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Dossier 8.1. Pourquoi un ordre politique ?

A. De la féodalité à l'Etat-moderne

La féodalité était une forme d’organisation politique et sociale caractérisée par un partage du pouvoir souverain en principautés et fiefs gouvernés par des seigneurs et leurs vassaux. Le pouvoir était traditionnellement lié à la personne physique qui le possède (chefs de guerre, grands féodaux, rois, etc.). Un mariage sans descendance mâle, une guerre perdue ou une contestation des descendants modifiaient le titulaire et la nature du pouvoir.

               Face à une société fractionnée en seigneuries, il appartiendra au pouvoir royal d’imposer un nouvel ordre politique autour de nouvelles pratiques d’allégeances. On observe donc à ; la fin du Moyen-âge une centralisation du pouvoir politique. Les principales « maisons » puis « la maison de France » peuvent revendiquer avec succès de nombreux monopoles économiques, politiques ou symboliques.

               L’autorité des Capétiens s’impose, souvent par la guerre, aux dynasties rivales et à la papauté. Le roi impose la justice royale dans les conflits entre vassaux et seigneur, prélève des taxes nouvelles et généralise les prélèvements fiscaux réguliers qui permettent de financer une armée de professionnels. Il s’impose donc comme pouvoir suprême, voire divin.

               A partir de la fin du XVe siècle, l’État est devenue une réalité indépendante du souverain. Accumulation, unification et concentration de ressources territoriales, militaires, juridiques et financières renforcent un monopole de domination de type étatique. Au XVIe siècle, la sphère des activités politiques se distingue des pouvoirs religieux. La séparation du pouvoir temporel et du spirituel et l’esprit des Lumières transforment profondément l’ordre politique. La source de tout pouvoir va progressivement résidé dans le peuple qui, par l’intermédiaire de ses représentants, organise l’État au service du bien public.

 

B. L’évolution de l’État dans le monde occidental.

L’État est une forme d’organisation du pouvoir politique. Un État est une collectivité qui se compose d’un territoire, d’une population et d’un pouvoir politique organisé. Sur le plan juridique, l’État est la personne morale de droit public qui représente une collectivité, un peuple ou une nation, à l’intérieur ou à l’extérieur d’un territoire déterminé sur lequel elle exerce le pouvoir suprême par le biais d’un gouvernement qui administre un certain nombre de monopoles, via un appareil administratif nommé « bureaucratie ». D’une manière plus large, l’État est l’ensemble des administrations, déconcentrées ou décentralisées, qui assurent le fonctionnement du pays (ministères, préfectures, administrations, etc.).

 

Pour Max Weber, c’est d’abord le « monopole de l'exercice de la violence physique légitime » qui le caractérise : c'est-à-dire qu'à travers l'armée, la police ou la justice notamment, lui seul a le droit d'user de la contrainte par la force sur un territoire donné en vue d'y maintenir l'ordre. Ces fonctions dites régaliennes ne sont cependant pas les seules qu'il peut accomplir, au cours de l’histoire son rôle a évolué dans la fourniture de services publics, auxquels il est reconnu collectivement que tous les citoyen-ne-s doivent pouvoir accéder, notamment l'éducation, ainsi que dans la régulation de l'économie, afin, en particulier, de juguler le chômage et de favoriser le bien-être de la population. Ces fonctions et leur hiérarchisation ne sont pas données une fois pour toutes, mais évoluent au fil des temps et des lieux et surtout des aspirations des citoyen-ne-s que l’appareil d'État est censé servir. De manière générale, comme l'a remarqué l'économiste Adolph Wagner, plus la prospérité d'un pays augmente et plus les dépenses – et donc l'intervention- de l’État y sont élevées.

 

La souveraineté est la qualité d’un État qui n’est soumis à aucune puissance extérieure ou intérieure. Ainsi, l’État conduit les relations extérieures, garantit l’organisation de la justice, assure la direction de l’économie, de l’éducation. Il peut aussi, lorsqu’il se veut Providence, participer plus largement à la production de services sociaux via une plus grande redistribution des richesses, etc. Cependant, un État peut transférer certains de ses pouvoirs à des organisations internationales ou à d’autres États. Mais le transfert de souveraineté est volontaire. La France, par exemple, a transféré sa souveraineté monétaire à la Banque centrale européenne.

Toutefois, on doit distinguer État et nation. Le premier ayant une dimension juridique et institutionnelle, le second une dimension psychologique et culturelle. L’État moderne s’est construit parallèlement à l’affirmation de la nation.  

 

 C. Construction étatique et construction nationale

 

Les définitions de la nation sont diverses voire contradictoires. On peut opposer une conception élective de la nation, comme celle d’Ernest Renan présentée dans sa conférence à la Sorbonne (1882), qui met l’accent sur la volonté, le « désir de vivre ensemble », à une conception ethnoculturelle de la nation, qui la fonde sur des caractéristiques plus objectives comme la langue, la religion, la culture, etc. On peut de manière synthétique définir la nation  comme un groupement d’individus ayant entre eux des éléments communs à la fois objectifs (langue, mode de vie, attitude face à la religion, etc.) et subjectifs (histoire commune, sentiment communautaire, désir de vivre ensemble, etc.) qui les unissent. Le droit du sol est lié à la conception élective, tandis que le droit du sang est lié à la conception ethno-culturelle.

 

 En France, comme en Angleterre, l’action centralisatrice et unificatrice du pouvoir royal a contribué à l’émergence de la nation. Le sentiment national s’est lentement diffusé au sein de la population. Dans d’autres pays, l’idée de nation s’est développée en l’absence d’un cadre étatique unitaire. En Allemagne, la langue et la culture communes ont favorisé l’essor de l’idée de nation allemande avant l’unité politique (1871).

 

L’État-nation est un État dont la population forme une nation : la frontière de l’un et de l’autre coïncide. Toutefois, le sentiment d’appartenance à un groupe n’épouse pas toujours les institutions souveraines :

-         une nation peut ne pas disposer d’un État (les Palestiniens, les Kurdes) 

-         un État peut comprendre plusieurs nations (Espagne, Allemagne, Suisse, Royaume-Uni).

 



15/09/2014
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