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Le déclassement social augmente t-il ?

    Un cas exemplaire serait celui d’une fille hôtesse d’accueil ( employée administratif d’entreprise) avec un bac +2 dont le père est cadre. Le père, niveau d’études BEPC, est cadre dans la fonction publique. La fille, niveau d’études bac + 2, se retrouve à faire l’hôtesse d’accueil,

« C’est dingue quand on y pense » répète t-elle. Le déclassement social se juge par la comparaison des positions sociales entre le père et la fille. Avec un niveau d’études supérieur, la fille occupe une position sociale moins prestigieuse que celle du père.

 Selon Éric Maurin, il y aurait en France plus une « peur du déclassement » qu'un déclassement objectif. Il y a une difficulté objective de juger d’un déclassement social car il sous-entend un jugement de valeur sur la trajectoire et dépend de plus d'autres données plus objectives comme l'évaluation des positions sociales dans le temps.

 

 Ce débat est assez complexe du fait de la polysémie de la notion de déclassement. On peut définir le :

-        déclassement social comme le fait d’avoir une position sociale inférieure à celle de ses parents  (déclassement  social = mobilité sociale intergénérationnelle descendante)

-        déclassement scolaire :   baisse du rendement social du diplôme

-        déclassement salarial : le fait d’avoir un salaire inférieur à ce que permet d’avoir son diplôme

-        déclassement subjectif :  le fait de penser que l’on a un métier qui ne correspond pas à son niveau de diplôme

-        déclassement face à l’emploi :  le fait de perdre un emploi stable.
 

On va plutôt s’intéresser au déclassement scolaire en définissant le rendement social comme une valorisation sociale du diplôme qui se traduit par un accès aux position d’encadrement et par une protection contre le chômage.

    

proposition 1. le paradoxe d’Anderson :  L’obtention d’un meilleur diplôme que ses parents ne garantit pas une mobilité sociale ascendante

 

andersonn 2.PNG

 

 47% des fils qui ont un diplôme supérieur à celui de leur père ont un statut soit équivalent soit inférieur.

 

 

Explication : Les individus cherchent à obtenir un diplôme supérieur à ceux de leurs parents, comme chacun prend la même décision, il en résulte un effet d’agrégation qui aboutit à une diminution du rendement social du diplôme (dévaluation du diplôme). Un raisonnement rationnel conduit tous ceux qui ne souhaitent pas descendre l’échelle sociale à faire des études plus poussées. Certains diplômés doivent accepter des emplois plus faibles. Il y aurait donc une diminution du rendement du diplôme. Certains parlent de dévaluation du diplôme : un même titre scolaire étant détenu par davantage d’agents, il perd de son efficacité relative.

 

 

Proposition 2. Un diplôme identique peut donner accès à des positions sociales moins élevées que celles de ses parents.

 

devenir professionnel des fils d'ouvriers et d'employés.PNG

 

devenir professionnel des enfants de cadre.PNG

évolution des trajectoires.PNG

 Analyse en dynamique

 

On peut avoir un diplôme équivalant à ses parents :

 - et avoir une position sociale supérieure   15 % en 1970,  23 % en 93

- et avoir une position sociale équivalente : 73%  en 1970 et 69% en 1993

- et avoir un statut social inférieur (déclassement social) : 12 % en 1970 et 8% en 1993

 En 1993, 8% des fils ayant un diplôme analogue à celui de leur père ont un statut social moins élevé, de plus cette proportion diminue. La mobilité sociale descendante est relativisée. Le fait qu’à diplôme équivalent la proportion d’individus ayant un statut équivalent baisse peut permettre de penser cependant qu’il y a un déclassement.

 

Proposition 3. En période de faible croissance, les diplômés issus des classes moyennes ont du mal à valoriser leurs diplômes ( vidéo chauvel)

 

En période de forte croissance, le nombre de « places à prendre » est plus important et permet donc la mobilité sociale. En période de moindre croissance, le capital social et le réseau social reprennent de l’importance. ( valide Anderson en temps de crise). L. Chauvel en comparant les générations des années 1940 à celle des années 1960 relève que les premières, entrées sur le marché du travail dans les années 1960, ont profité d’une conjoncture exceptionnelle avec une forte création de postes de cadres alors que la population active était encore peu qualifiée : elles ont pu facilement valoriser leurs diplômes. Au contraire les secondes, entrées sur le marché du travail dans les années 1980 dans un contexte de chômage de masse et après une forte hausse des qualifications, ont eu du mal à valoriser leurs diplômes.

    

C. Peugny en comparant ces deux générations montre une augmentation de la fréquence de la mobilité sociale descendante. Il effectue des entretiens avec des personnes originaires des classes moyennes et en déclassement : celles-ci expriment un fort sentiment d’injustice et de dévalorisation de leurs diplômes en se comparant avec la génération de leurs parents, qui sont parvenus à un statut plus enviable tout en étant moins diplômés. En effet la probabilité d’accès au salariat d’encadrement a diminué avec le temps. Ce qu’il faut nuancer par le fait qu’après un certain temps il est un peu plus facile de devenir cadre, mais pas directement.

 

l'effet cliquet.PNG

 

Proposition 4. Le diplôme a cependant une grande valeur parce qu’il protège encore plus aujourd’hui contre le chômage

 

 chômage et déclassement.PNG

L’économiste E. Maurin conteste ces thèses : traditionnellement les économistes calculent la valeur du diplôme en faisant la différence entre les bénéfices et les coûts des années d’études supplémentaires. Il ne faudrait donc pas comparer un même diplôme pour deux générations mais deux diplômes au sein d’une même génération. Au début des années 1970, le taux de chômage est faible chez les sortants du système scolaire, quel que soit le niveau de diplôme. Aujourd’hui, il est 4 fois plus important chez les non diplômés que chez les diplômés du supérieur. Donc les bénéfices attendus des diplômes en termes de protection contre le chômage ont fortement augmenté.

 

Loin de se dévaloriser, les diplômes sont devenus un enjeu très fort, d’où un investissement scolaire de plus en plus marqué de la part des classes moyennes.

 

Conclusion : l’école ne peut pas tout, il vaut mieux réduire les inégalités des places, on réduira l’égalité des chances en réduisant d’abord l’égalité des places ( revenu, prestige, pouvoir)

 

Première vidéo : Qu'est-ce que le déclassement ?

 

Deuxième vidéo : La valeur des diplômes

 

Troisième vidéo : Le déclassement : marginal ou central ?


 

 questionnaire
 

 



30/01/2016
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