dossier 6.1 Comment la socialisation de l'enfant s'effectue t-elle ?
6. Les processus de socialisation et la construction des identités sociales
Dossier 6.1. Comment la socialisation s'effectue t-elle ?
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A. La socialisation est le processus d'incorporation de la culture
La socialisation est le processus par lequel un individu apprend et intériorise les différents éléments de la culture de son groupe, ce qui lui permet de former sa propre personnalité sociale, son identité et de s'adapter au groupe dans lequel il vit. Il intériorise des manières de faire, de penser et d'être qui peuvent être approchées par les normes, les valeurs, les rôles sociaux de la culture dans laquelle il vit. Les normes sont des règles ou usages, les valeurs sont des idéaux. « Situées socialement », ces pratiques et croyances sont légitimes au sein d’une groupe social donné, mais pas forcément pour la société globale.
L’éducation est centrale dans ce processus de construction sociale des individus : la famille tient donc un rôle important dans cette transmission des savoirs, savoir-faire et savoir-être notamment par les fréquentes injonctions ( les parents donnent des ordres et transmettent ainsi les normes ). Mais la socialisation englobe aussi tous les mécanismes d’imitation ( des parents ou des pairs ). La socialisation se déroule aussi de manière tacite, sans véritable usage de contraintes lors des interactions entre membres de la famille ou avec les amis ( discussions, jeux etc.)
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Les activités socialisatrices auxquelles participe l’individu réussissent parfois au point que le socialisé ne perçoit plus ses actions ou pensées comme provenant de l’extérieur, mais les incorpore. C’est pourquoi les individus ont tendance à ne plus voir la trace laissée sur eux par certaines instances de socialisation (notamment, celles qui fonctionnent le plus par suggestion et non par imposition explicite). Pierre Bourdieu nomme habitus cet ensemble de dispositions intériorisées que l'individu a incorporé comme une seconde nature.
Gunz n' Rocé : Habitus
La socialisation contribue à l’intégration de l’individu en le familiarisant avec les rôles sociaux qu’il devra investir au long de sa vie en fonction des statuts ( position sociale) qu'il occupera. Ces rôles sociaux sont des ensembles de comportements attendus d’une personne occupant une position sociale particulière (homme, père, époux, salarié, militant…). Par son action, la socialisation prépare l’individu à habiter ces rôles.
B. La socialisation se déroule tout au long de la vie et peut faire l'objet de dissonances
La socialisation n’est jamais achevée et évolue au gré des agents de socialisation que l'on peut définir comme un ensemble de personnes, d’institutions, avec lesquelles l’individu se trouve en contact direct ou non. La famille est le principal agent de socialisation, puis interviennent l'école, les groupes de pairs, les organisations productives et pour finir les médias. Toutes ces institutions à des moments divers, et parfois en même temps transmettent les normes et les valeurs. Si l’école est un lieu privilégié d’éducation, il s’y passe aussi des moments socialisateurs hors éducatifs.
On peut distinguer deux grandes périodes de socialisation :
- la socialisation primaire aux premiers âges de la vie qui donne à la famille un rôle essentiel, ainsi qu'à l'école et aux professionnels de l'enfance. La famille transmet notamment à l'enfant le langage et les codes sociaux les plus élémentaires ( apprendre à manger, la politesse etc.) Le socialisé dispose de peu de marge de manœuvre face aux instances de socialisation, qui le dominent soit par soumission volontaire et affective (auprès des parents par exemple), soit par la contrainte. Cette socialisation a tendance à donner au socialisé des schèmes globaux de décryptage du monde.
- la socialisation secondaire qui s'inscrit tout au long de la vie et qui se réactive en particulier lorsque l'individu accède à un nouveau statut social. La socialisation secondaire met en jeu des instances de socialisation potentiellement beaucoup plus diverses que la socialisation primaire : le couple, la profession, les associations, les organisations militantes, les amis, l'Etat. Plus hétérogène, plus « choisie » et moins affective que la socialisation primaire, la socialisation secondaire est aussi moins « globalisante ». Elle inculque à l’individu un certain nombre de règles et de schémas de pensée qui vont lui permettre de se repérer et d’agir dans un univers donné ( professionnel, sportif, militant par exemple) mais sans constituer obligatoirement un principe général de décodage du monde.
La socialisation primaire (notamment familiale) a des effets durables sur l’individu. Les sociologues ont pointé les mécanismes fondamentaux de la reproduction sociale induite par cette socialisation. Les enfants ont tendance à exercer des professions proches de celles de leurs parents, notamment par le fait que la relation des parents à l’école va prédisposer les enfants à des attitudes et aptitudes spécifiques face aux exigences scolaires.
La reproduction sociale est cependant atténuée par divers mécanismes :
- la multiplication des instances auxquelles l’enfant est exposé peut aboutir à ce que celui-ci reçoive des messages contradictoires. En effet, il peut arriver par exemple que les normes et valeurs prônées par la famille ne correspondent que peu ou partiellement aux normes et valeurs incarnées par l’école. Les dissonances culturelles induites par les exigences contradictoires des différentes instances de socialisation peuvent favoriser l'échec scolaire des enfants de classes moyennes ou la réussite des enfants des clkkasses populaires. Tout dépendra u groupe auquel l'individu/élève s'identifie.
- les individus motivés par le désir de changer de groupe social peuvent mettre en place une socialisation anticipatrice en choisissant d'adhérer à des normes et des valeurs différentes de leur groupe d'appartenance mais proches du groupe de référence qu'ils se sont choisis. Les produits de la socialisation primaire peuvent être ainsi modifiés, infléchis par la socialisation secondaire. Cette socialisation anticipatrice favorise la mobilité sociale ascendante.
C. La socialisation produit des inégalités de genre
La socialisation primaire réalisée dans la famille et dans les lieux de garde concerne tous les enfants mais elle est différente selon qu'il s'agit d'un garçon ou d'une fille. On parle alors de socialisation différenciée pour comprendre comment les normes et les valeurs sont intégrées différemment selon le genre. Les rôles dans la famille sont fortement sexués : les femmes s'occupent de la plupart des tâches domestiques et les hommes se consacrent au bricolage.
Les jeunes filles et les jeunes garçons s'identifient fortement à ces rôles et projettent souvent leur ambition sociale en fonction de cette répartition comme on peut le voir notamment dans la différenciation des jeux et des activités culturelles selon le genre. Le groupe de pairs va aussi fortement enraciner les stéréotypes nés dans la famille et relayés par les médias. Les stéréotypes fonctionnent comme des harmoniques qui se répondent entre elles et ne laissent pas la possibilité de penser autrement. Ainsi par exemple alors que les niveaux scolaires sont à peu près équivalents en mathématique entre les garçons et les filles, les stéréotypes selon lesquels les filles sont plus littéraires que les garçons parce qu'elles sont censées être plus du côté de l'émotion induisent le fait qu'elles vont plus souvent dans les filières littéraires et se consacrent moins souvent à des carrières prometteuses en terme de revenu et de prestige.
Q1. Quels sont les stéréotypes mis en avant par cette publicité ?
Q2. En quoi ces stéréotypes sont-ils porteurs d'une socialisation différenciée ?
Q3. Quels sont les effets négatifs de la socialisation des garçons ? de la socialisation des filles ?
Q4. Quels sont les deux systèmes normatifs entre lesquels sont pris les jeunes garçons ?
Q5. Qu’est ce que le plafond de verre ? la fabrique des garçons ? l’homophobie ?
Q6. Selon vous doit-on changer la façon dont on socialise les filles et les garçons ? Et comment ?
D. La socialisation au coeur de l'inégalité des chances scolaires
Les jeunes issus des milieux populaires ( ouvriers, employés) réussissent beaucoup moins bien à l'école que les jeunes issus des milieux favorisés ( cadres, professions intermédiaires, chefs d'entreprise).
Pourquoi ? Contrairement à l'idée reçue qui dit que cette inégalité des chances est liée aux différence de revenu des familles, les sociologues de l'éducation ont montré que ces inégalités reposaient sur une inégale distribution sociale du capital culturel. Celui-ci se définit comme l'ensemble des ressources culturelles (langage, livres, connaissances des oeuvres du répertoire classique, tableau etc.) qui se transmettent principalement dans le cadre familial. Ainsi les jeunes qui grandissent dans un milieu social qui développe une culture proche de celle de l'école vont mieux réussir que ceux dont les parents sont très éloignés de la culture scolaire.
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