5.2. Le rôle de l’intégration monétaire sur l’interdépendance des politiques économiques.
A. La difficile coordination des politiques monétaires et budgétaires dans l'Union Européenne
Les politiques conjoncturelles consiste à utiliser les outils de la politique monétaire et de la politique budgétaire en les combinant dans un policy mix pour agir sur les principaux indicateurs conjoncturels (croissance, inflation, chômage, solde extérieur). Lorsque la croissance de la demande globale ralentit, voire devient négative, l’écart entre la croissance effective et la croissance potentielle se creuse, les pouvoirs publics ont la possibilité de mettre en place une politique budgétaire, une politique monétaire ou bien un mixte des deux, pour soutenir la demande. Dans la zone euro, la politique monétaire est menée par la BCE (banque centrale européenne, accompagnée des banques centrales des États) tandis que les politiques budgétaires relèvent de chaque Etat membres encadré par le PSC. exercice politique conjoncturelle
La politique monétaire de soutien à l’investissement et au système bancaire passe par la baisse du taux d’intérêt et/ou l’injection de liquidités. La BCE a pour seule mission de veiller à la stabilité des prix et ne peux émettre de monnaie pour financer directement les déficit budgétaires des Etats membres. Les Etats ne peuvent donc ni dévaluer leur monnaie ni utiliser le taux d'intérêt pour relancer l'activité. La BCE, ayant pour objectif la stabilité des prix dans la zone réagit aux variations de d'inflation. Plus les taux d’intérêt sont élevés, plus les États membres payent cher pour emprunter l’argent nécessaire au financement du budget. En revanche dès que l'on s'approche de la déflation, la BCE tend à baisser ses taux directeurs, comme elle le fait actuellement.
La politique budgétaire consiste en une utilisation du déficit de l’Etat pour faire jouer le multiplicateur. La dépense publique entraîne une chaîne de réaction positive qui passe par un accroissement de revenu pour les ménages, lequel signifie un accroissement de revenu pour les entreprises, lequel entraîne un accroissement de revenu pour d’autres ménages, à l’infini. Il peut exister des multiplicateurs expansionnistes aussi bien que récessifs. Par exemple, une dépense publique signifie un accroissement de revenu pour des entreprises, donc pour des ménages, donc pour des entreprises, donc pour l’État via l’impôt. Les critères de Maastricht ont imposé aux Etats membres un contrôle de leurs déficits publics (3%du PIB) et de leur déficit ( 60% du PIB) pour éviter que certains pays ne s'endettent trop à bon marché et jouent les passagers clandestins. Le TSCG (Traité de stabilité de coopération et de gouvernance) a renforcé ce dispositif par la règle d'or, en interdisant de dépasser une limite inférieure de déficit structurel à 0,5% de PIB. L’encadrement des politiques budgétaires par le PSC cherche à empêcher que les déficits publics ne nuisent à l'efficacité des politiques monétaires unique et à la stabilité économique d'ensemble de la zone. Cet encadrement des politiques budgétaires a pour but de rendre un policy mix soutenable, en effet si un pays laisse filer son déficit alors que la politique monétaire de la BCE est restrictive, ce pays plus endetté, devra payer plus cher son emprunt du fait de prime de risques plus élevées.
Selon la théorie, les politiques conjoncturelles doivent être combinées : la politique monétaire doit accompagné la politique budgétaire pour augmenter son efficacité, or il n'y a pas de possibilité de mettre en place une politique budgétaire au niveau européen. La difficulté centrale réside dans l'absence d'un budget européen qui empêche la possibilité d'une politique budgétaire commune plus conséquente. Le fédéralisme budgétaire est un mode d’organisation qui transfère les compétences budgétaires des États membres aux institutions communautaires, les résistances nationales à ce fédéralisme ont empêché la constitution d'un véritable budget européen.
Celui-ci ne correspond qu'à 1% du revenu des Etats membres et est affecté en priorité à la politique agricole. Il n'y a pas de possibilité de relance budgétaire européenne. Si certains fonds sont affectés à des ré-allocations régionales, ceux-ci restent aussi insuffisants. De plus, les politiques structurelles nécessaires à la convergence sont limitées, elles comprennent la PAC (politique agricole commune), les politiques industrielles, les politiques de concurrence et la politique sociale européenne. L’UE met aussi en place des politiques de l’enseignement supérieur et de développement régional. Mais ces politiques structurelles de recherche sont en retard par rapport à la stratégie de Lisbonne.
B. La difficile coordination des politiques économiques entre les pays dans l'UEM.
Les premiers pas de l'Union Economique et Monétaire ont abouti à une certaine convergence, l'euro est devenu une monnaie de référence sur le marché des changes. L’euro est une monnaie qui occupe une place importante dans les transactions financières mondiales : au premier rang pour les obligations internationales et au deuxième pour les réserves de change détenues par les banques centrales. Le dollar demeure la première monnaie pour les transactions commerciales. L’influence de l’euro est limitée à la zone intra-européenne et aux pays limitrophes ainsi que l’Afrique francophone. Les taux d'intérêt ont convergé vers le bas et il y a eu convergence des niveaux de vie et des taux d'inflation.
En % du total mondial
|
Euro |
Dollar |
Yen |
Autres |
Part dans les transactions de change 2010 Sur un total de 200%, chaque transaction impliquant deux devises. |
39,1 |
84,9 |
19 |
57 |
Encours (stock de richesses libellé en monnaie ou en devises) d’obligations internationales 2011 |
45,4 |
38,2 |
2,6 |
13,8 |
Encours de prêts bancaires internationaux (hors prêts transfrontaliers européens 2010)
|
14,4 |
52,9 |
3,8 |
28,9
|
Réserves de change Fin 2010. |
26,3 |
61,4 |
3,8 |
8,4 |
Mais l'élargissement de l'Union a fait entrer des pays dont le niveau de développement était faible par rapport à la moyenne de la zone et les écarts se sont objectivement accrus. Par ailleurs, des divergences fortes ont persisté sur les taux de chômage et les taux d'endettement dans l'UEM.
En l’absence de coordination européenne et du fait d'un fort encadrement des politiques macroéconomiques monétaire et budgétaire, les États membres sont dépourvus de moyens pour relancer leur activité. La stratégie du dumping social et fiscal a été la solution non coopérative utilisée pour relancer l’activité dans certains pays. L'Union reste fondamentalement une réunion d’États, et tout ce qui aurait permis d'aller vers plus d'intégration économique et politique – en dehors de la politique libérale de concurrence et de libre circulation – s'est heurté au veto d'un pays ou d'un autre. Le dumping social consiste pour un pays à contenir le coût salarial unitaire pour favoriser les exportations.
Le dumping fiscal consiste à attirer les FMN en leur garantissant un faible taux d'imposition. Les dirigeants européens n'ont jamais voulu harmoniser leurs fiscalité ont mené des stratégie de dumping social et fiscal à la suite des pays d'Europe de l'Est où la protection sociale est faible. L'Allemagne particulièrement, dans les années 2000, après avoir absorbé l'Allemagne de l'est et mené des politiques de déficit important, a mené une politique non coopérative d'austérité. Elle a réduit ses coûts salariaux pour exporter davantage ses produits et donc également son chômage, dans le reste du monde, mais surtout dans le reste de l'Europe.
Les autres pays européens, notamment les pays qui avaient traditionnellement une inflation plus élevée qu'en Allemagne se sont endettés en profitant de taux d'intérêt réels plus faibles. En effet, un seul taux directeur, mais des taux d'inflation différents font que les taux réels ne sont pas les mêmes dans l'UE : ils sont plus forts là où l'inflation est faible, faibles là où l'inflation est forte, il aurait fallu plutôt l'inverse. Le crédit a financé des bulles immobilières, la consommation des ménages, les importations, l'inflation... ce qui a provoqué un endettement privé et des déséquilibres extérieurs pour le reste de la zone. Les autres économies ont perdu en compétitivité par rapport à l'Allemagne, mais aussi par rapport au reste du monde, du fait de l'appréciation de l'euro. Cela s'est aussi traduit par une relative désindustrialisation des autres pays au profit de l'Allemagne et des pays émergents.
C. La crise financière de 2008-2009 a contribué à accentuer les disparités économiques entre pays partenaires tout en avivant les tensions.
La crise financière de 2008-09 a exacerbé les tensions au sein de la zone euro et a abouti à la crise de la dette. L'éclatement des bulles financières et immobilières ont contraint les Etats à soutenir massivement les banques. Des plans de relance ont été mis en place dans chaque pays entrainant des déficits publics importants et les dettes publiques se sont creusées.
Lors d’une phase de crise, les stabilisateurs automatiques dégradent les finances publiques : les recettes diminuent (moins d’activité, donc moins de prélèvements) et les dépenses augmentent (augmentation des allocations versées).
La BCE a, contrairement à la FED maintenu des taux d'intérêt assez élevé pour éviter l'inflation.
L’augmentation de la dette publique a diminué la solvabilité des Etats, les agences de notation ont dégradé la note des pays les plus endettés. Les marchés financiers ont spéculé sur la sortie de l'Euro de certains pays (Grèce, Irlande, Espagne, Portugal) qui ont dû payer des primes de risques pour financer leur endettement, ce qui accru l'effet boule de neige de l'endettement.
Les crises d'endettement privées sont devenus des crises d'endettement public, les États se sont heurtés aux critères de Maastricht et ont dû appliquer, sous la houlette du FMI et la BCE à partir de 2010, des politiques d'austérité qui ont aggravé la crise. Ces politiques ont empêché la reprise et fait exploser le chômage d'une manière inégale en Europe.
Cette crise a révélé le fait que la zone euro n’est pas une ZMO, le choc économique symétrique a produit des divergences du fait de la trop grande hétérogénéité des situations. L'adaptation par la déflation salariale et sociale dans les pays les plus fragiles s'est traduit par la montée en puissance de partis radicaux (Siriza, Podémos) qui refusent cet ajustement par les salaires et les coupes dans les finances publiques.
1. Quelles sont les causes de la dégradation de la note de la dette de la Grèce ?
2. Quelles sont les premières mesures d'austérité mises en place ?
3. Quelles ont été les réactions au niveau européen ?
4. Pourquoi selon vous la situation ne s'est elle pas améliorée en dépit des plans d'austérité ?
5. Quelle a été la stratégie de Syrisa ? A t-elle réussi ?
D. Les perspectives de sortie de crise ?
Face à la déroute des banques, puis à la crise de la dette de certains États, un Mécanisme Européen de Stabilité Financière (MESF) a été créé malgré les résistances de l'Allemagne. Ce fond de 700 milliards, conditionné par le respect du pacte budgétaire européen « règle d'or budgétaire » ne permet pas d'agir par le budget en cas de crise. Le suivi européen des banques a été renforcé sur le papier (union bancaire) mais depuis les années 1980 au moins, la législation a toujours été en retard sur les innovations financières du fait d'un lobbying important du système bancaire. La BCE, contre ses principes a mené une politique de quantitative easing, et a injecté 1000 miliards d'euros dans le système financier qui n'a cependant pas eu d'effet sur l'économie réelle (trappe monétaire) mais a seulement permis aux banques d'accumuler des profits et d'alimenter à nouveau la spéculation.
1. En quoi une injection de liquidités par la Banque centrale a t-elle des effets négatifs ?
2. Quels sont les objectifs de la BCE ?
3. Qu'est ce que la monétisation de la dette ? Quels en sont les risques ?
4. Les statuts de la BCE doivent-ils s'approcher de ceux de la FED ?
Le FMI a reconnu qu'il avait sous-estimé les effets dépressifs de la politique d'austérité qu'il a soutenu sans pour autant la remettre en cause, comme les récentes négociations avec la Grèce l'ont illustré abondamment. La commission européenne a décidé un plan de relance de 315 milliards et a admis qu'il fallait assouplir le pacte de stabilité et de croissance. L'Europe va t-elle réussir à éviter la déflation ?
1. Qu'est ce que la déflation ?
2. Les effets à court terme de la déflation s'opposent-ils aux effets à long terme ?
3. Quels sont les effets à long terme de la déflation ?
4. Quelles sont les solutions à une crise déflationniste ?
5. Pourquoi cette mesure n'a t-elle pas réussi au Japon ?
Q1. Définir politique monétaire, politique budgétaire, policy mix, règle d’or,
Q2. Pourquoi n’y a-t-il pas de possibilité de mettre en place une politique budgétaire européenne ?
Q3. Quels sont les points de convergence en Europe, les points de divergences ?
Q4. L’Allemagne a-t-elle mené une stratégie coopérative ? Pourquoi ?
Q5. Quelles ont été les conséquences de la stratégie Allemande ?
Q6. Faire le schéma de la crise de la dette : crise financière, soutien des banques, plans de relance, déficits publics, stabilisateurs automatiques, augmentation des dettes, dégradation de la note de certains pays, spéculation sur la sortie de l’Euro, augmentation de la prime de risque, effet boule de neige, risque de sortie de l’Euro
Q7. Pourquoi le quantitative easing ne marche t-il pas ?
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