « soutenable ».  Plus le taux est élevé, plus la capacité du pays à augmenter son patrimoine (entendu au sens large) est importante, plus son développement est soutenable. Selon ces auteurs, une ponction sur le capital naturel peut être compensée par des efforts d'« épargne », c'est-à-dire d'accumulation, dans d'autres domaines (le capital physique et/ou le capital humain).  

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Cependant, pour les partisans de la soutenabilité forte (Club de Rome, partisans de la décroissance, écologistes radicaux), le capital naturel est une ressource spécifique (bien commun ou collectif) et essentielle qui est surexploité au détriment de tous. Dans ce cadre, le développement durable est assuré seulement si le stock de capital naturel ne décroît pas. Les défenseurs de la soutenabilité forte doutent de la capacité du progrès technique à protéger le capital naturel. Cette conception « forte » de la soutenabilité s'appuie sur  l'empreinte écologique, indicateur qui évalue toute la surface nécessaire pour produire ce que consomme un individu ou une population (alimentation, déplacements...) ainsi que pour absorber les déchets rejetés. La surface est  mesurée en hectares globaux (hag). D'après le World Wide Fund, dans le Rapport Planète vivante de 2012, l'empreinte écologique mondiale atteint en 2007, 1,5 planète contre 0,6 en 1961. L'empreinte est de 5 hectares pour chaque habitant en France, de 0,9 en Inde mais de 8 aux Etats-Unis. Cette conception de la soutenabilité forte implique des politiques plus radicales comme la décroissance, le changement de nos modes d’alimentation (moins carné), la mise en place d’une gestion coopérative au niveau mondial des ressources communes.

 

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Le mode de vie occidental est insoutenable et il faudrait 4,5 planètes terre à l'humanité si chacun des hommes vivait comme un américain moyen. nombre de planètes.PNG

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dette écologique 230 jours

Calcul de l’empreinte écologique individuelle

 

 

  1. Définir : développement durable, externalité négative, bien commun, épargne nette ajustée, empreinte écologique
  2. Pourquoi le réchauffement climatique accentue-t-il les inégalités ?
  3. En quoi le modèle de Stern met-il en évidence le raisonnement court-termiste de nos politiques économiques ? Cette analyse a-t-elle des limites ?
  4. Pourquoi le marché est-il défaillant pour gérer l’environnement ?
  5. Faire un schéma incluant : ensemble des ressources naturelles, capital physique, capital naturel, captal institutionnel, dépenses d’éducation, investissement, confiance mutuelle, développement économique, capital humain
  6. Faîtes un tableau synthétique permettant de comparer soutenabilité forte et faible : définition, défenseurs, politiques à mettre en place, indicateurs

 

 

1. Pourquoi vouloir produire toujours davantage ?

2. Quelle est la logique des partisans de la décroissance ? Pourquoi ne peut-on pas demander aux pays émergents de réduire les premiers leur production

3. Pourquoi une coopération internationale est-elle nécessaire ?

4. La décroissance est-elle une utopie ?

 

Débat sur la décroissance

 

 

 

 



04/09/2015
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