cours première
exposés sur marchés imparfaits
- Présenter le marché du forfait de la téléphonie mobile
A Etat du marché
B Evolution récente
2. Présenter le marché des téléphones mobiles
A. Etat du marché
B. Evolution récente
dossier exposés sur la marchandisation
Exposé 1 Jusqu'où peut aller la marchandisation des loisirs ?
doc 1. Je ne crois pas qu'on crée de nouveaux besoins mais on en marchandise de plus en plus. Les loisirs sont le meilleur exemple: c'est un besoin ancestral qu'on commercialise et dont on démultiplie la satisfaction.
Pour le producteur, cela se passe par l'innovation, avec Gilbert Trigano inventant le Club Med par exemple.
Le consommateur, lui, veut à la fois profiter de toutes les satisfactions offertes par le marché et protéger une sorte d'espace privé dans lequel le marché ne rentre pas. Il faut alors déplacer la frontière entre les deux au détriment de la sphère privée. Cela se fait surtout par le renouvellement des générations. Les jeunes acceptent plus facilement qu'un certain nombre de besoins soient "marchandisés". Ainsi pour nos grands-mères, payer quelqu'un pour garder ses enfants était inenvisageable. Elles estimaient que ce problème relevait du domaine privé. Aujourd'hui, tout le monde demande des structures d'accueil. Ce choc culturel se reproduit de générations en générations.
Robert Rochefort, Le Monde, 6 Juillet 1994.
Doc 1 bis front de gauche contre la marchadisation des promenades
Exposé 2 En quoi l'analyse de G.Becker permet de penser la marchandisation des échanges ?
doc 2 . le marché explique tous les rapports humains
L'analyse est ici concentrée sur les problèmes de la division du travail et sur la nature du contrat de mariage. Pour Becker, le contrat de mariage est un contrat par lequel la femme s'engage à mettre au monde et élever des enfants en échange de protection et "d'assurance". D'autre part il se montre sceptique quant au rôle de la religion et de l'idéologie comme facteurs de passage de la polygamie à la monogamie dans de nombreuses sociétés. Il préfère les explications fondées sur la technologie de la production et sur les prix fictifs. Dans le même ordre d'idées, il cite "l'union bien assortie" et la question de savoir si des hommes de "haute qualité", c'est à dire hautement productifs épouseront des femmes de "haute " ou de "basse qualité"; il parle dans le premier cas "d'union positive". Une union positive est optimale quand les apports en main d'œuvre des deux époux sont techniquement complémentaires dans la production. L'analyse de la demande d'enfants met l'accent sur l'interaction entre la quantité et la qualité de ceux-ci, par exemple, le nombre d'enfants par famille, dans les sociétés industrielles, semble diminuer en même temps que les revenus augmentent.
A. Sandmo, "Gary's Becker's contribution to Economics", problèmes économiques n°2339, Sept 1993
Exposé 3 Comment le marché des organes est-il régulé ?
Doc 3
La société n'accepte pas la vente d'organes. A la différence de ce qui se passe pour le sang, le commerce d'organes est généralement interdit, même s'il se pratique dans les faits, même s'il existe un marché noir. On trouve en Inde un marché ouvert de reins, et même d'yeux de donneurs vivants. Les personnes fortunées viennent du monde entier pour acheter. On sait qu'il existe en Amérique Latine des filières organisées qui procèdent à des enlèvements pour alimenter en organes les riches marchés occidentaux. Qui renoncerait à tout faire pour permettre à un proche, à un parent, de garder la vie sauve? Or il y a pénurie d'organes. Comment obtenir et comment répartir ces organes dont la greffe coûte si cher?
Les pays anglo-saxons sont tentés par la légalisation de la vente. Et une telle légalisation paraît hautement souhaitable à nombre représentants des pays du tiers-monde, qui ne voient pas au nom de quoi on interdirait aux pauvres de remédier à leur misère matérielle et d'assurer l'avenir de leurs enfants en vendant un rein ou un œil. Un rein vendu 45 000 dollars aux Etats-Unis est acheté par le truchement de petites annonces 2 000 dollars à des vendeurs argentins.
Pourquoi pas, estiment les auteurs d'inspiration libérale, si les contrats sont légaux et si vendeurs et acheteurs sont clairement informés des implications de la transaction? (...)
Si le maître-mot des juristes anglo-saxons est le contrat, celui des juristes et des autorités de la bioéthique françaises serait le don. Jacques Godbout, L'Esprit du don, La Découverte, 1992.
doc 3 bis sciences humaines : marché d'organes
Exposé 4. L'éducation est elle une marchandise ?
doc 4 Salon de l'Education, marchandisation, mardi 29 juillet 2003
« Le 10ème Salon de l'Education se déroulera en octobre prochain à Namur. Et figurez-vous que l'Aped est invitée. Si si une place est prévue pour les associations au côté des « professionnels » (éditeurs, écoles, organisateurs de voyages scolaires, etc). Cette invitation a du bon car elle nous permet de prendre connaissance du fascicule envoyé à tous les participants potentiels. Pourquoi venir au Salon comme exposant ? « Notre organisation est rodée aux difficultés de démarcher ce secteur et s'occupe de tous les détails pour vous faire rencontre votre cible dans les meilleures conditions » répondent les organisateurs. Pas convaincu ? Pourtant « le premier pas est fait : les professionnels de l'enseignement sont au Salon, face à vous, ce qui vous offre la possibilité de les mettre en contact direct avec vos produits, d'apprendre à mieux les connaître, d'étudier leurs réactions par rapport à vos nouveautés, de leurs présenter vos produits et services plus classiques. Ne laissez pas passer cette opportunité de rencontrer votre cible ». On hésite encore un peu ... Pourtant, le budget communication du Salon devrait avoisiner les 150.000 euro. Impossible donc de passer à côté. »
http://www.ecoledemocratique.org/breve.php3?id_breve=66
doc 5 L'école, grand marché du XXIe siècle, Le Monde Diplomatique, juin 1998
MILLE milliards de dollars, tel est, selon l'OCDE, le montant des dépenses annuelles de ses Etats membres en faveur de l'enseignement. Un tel « marché » est activement convoité. Quatre millions d'enseignants, 80 millions d'élèves et étudiants, 320 000 établissements scolaires (dont 5 000 universités et écoles supérieures de l'Union européenne) sont à présent dans la ligne de mire des marchands. Mais il faudra beaucoup d'efforts pour faire appliquer ces textes et rapports, qui demanderaient un démantèlement de l'essentiel du service public de l'enseignement.
En janvier 1989, la Table ronde européenne des industriels, le puissant groupe de pression patronal auprès de la Commission européenne, publie un rapport intitulé Education et compétence en Europe. Elle y affirme d'emblée que « l'éducation et la formation [...] sont considérées comme des investissements stratégiques vitaux pour la réussite future de l'entreprise ». Puis elle déplore que « l'enseignement et la formation [soient] toujours considérés par les gouvernements et les décideurs comme une affaire intérieure. [...] L'industrie n'a qu'une très faible influence sur les programmes enseignés ».
D'autant plus faible, en vérité, que les enseignants auraient « une compréhension insuffisante de l'environnement économique, des affaires et de la notion de profit ». La conclusion s'impose : industrie et établissements d'enseignement devraient travailler « ensemble au développement de programmes d'enseignement », notamment grâce à « l'apprentissage à distance », « l'enseignement à distance » et la mise au point de « didacticiels » (logiciels d'apprentissage sur ordinateur).
Regroupant notamment les grands patrons des principaux constructeurs informatiques européens, l'ERT cherche alors des marchés. La perspective de la libéralisation du secteur des télécommunications promet de fabuleux profits au secteur privé, non seulement par la vente de matériels et de logiciels, mais aussi par l'exploitation des entreprises de téléphone privatisées en tout ou en partie. Promouvoir ou imposer l'enseignement à distance permet d'espérer bénéficier à la fois de la croissance du volume des communications téléphoniques, de celle de la vente de matériels et de celle, non moins importante, des droits d'auteur et droits voisins sur la commercialisation et l'exploitation de didacticiels. L'ensemble de cette stratégie doit déboucher sur une meilleure adéquation de l'enseignement aux exigences de l'industrie, une préparation au télétravail, une réduction des coûts de formation en entreprise et une atomisation des étudiants et des enseignants, dont les éventuelles turbulences sont toujours redoutées. […]
GÉRARD DE SÉLYS, Journaliste, auteur de « Privé de public. A qui profitent les privatisations » EPO, Bruxelles
Document 6 : Les marques s'imposent dans les cartables à la rentrée des classes
LE MONDE | 01.09.03 | 13h27
Cartables Titeuf, trousses Chipie, agenda M.Dia, classeur Star Academy, plus que jamais la panoplie des élèves qui retrouvent, mardi 2 septembre, le chemin de l'école se transforme en un véritable défilé de marques. La publicité pour l'enseigne Carrefour, diffusée sur les écrans de cinéma en cette période de rentrée scolaire, est à ce titre éloquente.
Dans ce spot, trois garçons assis dans une salle de classe comparent leur agenda. Le premier arbore Titeuf en couverture, le deuxième Astérix, quant au troisième, il n'a rien de tel à montrer, ayant un agenda désespérément neutre, mais il se rattrape en exhibant à l'intérieur la liste des numéros de téléphone de ses copines. Une voix off conclut alors en conseillant aux parents de ne pas frustrer leurs enfants et de leur acheter le dernier agenda à la mode.
Difficile pour les parents d'échapper à ce matraquage marketing. D'autant que dans les rayons papeterie, la place des produits sous licence ne fait que croître. Carrefour reconnaît avoir référencé 20 % de produits sous licence en plus pour la rentrée 2003. Des produits qui occupent aujourd'hui près de 80 % des linéaires, au détriment des produits sans marque ou sous marque distributeurs.[…]
Laurence Girard
Doc 7 : « L’extension de la sphère de la marchandise : l’exemple de l’école ».
Depuis quelques années, les marques éditent et proposent aux enseignants des supports pédagogiques destinés à les aider à animer des ateliers en classe (…) les annonceurs ont en effet décidé de s’associer à l’éducation des 12 500 000 enfants scolarisés en France, perçus comme autant de futurs consommateurs et qui, en attendant, détiennent un pouvoir de prescription (…) Et puis, chacun sait que la plupart des habitudes de consommation s’acquièrent dès l’enfance. Les entreprises cherchent donc, comme aux Etats-Unis, à construire leur image dès le plus jeune âge (…) Pour communiquer avec des cibles aussi convoitées, les entreprises se tournent vers l’école, la classe et son instituteur. Colgate apprend aux enfants à se brosser les dents, Nett les informe sur le corps humain, Kellog’s et Heudebert les initient à l’équilibre alimentaire, Danone à « l’alimentation plaisir », Liebig aux bienfaits des légumes, Michelin à la sécurité dans la rue, Coca-Cola à la « découverte de l’entreprise », Leclerc ou la Caisse d’Epargne aux mystères de l’euro. Le tout à grand renfort d’outils luxueux, de cassettes vidéo, de fiches, tests, livrets et autres jeux, accompagnés d’un guide pour l’enseignant, voire d’un cédérom (…) La démarche désintéressée des entreprises leur coûte assez cher : elles peuvent dépenser jusqu’à 3 millions de francs pour fabriquer un coffret ou un kit. Est-il interdit d’imaginer qu’elles espèrent un retour sur investissement ?
L. Brokman, Le Monde Diplomatique, octobre 1999.
Exposé 5. Comment le vivant est-il devenu une marchandise ?
Document 8 : « Biotechnologies : la ruée vers le génome » par Daniel ARONSSOHN.
[…] La brevetabilité des gènes en question
Au printemps dernier, c'est la brevetabilité des gènes, ces supports de l'information héréditaire des êtres vivants, qui avait soulevé la polémique. Grâce à ces brevets, les firmes s'assurent en principe les droits sur toute application dérivée à partir du gène qu'elles ont découvert. La pratique existe dans tous les pays industrialisés depuis les années 80. Elle aurait dû être légalisée en France au mois de juillet dernier par la transposition d'une directive européenne+ de 1998. Mais celle-ci s'est heurtée à l'avis négatif du Comité national consultatif d'éthique et du Conseil d'Etat. Une pétition contre la directive de Bruxelles a recueilli plus de 3 000 signatures, dont celles de personnalités aussi diverses que l'Ordre national des médecins, Greenpeace, plusieurs généticiens comme Albert Jacquard, la Confédération paysanne de José Bové, mais aussi Corinne Lepage et Danielle Mitterrand.
" Le génome humain ne doit pas pouvoir faire l'objet d'une appropriation ", avait affirmé Jacques Chirac dès février dernier, et l'accord avec Lionel Jospin est total sur ce point. Le président américain Bill Clinton et le Premier ministre britannique Tony Blair ont aussi pris solennellement position, le 14 avril dernier, pour la mise à disposition dans le domaine public des résultats du décryptage du génome humain. Un pas important, quoique non dépourvu de limites et d'ambiguïtés.[…] Alternatives Economique n°184, 09/2000.
Document 19 : « Le brevetage du vivant »,
[…] Jeremy Rifkins note dans un entretien paru dans le Nouvel Observateur n°1757 que: « La course à l’identification et au contrôle commercial des gènes qui constituent le « schéma directeur » de l’espèce humaine est lancé. Et les opinions publiques risquent d’être sous le choc lorsqu’elles constateront, dans six ou sept ans, que ces molécules, ces gènes permettent de traiter les cancers, de prolonger la vie humaine ou de produire un nouveau type de plante ou de nourriture, sont la propriété de quelques grandes compagnies privées et sous leur contrôle commercial.... Cette volonté de breveter la vie, qui menace les réserves génétiques de la planète, est en effet inquiétante....
En autorisant le brevetage de micro-organismes génétiquement modifiés, c’est à dire d’une première forme de vie, la Cour Suprême a jeté à son tour en 1980 les fondations juridiques de la privatisation et de la transformation en marchandise des « communaux génétiques ». Propulsées dans la sphère économique, les biotechnologies sont devenues brutalement un des boosters de la société post-industrielle.... Autant je conçois que l’on autorise le brevetage des procédés, dans une logique de rémunération des dépenses de recherche et d’exploitation, autant la reconnaissance de brevets sur le vivant ( comme le Congrès pourrait l’accepter en assimilant la « découverte » de nouvelles cellules à des inventions protégées par le droit sur la propriété intellectuelle ) représente un risque majeur.
La quête de gènes commercialisables et des droits génétiques dérivés, les bio-prospections animales et végétales, avec à la clé le brevetage du vivant (tissus, cellules, chromosomes, bactéries), la course aux brevets sur le génome humain réduit à un produit négociable sur le marché sont porteurs de conflits « néo-coloniaux » entre entreprises et individus ou groupes sociaux, sur la base de cellules détournées à des fins commerciales ou soustraites à une liberté de circulation génératrice de progrès. L’enjeu éthique se double d’un enjeu économique. » […]
http://ase.ouvaton.org/ogmbrevetageviv.htm
Exposé 6. Quels sont les dimensions de la marchandisation de la famille ?
Document 9 : L’exemple de la garde d’enfants (Hatier 1ère page 190)
En 1999, 43% des ménages ayant un enfant de moins de trois ans recourent à au moins une aide rémunérée pour faire garder leurs enfants [contre 35% en 1996]. Le recours aux services de garde payante n’a cessé de croître au cours des quinze dernières années, dans un contexte de développement des dispositifs publics d’aide à la garde des enfants ne bas âge. […] La façon dont les ménages décident de faire garder leurs enfants ne peut s’analyser indépendamment des décisions d’offre de travail des membres du ménage. Le choix du mode de garde est en effet le résultat d’un arbitrage complexe [entre] de nombreux critères : les coûts financiers de l’inactivité et des divers modes de garde, les préférences des parents pour le travail, le loisir et la qualité des soins dispensés à leurs enfants, l’offre de services dans un voisinage proche
[…] L’(aide informelle, à savoir celle sui est déclarée gratuite par les ménages […] concerne prés d’un quart des ménages.[…] Cette aide gratuite est principalement offerte par des membres de la famille, et dans une moindre mesure par des voisins ou amis.
Anne Flippo et Béatrice Sédillot, Portrait social 2000-2001, INSEE, 2000.
Document 10 : Le marché des cœurs (Magnard 1ère, page 245)
[…] Les clients des cabinets de courtage matrimoniale […] seraient, chaque année, environ 100000 à débourser entre 7000 et 15000 F (1000 et 2300 euros), en moyenne, pour passer contrat avec l’une des 900 agences dont le but est d’(organiser des rencontres en vue de la réalisation d’un mariage ou d’une union stable. Cependant, malgré les taux de réussite souvent mirifiques affichés par les professionnels, le bonheur n’est pas toujours au rendez-vous.[…]
C. Helfter, Le Monde, 26/04/2000.
Document 11 : Le financement des retraites : le retour du marché ? (Magnard 1ère, page 246)
La répartition a un dé »faut majeur aux yeux des compagnies d’assurance : cogérées par les partenaires sociaux, elle ne leur rapporte pratiquement rien. C’est pourquoi elles plaident pour le développement de fonds de pension, nouveau nom donné aux retraites par capitalisation. La capitalisation consiste à faire accumuler par chacun des actifs financiers gérés par les assureurs. Les pensions sont fondées sur les revenus ou sur la revente du capital ainsi accumulé. Alternatives Economiques, n°144, janvier 1997.
Document 12 : Economie domestique et logique marchande (Hachette 1ère, page 198)
En trente ans, les familles ont […] vu changer considérablement non seulement leur univers domestique et les conditions d’accomplissement du travail ménager, mais aussi celles du travail lié au soin et à la socialisation de leurs membres. […] Les tâches ménagères ont été transformées par la mise au point et l’utilisation de plus en plus fréquentes de produits et de matières « modernes » et par l’externalisation partielle, vers les services marchands ou collectifs de certaines tâches, comme la confection des vêtements, la préparation et le service des repas. […] Ce n’est pas seulement le travail ménager qui s’est trouvé de plus en plus « externalisé », mais aussi bine le travail de soin aux personnes dépendantes en raison de leur âge ou de leur état de santé, auparavant effectué gratuitement par les femmes dans le cadre domestique. Plus généralement, l’ensemble du travail d’entretien et de socialisation de la population est devenu « une affaire publique », à travers le marché ou l’Etat, par le développement des prestations, des services et des équipements liés à l’éducation, à la santé et à la vieillesse.
N. Lefaucheur, « De la stabilité à la mobilité conjugale », Politis n°8, 11-12/1994.
Exposé 7. Qu'est ce que la grande transformation selon K.Polanyi ?
Document 13 : Extrait de Michel Beaud, « Le basculement du monde », 1997, La Découverte Poche.
P107. et suivante : « La nouvelle fatalité économique : Alors que ce que l’on nomme aujourd’hui « économie » a été pendant des millénaires la servante des sociétés, les sociétés sont, depuis quelques décennies, de plus en plus soumises à l’économie. Cette nouvelle situation s’enracine dans trois processus : l’extension du champ des activités marchandes, l’emprise croissante du capitalisme et la mondialisation de l’économie. Ces trois processus sont à la fois distincts et difficilement dissociables. Les activités marchandes sont présentes dans nos sociétés depuis des millénaires. Elles ont atteint une forte intensité dans plusieurs grandes civilisations précapitalistes (Chine, Inde, monde arabo-musulman…). Terreau de la naissance du capitalisme en Europe occidentale, elles ont, avec son développement, connu un puissant et vigoureux essor qu’a accompagné la monétarisation de plus en plus marquée des sociétés. Dans son analyse de la « grande transformation » des sociétés occidentales, Karl Polanyi dégage avec clairvoyance le changement de rapport entre économie et société qui accompagne l’entrée dans l’ère de ce qu’il nomme l’ « économie de marché ». Selon lui, une fois les sociétés traditionnelles disloquées par la généralisation du « marché autorégulateur » et son extension, au-delà des marchandises produites, à la terre, au travail et à l’argent, « la société est gérée en tant qu’auxiliaire du marché. Au lieu que l’économie soi encastrée dans les relations sociales, ce sont les relations sociales qui sont encastrées dans le système économique » (p.21), le marché autorégulateur réduit les relations humaines et sociales à des relations d’argent ».
P.141 et suivantes : « Le règne de la marchandise : Un enfant et son père se promènent dans la campagne. Soudain l’enfant s’arrête inquiet et demande : « dis papa, à qui on paie ? » Parcs de loisirs, pistes de ski de fond à péage, plages payantes, … de moins en moins d’activités de plein air échappent à l’argent. L’eau de la fontaine était gratuite. Dans les villes, des porteurs d’eau en vendirent, assez tôt, la livraison. Aujourd’hui, la production de l’eau potable est devenue une activité économique à part entière : l’eau du robinet est payante parce qu’elle est devenue une marchandise produite. Et la vente (en bouteilles, bonbonnes ou « fontaines » pour les collectivités) des eaux minérales ou « de source » progresse dans tous les archipels d’opulence de notre monde ; tandis que, dans nombre de bidonvilles, le contrôle d’un robinet d’eau douteuse est occasion de racket. En même temps, le tourisme moderne et certaines formes d’irrigation gaspillent l’eau. Certaines firmes, certains Etats n’en ont cure, au grand dam des populations qui voient se raréfier ce bien essentiel entre tous. Mais qui, dans les villages ou les bidonvilles d’Asie du sud, du Moyen-Orient, de la corne de l’Afrique ou du Sahel, aura pu lire cette annonce : « EAU : sept millions de tonnes d’eau douce par an à exporter par tankers. Pays, villes ou entreprises cherchant à mettre en place une offre d’eau douce potable, contactez…. » Peu importe d’ailleurs, elle ne leur était pas destinée. Une évolution semblable a commencé pour l’air. Installations permettant, dans les villes, d’obtenir un air purifié ; constructions de plus en plus nombreuses impliquant l’air conditionné ; projets de « cités artificielles » que préfigurent quelques prototypes : insidieusement se met en place l’air marchandise. Dans le centre de Mexico, des inhalateurs d’oxygène ont déjà été installés : un dollars pour quelques bouffées.[…] Prenons la santé : apparemment, il a toujours fallu payer médecins et apothicaires ; en profondeur, tout a changé. […] Un centre médico-chirurgical de la région parisienne a récemment mis en place un système précis et exhaustif de comptabilité analytique. Ce système a permis de faire apparaître le coût très élevé des soins donnés à une catégorie de malades, ceux atteints d’un cancer de l’œsophage en phase terminale : « Après mure réflexion, nous avons décidé de ne plus accueillir systématiquement ces malades, sachant qu’ils pourraient être soignés ailleurs… », déclare un responsable du centre (Le monde 30/12/1993).[…] en Inde, le nombre des transplantations de reins recensées est passé de 60 en 1983 à 500 en 1988 et 40000 en 1994 . A Bombay, la greffe d’un rein était facturée au receveur cent mille francs en 1994, alors que le « donneur » était payé deux cents francs. (Transit Arte 4/4/1995). Des trafics ont été dénoncés : d’yeux de morts des guerres yougoslaves, à travers des officines italiennes ; de cornées et d’organes, à partir d’hôpitaux et d’hospices latino-américains et d’officines spécialisées d’Asie. Après la prostitution, la drogue et les armes, le crime organisé, dans la diversité de son foisonnement contemporain, semblerait avoir trouvé là de nouveaux et lucratifs marchés. Quelques organismes internationaux ont commencé à s’inquiéter. Comme l’avait annoncé Marx il y a prés d’un siècle et demi, le règne de la marchandise s’élargit et se renforce ; mais ce n’est pas seulement à travers la multiplication et l’ « amoncellement » des marchandises matérielles, comme on pouvait le pressentir au XIXème siècle et comme on a pu l’observer au XXème, avec la société de consommation. C’est aussi à travers la conception de marchandises les plus diverses (des plus essentielles aux plus futiles) avec l’appui de la technoscience et dans la perspective de trouver un accueil favorable de pouvoirs d’achats disponibles. Si l’on observe le processus en prenant du recul, c’est, par-delà l’élargissement et le renouveau des différents domaines de consommation, la marchandisation des différents moments de la vie des hommes, des diverses fonctions des sociétés et de plusieurs aspects de la reproduction de la Terre, qui deviennent les occasions d’un foisonnement de nouvelles marchandises. En bref : la marchandisation de l’homme, des société et de la Terre ».
Exposé 8. La marchandisation de l'air est t-elle efficace ?
Document 10 : Le marché des droits à polluer
C'est une première aux Etats-Unis: La TVA ,une des principales compagnies américaines d'électricité, a racheté à WPL, une firme concurrente, des "droits de polluer". La transaction va permettre à la TVA de rejeter dans l'atmosphère 10 000 tonnes de Dioxine de sulfure (responsable des pluies acides). En contre partie, WPL devra réduire le niveau de ses émissions de 10 000 tonnes en dessous du niveau légal, ce qu'elle fera sans peine, la compagnie s'étant dotée d'équipements antipollution de pointe.
Cette curieuse pratique est une conséquence du Clean Air Act, la loi de protection de l'environnement adoptée aux Etats-Unis en 1990.(elle autorise les entreprises polluant moins que le maximum légal à céder leurs "crédits" antipollution à des firmes moins bien placées)
Le prix de la transaction ,jugé relativement bas, est ici peu incitatif pour investir dans les équipements anti-pollution. D'où les critiques:" la pureté de l'air ne peut être vendue comme une voiture d'occasion"
Le Monde, 14 Mai 1992
doc 10 bis le marché des droits à polluer a du plomb dans l'aile
dossier 6.3. Comment les réseaux sociaux fonctionnent-ils ?
Dossier 6.3. Comment les réseaux sociaux fonctionnent-ils ?
prezzi réseau social
A. Combien d’amis avons-nous dans le lycée ?
Combien « d’amis » avez-vous sur Facebook ? Ou de suiveurs sur Twitter ? A combien de personnes, vous ou vos parents, peuvent-ils téléphoner pour trouver un job d’été ? Quelle est la nature des liens que nous entretenons avec notre famille, nos voisins, nos professeurs, etc. ?
Un réseau social est « un ensemble de relations entre un ensemble d’acteurs » (Michel Forsé). Ce concept inclut les réseaux sociaux numériques qui l'ont popularisé mais il est plus large dans la mesure où il englobe toutes les formes d'interdépendance. Pour le sociologue allemand Georg Simmel (1858-1918), la société est « constituée d’êtres qui souhaitent établir exclusivement entre eux des actions réciproques ».
Ainsi, les individus ne se caractérisent pas seulement par leurs appartenances à des groupes sociaux (sexe, âge, statut, groupe socioprofessionnel, lieux de résidence, nationalité, etc.) mais aussi par des relations. Le concept de « réseau social » permet donc de décrire et d’expliquer ces interactions sociales ou actions réciproques entre les individus et leurs régularités. La sociabilité est définie comme une aptitude à engager des relations sociales avec autrui, mais pour le sociologue, c’est l’ensemble des relations qu’un individu (ou un groupe) entretient avec d’autres. La sociabilité est l’expression élémentaire du lien social, c’est aussi une des mesures de l’intégration sociale.
B. les réseaux sociaux en ligne constituent de nouvelles formes de coordination et de sociabilité
La sociabilité est une propension à développer et à entretenir des relations avec autrui. Ces relations dépassent les interactions car elles se répètent, perdurent et acquièrent une histoire, s’inscrivent dans le temps ; elles deviennent singulières dans la mesure où les acteurs ne sont plus substituables.
On peut distinguer différentes formes de sociabilité :
· la sociabilité formelle est le résultat d’une organisation préalable
· la sociabilité informelle émerge plus spontanément des interactions.
Les relations professionnelles et les pratiques associatives relèvent de la sociabilité formelle ; les rencontres et discussions entre d’amis correspondent à la sociabilité informelle. On peut aussi mettre l’accent sur le caractère collectif ou individuel de la sociabilité. Mark Granovetter propose de différencier les relations de sociabilité par la force du lien, c’est-à-dire de l’intensité ou de la qualité des relations interpersonnelles. On peut encore opposer des relations de proximité (géographique, sociales, ethniques, affinitaires) ou d’éloignement. La sociabilité peut être « contrainte » ou obligatoire, affinitaire ou élective. Les liens forts sont des liens plus intimes où la sociabilité informelle joue un rôle important, en particulier les liens familiaux et amicaux. Les liens faibles sont des liens plus distendus reposant davantage sur une sociabilité formelle.
La représentation graphique des relations (ou graphes) est un outil qui permet de mettre en exergue des structures sociales et les configurations. Les graphiques proposés sont formés de la combinaison de deux éléments : les sommets et les arcs. La dyade désigne la relation entre deux unités. C’est la figure la plus simple de l’interaction. La triade est l’unité pertinente de l’analyse des réseaux. Cette forme permet de comprendre que le réseau sépare et relie à la fois.
L’analyse empirique des pratiques de sociabilité, notamment celles donnant lieu à des conversations par enquêtes permet de mesurer le temps et le nombre de contacts liés aux différentes formes de sociabilité (visites familiales, fréquentation des cafés, pratique d’une activité associative, communication téléphonique, etc.). Les études distinguent souvent six ensembles de relations concrètes entre les individus : la parenté, les amis, les voisins, les relations de travail, les relations de services et enfin l’ensemble des autres relations (vie associative, pratiques religieuses, rencontres d’inconnus).
Le développement des réseaux techniques (téléphone, accès à Internet) a permis l'avènement d'un lien numérique sur les réseaux sociaux en ligne : Copains d’avant, Facebook, Linked In, Myspace, Trombi, Viadeo, … Ces sites Internet ont des particularités différentes mais partagent tous la même finalité : mettre leurs membres en relation. Ces services de réseautage social invitent repenser le sens des mots « amis » ou « contacts » et, plus largement, les relations sociales lorsque les liens augmentent de façon exponentielle. Viadéo, par exemple, indique à ses membres ses contacts directs et ses contacts indirects. Une personne ayant 20 contacts directs peut avoir 300 contacts de second niveau et 10000 contacts de 3ème niveau …
Ce lien numérique permet la mise en place de nouvelles formes de coopérations productives ( blog, forum, mooc, sites de campagnes de candidats, vidéo etc. ) ainsi que de nouvelles pratiques politiques (cyberactivisme, cybercitoyenneté, cybermobilisation, cyberprotestation). Les réseaux numériques sont mobilisés pour véhiculer les messages électoraux, soulever des fonds, mobiliser le jour du vote, étayant les utopies d’une « cyberdémocratie » ou d’une « e-democracy ».Ils ont été très actifs pendant la campagne présidentielle française de 2007 et américaine de 2008. Ils ont été au cœur des révolutions dans le monde arabe en 2011.
Le développement du lien numérique modifie les oppositions traditionnelles entre sociabilité privée (intime, familiale et amicale) et sociabilité publique (tournée vers l’extérieur) et amplifie les possibilités d'appartenance multiples des individus. Certaines études insistent sur les dimensions pathologiques de ce lien ( désocialisation, réification, enfermement sur les communautés, amplification des rumeurs etc.
B. Comment trouver un emploi ?
Q1. Quelle fonction sociale peut avoir les concours de dégustation de vin ?
Q2. Comment le réseau social de la famille est-il activé lors du week end des jardiniers ?
"Le capital humain se situe dans les points et le capital social dans les lignes qui relient les points". Coleman
Le capital social est l’ensemble des ressources que mobilisent les individus grâce aux réseaux de relations dont il dispose. La mobilisation de connaissances (parents, amis, collègues de travail, voisins, etc.) est souvent nécessaire pour obtenir un emploi stable, voire pour un emploi saisonnier, pour bénéficier d’une priorité (invitation à une soirée), contourner une règle bureaucratique (obtenir un appartement dans HLM « bien situé », une place en crèche, ne pas payer une amende, etc.) ou simplement bénéficier d’un soutien affectif ou partager une bonne nouvelle (permis de conduire, baccalauréat, naissance d’un enfant).
Les réseaux offrent des ressources à leurs membres. Les réseaux familiaux sont des sources d’entraide (dons, caution, prêts, garde d’enfants), les réseaux migratoires permettent aux étrangers de s’intégrer plus rapidement dans la société d’accueil par l’aide au logement ou à l’emploi, les réseaux d’anciens élèves des grandes écoles (Polytechnique, ENA, HEC, etc.) ou les réseaux professionnels offrent à la fois des soutiens matériels mais aussi des opportunités d’emplois, un « carnet d’adresses » nécessaire pour mener une carrière prestigieuse, occuper des postes bien rémunérés. La constitution de réseaux informels peut être aussi déterminante pour la compétitivité des entreprises, notamment lorsque les réseaux professionnels offrent des ressources (personnels qualifiés, confiance, partenariat, capitaux) qui sont nécessaires au développement de l’activité.
Le politologue américain Robert Putnam souligne l’importance des contacts réguliers entre les personnes, notamment dans le cadre associatif pour mesurer le capital social. La participation à des groupes a des effets bénéfiques pour les individus et pour la collectivité.
Le capital social apparaît comme une externalité positive. La baisse de la participation associative dans les classes populaires (baisse du syndicalisme, bals et sociabilité de quartier) et dans les classes moyennes (stratégies individualistes) témoignerait d’un déclin du capital social. Le sociologie P. Bourdieu insiste quant à lui sur le fait que le capital social renforce les inégalités économiques et culturelles dans la mesure où les stratégies dans les classes dominantes sont orientées vers la constitution d'un capital social ( ex rallyes + activité, club automobile de France, Rotary Club, bottin mondain etc.) qui, converti en position sociale dominante donne accès aux postes prestigieux et aux rémunérations élevées. La mesure du capital social est cependant encore sujette à controverse.
Lorsque les individus entretiennent des liens interpersonnels, ceux-ci peuvent être « forts » ou « faibles ». Le lien est d’autant plus fort que les personnes ont passé du temps ensemble, ont de l’affection l’un pour l’autre, se font mutuellement confiance et se rendent des services réciproques. Les « liens forts » sont généralement les relations avec les membres de la famille, les amis proches, les collègues de travail, et les liens faibles, sont les relations plus occasionnelles et espacées.
Le travail du sociologue américain Mark Granovetter sur le processus d’embauche de cadres dans la région de Boston (États-Unis) permet de souligner l’importance des contacts personnels dans les flux d’information. Il démontre alors « la force des liens faibles » pour obtenir un emploi. Les relations peu intenses et peu fréquentes (ou « liens faibles ») peuvent être plus efficaces, dans certains milieux sociaux, que les « liens forts », pour obtenir un poste. Pour les personnes qui recherchent un emploi, les « liens faibles », qui permettent de rencontrer des personnes à l’extérieur du groupe de fréquentation habituel, sont plus efficaces que les « liens forts » puisqu’ils permettent d’avoir accès à des informations nouvelles.
Ainsi, pour Mark Granovetter, la compréhension du marché du travail ne doit pas se limiter à une analyse en termes d’offre et de demande. Les offreurs (candidats) et les demandeurs (employeurs) ne prospectent au hasard. Avant la signature du contrat de travail, il y a l’ensemble des relations qui ont permis de devenir salarié : conseils de proches (parents ou non), connaissances ou reconnaissances entre pairs, recommandations d’amis ou « d’amis d’amis », etc. Il invite donc à intégrer dans l’analyse du marché du travail les réseaux sociaux mobilisés avant l’embauche. Mais surtout, il précise que l’efficacité des acteurs, et donc leur insertion dans l’entreprise, ne repose pas seulement sur leur seule productivité mais aussi sur la qualité et la diversité de leur réseau, sur « la force des liens faibles ». Cette analyse a été nuancée dans le cas de la France. En effet, dans les milieux populaires (employés, ouvriers), il semble que se sont plutôt les « liens forts » (conjoints ou parents) qui sont souvent les plus efficaces pour trouver un emploi que les relations indirectes. Par ailleurs le développement du lien numérique invite à repenser la force des liens. Les "amis" de Facebook ou de Viadeo sont aussi des proches (camarades de classe, voisins) et des membres de la famille. Le développement de ces réseaux amplifie le nombre de liens faibles.
L'analyse de la force des liens faible peut être complétée par une analyse des trous structuraux. Un trou structural est une configuration ou un individu rejoint deux cliques. les individus intermédiaires se trouvent dans une relation de pouvoir favorable, ils peuvent arbitrer dans la relation, retenir ou donner des informations, attiser ou utiliser les conflits.
Q1. Définir réseau social, sociabilité, lien faible, graphe, externalité positive, capital social
Q2. Pourquoi la notion de réseau social ne doit pas être confondu avec celle de réseau numérique ?
Q3. Quels sont les effets des réseaux sociaux numériques ? Fâites un schéma en arborescence.
Q4. Comment peut-on mesure le capital social ?
Q5. Le capital social a t-il des effets équivalents dans tous les milieux sociaux ?
Q6 Pourquoi Mark Grannovetter parle t-il de la force des liens faibles ?
Q7. Quel avantage peut-on avoir de se retrouver entre 2 cliques ?