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LE CANADA SE CONVERTIT À LA RELANCE BUDGÉTAIRE

LE MONDE ECONOMIE |   Par  

Le premier ministre canadien, Justin Trudeau, aux Nations unies en mars.

Son physique de jeune premier et ses déclarations chaleureuses à l’égard des réfugiés syriens ont fait couler beaucoup d’encre dans les médias internationaux. Mais, mardi 22 mars, c’est son budget 2016 qui a fait la « une » des journaux locaux. Elu en octobre 2015, le premier ministre canadien, Justin Trudeau (libéral, centre gauche), a tenu sa promesse de campagne : convertir son pays à la relance économique.

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Au programme : une série d’investissements et de mesures fiscales favorables aux classes moyennes et à l’environnement. Leur montant devrait s’élever à 11,6 milliards de dollars canadiens (7,85 milliards d’euros) sur l’année fiscale 2016-2017, qui commence le 1er avril. Une enveloppe qui devrait frôler les 15 milliards de dollars canadiens l’année suivante, et gonfler encore après 2018. « Nous commençons à revitaliser l’économie », a déclaré le ministre des finances, Bill Morneau, devant le Parlement, à Ottawa.

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Inspiration keynésienne

Voilà qui rompt avec l’orthodoxie financière des conservateurs canadiens, au pouvoir entre 2006 et 2015. « En moins d’un an, le changement de cap budgétaire de notre pays est radical », résume Douglas Porter, chef économiste de BMO Capital Markets, à Toronto. « Ce plan de relance tranche avec la tendance observée dans les autres pays industrialisés », ajoute Thomas Julien, spécialiste de l’Amérique du Nord chez Natixis. Un constat partagé par Avery Shenfeld, économiste à la banque CIBC : « Le Canada a choisi l’option rejetée par la zone euro, à savoir privilégier l’outil budgétaire pour soutenir l’activité plutôt que la seule arme monétaire. »

Il est vrai que l’économie canadienne, pénalisée par la baisse des cours du pétrole, a besoin d’un coup de pouce. En 2015, le produit intérieur brut (PIB) a crû de 1,2 %, contre 2,4 % en 2014. Le taux de chômage a grimpé de 6,6 % à 7,3 % de la population active entre janvier 2015 et février 2016. Surtout : les perspectives sont moroses. « Le grand risque est que le ralentissement du secteur des hydrocarbures, qui pèse 9 % du PIB, ne contamine le reste de l’économie », estime M. Julien.

Pour l’éviter, le gouvernement a une stratégie claire, d’inspiration keynésienne : augmenter les dépenses publiques pour muscler la croissance future. Pour y parvenir, il compte d’abord « renforcer les classes moyennes ». « Une économie vigoureuse et plus inclusive prend appui sur une classe moyenne forte », peut-on lire dans le document budgétaire.

Les différentes aides financières aux familles seront simplifiées et fondues en une nouvelle allocation aux enfants, dont le montant devrait gonfler jusqu’à 23 000 dollars canadiens par an pour certains foyers. Les contribuables les moins aisés bénéficieront aussi d’une baisse d’impôts de 1,3 milliard de dollars canadiens par an. « Il s’agit d’un virage d’une politique d’offre vers une politique de demande », juge Alexandra Estiot, chez BNP Paribas.

Modeste déficit public

Cette relance passe également par l’investissement dans les infrastructures et l’innovation, juge le gouvernement. Il prévoit ainsi d’injecter 12 milliards de dollars canadiens ces cinq prochaines années dans les grands ouvrages de BTP, les équipements de traitement des eaux usées et la rénovation des écoles. Aussi, 2,9 milliards sur cinq ans seront investis dans la lutte contre le changement climatique. En revanche, M. Trudeau renonce au renouvellement de la flotte des avions de combat et des navires de guerre, évoqué par son prédécesseur.

Le second grand axe du budget est l’aide aux communautés autochtones : 8,4 milliards de dollars canadiens sur cinq ans seront investis dans le logement et l’éducation, entre autres.

Au total, les dépenses publiques devraient gonfler de 7,6 % sur l’année fiscale 2016-2017, tandis que les recettes devraient fondre de 1,2 %. Résultat : le déficit public devrait atteindre 29,4 milliards de dollars canadiens à la fin de la période. « C’est trois fois plus que ce que le premier ministre avait annoncé pendant sa campagne », souligne M. Porter. De fait, le camp des conservateurs s’inquiète du « laisser-aller budgétaire » du médiatique Trudeau.

Selon les économistes, le pays a néanmoins de la marge : le déficit public, qui s’est établi à 0,3 % du PIB seulement sur l’année fiscale 2015-2016, devrait se creuser à 1,5 % sur 2016-2017. Cela reste peu, par exemple, au regard du déficit américain, à 2,5 % du PIB. La dette publique fédérale, elle, devrait passer de 31,2 % à 32,5 % du PIB. Un montant qui dépasse néanmoins les 80 % du PIB si l’on ajoute l’endettement des provinces.

Qu’importe : Ottawa estime qu’en favorisant la croissance ces nouvelles dépenses feront augmenter à terme les recettes fiscales. Selon les calculs de Natixis, le plan de relance devrait gonfler l’activité de 0,3 point de PIB en 2016, puis de 0,9 point en 2017. La croissance canadienne devrait donc frôler les 1,5 % cette année, pour atteindre 2,2 % en 2017.

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28/03/2016
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