conflits sociaux
Activité 1
Document 1 - Les individus ont-ils intérêt à se mobiliser ? Le paradoxe d'Olson
A l'échelle individuelle, le passage à l'acte reste assez énigmatique. Dans La logique de l'action collective (1965), Mancur Olson avance que celui-ci constitue un véritable paradoxe. S'inscrivant dans le cadre des théories du choix rationnel (*) , il remarque que tout acteur a intérêt à se comporter en "passager clandestin", c'est-à-dire à profiter des retombées d'une mobilisation sans s'y investir lui-même, pour éviter les coûts que celle-ci occasionne (temps, argent ou risque de représailles). Mais si tous raisonnaient ainsi, aucune mobilisation n'aurait lieu !
La solution réside alors, selon Olson, dans la mise en oeuvre par les organisations d'incitations sélectives : elles font en sorte que les biens obtenus par la lutte soient réservés aux seuls participants. De telles considérations ont conduit à l'adoption de pratiques de closed shop1 ou d'union shop2, encore en vigueur dans certains Etats américains, ou plus largement au développement d'un syndicalisme de services où les organisations fournissent diverses prestations à leurs membres.
Toutefois, contre cette limitation à leur dimension matérielle, plusieurs auteurs ont proposé une conception élargie des motivations militantes, incluant gratifications symboliques (reconnaissance et estime de soi) et affectives, qui incitent les individus non seulement à entrer, mais à rester dans l'organisation. Ces travaux réfutent également l'idée d'un engagement désintéressé qui peut servir à masquer certains profits; ils nuancent aussi la distinction classique entre bénéficiaires immédiats de l'action et "membres par conscience". Au final, il s'agit d'être attentif à la trajectoire biographique des militants pour comprendre leur engagement et son évolution (...)
Igor Martinache, "L'alchimie des conflits sociaux", Alternatives Economiques, n° 294, septembre 2010.
1 Closed shop : système généralement établi par convention entre patronat et syndicat dans lequel l'employeur ne peut embaucher que des salariés syndiqués.
2 Union shop : Pratique syndicale qui oblige l'employeur à n'embaucher que des travailleurs s'engageant à adhérer à un syndicat déterminé une fois embauchés.
Q1. Expliquer - Qu'est-ce qu'un paradoxe ? En quoi l'action collective en constitue-t-elle un selon Mancur Olson ?
Q2. Expliquer et Illustrer - Comment peut-on résoudre le paradoxe de l'action collective ? Donnez des exemples concrets.
Q3. Discuter - Des récompenses matérielles suffisent-elles pour mobiliser les individus ? Pourquoi ?
Q4. Expliquer - Quelles autres motivations peuvent pousser les individus à s'engager dans une action collective ?
Document 2 :
Source : "des conflits du travail plus nombreux et plus diversifiés", DARES, premières synthèses, février 2007
Q5. Décrire : Présentez l'évolution des motifs des conflits en France entre 1996 et 2004.
Document 3 - Les conflits : des luttes pour la défense d'intérêts matériels ou pour la reconnaissance ?
- Est-ce que tout conflit social doit être analysé comme une lutte pour la reconnaissance ?
Ma position sur ce point a évolué au cours de mes recherches. Au départ, mon projet était seulement de critiquer le modèle classique qui analyse les conflits sociaux comme des conflits d'intérêts. Selon ce modèle, vous présupposez des sujets ou des groupes de sujets qui ont certains intérêts prédéfinis, lesquels ne sont pas satisfaits dans les conditions données ; ces sujets luttent donc pour les satisfaire. Or, pour moi, il apparaissait qu'une partie en tout cas des conflits sociaux se comprenaient mieux en faisant intervenir des attentes morales, c'est-à-dire en les expliquant par des sentiments d'honneur bafoué, de mépris ou de déni de reconnaissance. Mais ce contre-modèle ne visait pas à analyser l'ensemble des conflits sociaux dont beaucoup restaient alors selon moi à expliquer comme des conflits d'intérêts. Mais, au fur et à mesure que j'approfondissais la question, j'en suis venu à l'idée que tout conflit est plus ou moins motivé par des convictions morales, parce que certaines revendications légitimes, des demandes de reconnaissance, sont injustement rejetées. Mon idée désormais est donc que tous les types de conflits sociaux, même ceux qui visent la redistribution des biens et qui semblent être purement instrumentaux, doivent être compris comme des conflits normatifs, comme des luttes pour la reconnaissance.
Catherine Halpern, « Les conflits sociaux sont des luttes pour la reconnaissance », entretien avec Axel Honneth, Sciences Humaines, n°172, juin 2006
Q6 Expliquer : En quoi l'attention aux besoins de reconnaissance enrichit-elle la compréhension des conflits sociaux ?
Q7 Discuter : Le sentiment de ne pas être reconnu à sa juste valeur explique-t-il l'ensemble des conflits du travail ?
Q8 Discuter : Faut-il opposer attentes morales et revendications matérielles (une hausse de salaires par exemple) ?
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